Thèse soutenue

Impact des pratiques agricoles sur la dynamique spatio-temporelle des communautés de plantes et de coléoptères des bords de champs : approches fonctionnelles et multi-échelles

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Auteur / Autrice : Isis Poinas
Direction : Christine MeynardGuillaume Fried
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Ecologie des communautés
Date : Soutenance le 15/06/2023
Etablissement(s) : Université de Montpellier (2022-....)
Ecole(s) doctorale(s) : École Doctorale GAIA Biodiversité, agriculture, alimentation, environnement, terre, eau (Montpellier ; 2015-...)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de Biologie pour la Gestion des Populations - UMR CBGP (Montpellier)
Jury : Président / Présidente : Elena Kazakou
Examinateurs / Examinatrices : Adam J. Vanbergen
Rapporteur / Rapporteuse : Adrien Rusch, Clélia Sirami

Résumé

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L'agriculture a été une des principales causes des changements globaux ayant conduit au déclin de la biodiversité, tels que les changements d'utilisation des terres, la pollution des eaux, l’eutrophisation des milieux ou encore la dégradation des sols. Dans ce contexte, il est urgent de développer des solutions écologiques durables pour conserver la biodiversité tout en garantissant la sécurité alimentaire des populations humaines. Les bordures de champs sont un milieu d’étude privilégié pour évaluer les impacts des pratiques agricoles sur la biodiversité, car elles sont directement affectées par les pratiques agricoles appliquées aux champs cultivés adjacents, tout en servant également de refuge et de corridors de dispersion pour de nombreuses espèces. Cette thèse avait pour objectifs (i) d’évaluer la réponse taxonomique et fonctionnelle des communautés végétales des bords de champs au climat, au sol, au paysage et aux pratiques agricoles à différentes échelles spatiales (résolution et étendue) et dans le temps (une décennie), et (ii) de mieux comprendre les influences respectives des pratiques et de la flore sur les communautés de coléoptères. Cette thèse s’appuyait sur le réseau 500-ENI, qui rassemble des données agricoles ainsi que des relevés annuels de la flore et des coléoptères dans plus de 500 bordures de champs en France entre 2013 et 2021. Dans un premier temps, nous avons montré que les pratiques agricoles (herbicides, fertilisation) impactaient négativement la richesse des plantes à l’échelle locale, tandis que le climat et la diversité des cultures avaient un effet sur la richesse à des résolutions spatiales plus larges (40 et 75 km). La composition en espèces, quant à elle, était influencée par le climat à l'échelle locale, et par la fertilisation et la diversité culturale aux résolutions plus larges. Les effets agricoles étaient plus facilement détectés à une étendue régionale que nationale et variaient selon la région biogéographique considérée. Sur une décennie, nous avons démontré que les tendances climatiques confirmaient les attendus du changement climatique en cours (augmentation des températures, diminution de l’humidité des sols), tandis que l’intensité des pratiques agricoles n’avait pas évolué sur cette période (des changements variés sur les pratiques, mais pas de tendance temporelle). Nous avons donc pu observer des changements de la composition fonctionnelle des communautés de plantes en réponse au changement climatique, par une sélection d’espèces adaptées à des températures élevées et à la sécheresse. En raison de compromis fonctionnels, ces espèces étaient également plus sensibles aux pratiques agricoles intensives (stratégie conservatrice et stress-tolérance). Pour finir, nous avons constaté que les impacts du labour et de l’usage des pesticides sur les communautés de coléoptères étaient majoritairement indirects, passant par un effet sur la végétation. L’articulation entre le réseau 500-ENI et un réseau de vignes local a révélé que les impacts agricoles différaient selon le groupe écologique et le régime trophique des coléoptères. Les perturbations agricoles étaient globalement néfastes mais pouvaient se montrer favorables à certains groupes, tels que les prédateurs. L’enherbement géré par pâturage était la pratique la plus bénéfique pour la diversité des espèces et des régimes trophiques. Cette thèse invite à reconsidérer l’importance des effets agricoles à une échelle plus large, mais aussi à adapter le cadre réglementaire aux spécificités régionales. Le maintien d'une agriculture intensive combiné au changement climatique actuel représente un risque majeur pour la diversité fonctionnelle des assemblages floristiques. Des pratiques de gestion plus vertueuses, telles que le non-labour et l’agriculture biologique, pourraient aider à préserver des communautés de plantes et de coléoptères plus diverses, ainsi que les services écosystémiques qu'elles fournissent.