Thèse soutenue

Rôle de la macrofaune marine dans le cycle du carbone, impacts anthropiques et potentielle inclusion dans le portefeuille des solutions naturelles pour le climat

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Auteur / Autrice : Gaël Mariani
Direction : Marc Troussellier
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Ecologie fonctionnelle
Date : Soutenance le 21/12/2023
Etablissement(s) : Université de Montpellier (2022-....)
Ecole(s) doctorale(s) : Biodiversité, Agriculture, Alimentation, Environnement, Terre, Eau
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Unité Mixte de Recherche CNRS-IFREMER-IRD-UM 9190 MARBEC Marine Biodiversity, Exploitation and Conservation Université de Montpellier
Jury : Président / Présidente : Luc Abbadie
Examinateurs / Examinatrices : Lydie Chapuis-Lardy, Verena Trenkel, David Mouillot
Rapporteur / Rapporteuse : Laurent Bopp, Sebastian Villasante

Résumé

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Alors que l’impact du changement climatique et des activités humaines, principalement la pêche, sur la biodiversité marine a fait l’objet de nombreuses études, le rôle de la macrofaune marine dans le cycle du carbone reste encore mal connu et peu quantifié. L’objectif de cette thèse est donc d’étudier le flux, l’export et la séquestration de « carbone bleu » par la macrofaune marine dans un contexte de pêche et de changement climatique, pour in fine discuter de leur potentielle inclusion dans le portefeuille des Solutions Naturelles pour le Climat (SNC) ; solutions visant à protéger, restaurer et gérer durablement des écosystèmes qui séquestrent du carbone.Nous avons d’abord quantifié l’impact historique de la pêche sur les émissions de CO2 et sur la non-séquestration de carbone en empêchant la chute des carcasses de la macrofaune. Nous mettons en évidence que la pêche, notamment en haute mer, extrait du carbone de l’océan grâce à des subventions gouvernementales, et l’empêche ainsi de couler. Nous montrons aussi que la pêche à largement réduit le puits de carbone que représente certaines espèces, les émissions liées à la pêche du thon obèse (Thunnus obesus) dépassant même la quantité de carbone séquestrée par leurs carcasses.Nous avons ensuite modélisé l’évolution de la biomasse, des flux et de la séquestration de carbone générés par la chute des carcasses et des fèces de la macrofaune d’intérêt commercial de 1950 à 2100 selon différents scénarios combinant changement climatique et pêche. Nous montrons que pour chaque degré de réchauffement supplémentaire, la biomasse et les flux de carbone vont être réduits de 4,3 % et 2,5 %, respectivement. Dans le scénario SSP 5-8.5 (statu quo), cela signifie que les flux de carbone seraient réduits de 15 % à la fin du siècle comparé aux années 90. Nous montrons aussi que la pêche a déjà réduit ce flux de 57 %, diminution qui va continuer jusqu’en 2100, atteignant 62 % dans un scénario de statu quo.Les SNC doivent aussi avoir comme objectif de minimiser les conflits qui peuvent apparaitre entre l’atteinte d’objectifs multiples (e.g., environnementaux, sécurité alimentaire et économique). Nous avons donc identifié les zones clés pour la séquestration de ce carbone bleu par la macrofaune marine exploitée, soit les zones où la séquestration de carbone et la pêche sont conjointement fortes et donc conflictuelles dans l’atteinte d’objectifs multiples. La majeure partie de ces zones sont identifiées en haute-mer ce qui suggèrent que la pêche industrielle pélagique a un impact disproportionné sur la séquestration de carbone comparé aux pêcheries côtières. En revanche, certaines zones côtières apparaissent aussi comme conflictuelles, surtout quand il s’agit de chalutage benthique. Étant donné que ces pêcheries peuvent opérer là où sécurité alimentaire n’est pas encore atteinte, des conflits peuvent apparaitre. Cependant, en évaluant l’ensemble des co-bénéfices et des inconvénients liés à la mise en place de potentielles SNC en milieu marin, nous montrons que les co-bénéfices sont deux fois plus importants que les conflits et suggérons qu’ils peuvent être minimisés via une collaboration entre acteurs.Cette thèse apporte donc de nouvelles informations sur l’inclusion de la macrofaune marine dans le portefeuille des SNC. Par exemple, limiter la pêche en haute mer et reconstituer les stocks pélagiques pourraient constituer de nouvelles SNC dont le potentiel additionnel maximum de séquestration ne semble pas négligeable (~0,45 GtCO2.an-1) comparé à d’autres SNC comme la restauration des mangroves (~0,40 GtCO2.an-1). Néanmoins, nous soulignons des manques de connaissance pour définitivement inclure la macrofaune marine dans le portefeuille des SNC. Par exemple, l’effet de la mise en place d’aires marines protégées, qui doivent couvrir 30% de l’océan d’ici 2030, sur la reconstitution du potentiel de séquestration par la macrofaune reste à estimer.