Étude du rôle neuronal des isoformes du facteur de risque génétique BIN1 dans la maladie d'Alzheimer
Auteur / Autrice : | Erwan Lambert |
Direction : | Jean-Charles Lambert, Pierre Dourlen |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Aspects moléculaires et cellulaires de la biologie |
Date : | Soutenance le 03/05/2023 |
Etablissement(s) : | Université de Lille (2022-....) |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Biologie-Santé (Lille ; 2000-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Facteurs de risque et déterminants moléculaires des maladies liées au vieillissement (Lille) |
Jury : | Président / Présidente : David Blum |
Examinateurs / Examinatrices : Magalie Lecourtois | |
Rapporteur / Rapporteuse : Marie-Claude Potier, Marie-Laure Parmentier |
Mots clés
Résumé
La maladie d'Alzheimer (MA) est la première maladie neurodégénérative et cause de démence dans le monde. La MA est caractérisée par 2 lésions pathologiques majeures : les plaques séniles, issues de l'agrégation extracellulaire de peptides A et la dégénérescence neurofibrillaire issues de l'accumulation intracellulaire d'une protéine Tau hyperphosphorylée, menant à une perte neuronale, induisant un déclin cognitif progressif. Dans ce contexte, un dysfonctionnement et une perte synaptique ainsi qu'un élargissement des endosomes précoces dans les neurones font partie des premiers marqueurs cytopathologiques de la MA. La MA est une pathologie multifactorielle avec une composante génétique estimée à hauteur de 60-80%. Grâce aux études d'association pangénomiques, il a été possible d'identifier de nombreux gènes de susceptibilité pour la MA, dont le gène Bridging Integrator 1 (BIN1), qui est le second facteur de risque génétique en termes d'association, après ApoE. Étant donné le grand nombre d'isoformes que présente BIN1, la compréhension des fonctions spécifiques de BIN1 est complexe. L'objectif de mon travail a été de mieux définir le rôle neuronal de BIN1 et de ses isoformes dans la physiopathologie de la MA. Pour cela, nous avons utilisé la drosophile, un organisme modèle bien établi, et notamment le modèle du neurone photorécepteur (PR) de l'œil de Drosophile adulte. Nous avons montré que la surexpression de l'isoforme 1 de BIN1 humaine (BIN1iso1) induit spécifiquement une dégénérescence neuronale, contrairement à la surexpression de l'isoforme 8 (BIN1iso8) et de l'isoforme 9 (BIN1iso9). La spécificité de BIN1iso1 vient de son domaine CLAP, impliqué dans l'endocytose et le trafic intracellulaire. Par ailleurs, la dégénérescence induite par BIN1iso1 était caractérisée par une accumulation de vésicules anormalement élargies, présentant des marqueurs endosomaux précoces et tardifs, suggérant qu'un blocage au niveau des endosomes précoces et/ou tardifs pouvait être la cause de la dégénérescence. Pour répondre à cette hypothèse, nous avons réalisé un criblage de facteurs impliqués dans le trafic intracellulaire. Nous avons montré que des régulateurs des endosomes précoces et de recyclage, Rab5 et Rab11, préviennent la neurodégénérescence induite par BIN1iso1, indiquant qu'un défaut au niveau des endosomes est bien responsable de la dégénérescence neuronale. Le trafic endosomal est crucial dans la fonction synaptique des neurones, qui est affectée précocement dans la MA. Nous avons donc aussi voulu décrypter le rôle de BIN1 humaine et de ses isoformes au niveau de la synapse. Nous avons ainsi identifié un défaut de la transmission synaptique dans les neurones PRs. Nous avons ensuite utilisé la jonction neuromusculaire (JNM), le modèle synaptique de référence chez la drosophile, et nous avons observé que la surexpression de BIN1iso1, contrairement à BIN1iso8 et 9, induit une altération de la morphologie des boutons synaptiques, arborant un aspect déchiqueté et se regroupant en grappes. L'analyse morphométrique des JNMs nous a permis de mettre en évidence que la surexpression de BIN1iso1 augmente significativement le nombre de boutons synaptiques et diminue leur taille moyenne, sans impacter le nombre de zones actives, probablement via les mêmes mécanismes décrits dans les neurones PRs. L'ensemble des résultats obtenus chez la Drosophile ont été étendus en modèles de culture cellulaire mammifère. En conclusion, nos données fournissent de nouvelles informations sur le rôle physiopathologique du gène de susceptibilité de la MA, BIN1, et de ses isoformes. Plus précisément, nos résultats démontrent que BIN1iso1 contribue aux dysfonctionnements endosomaux précoces et aux changements morphologiques des synapses, deux caractéristiques pathologiques précoces de la MA. Ces résultats ont des implications importantes pour la compréhension des mécanismes complexes qui sous-tendent la MA.