Thèse soutenue

Volcanisme basaltique et phonolitique de Petite Terre (Mayotte, océan Indien) : contribution à la compréhension de la crise sismo-volcanique de Mayotte et des risques associés

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Auteur / Autrice : Tristan Lacombe
Direction : Lucia GurioliEtienne MédardAndrea Di Muro
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Structure et évolution de la Terre et des autres planètes
Date : Soutenance le 14/12/2023
Etablissement(s) : Université Clermont Auvergne (2021-...)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale des sciences fondamentales (Clermont-Ferrand)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire Magmas et Volcans
Jury : Président / Présidente : Jean-Christophe Komorowski
Rapporteurs / Rapporteuses : Laura Pioli, Olivier Namur

Mots clés

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Résumé

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Le volcanisme explosif de Petite-Terre (Mayotte, archipel des Comores, océan Indien occidental) est l'expression subaérienne la plus occidentale d'une chaîne volcanique de 60 km (la chaîne volcanique orientale de Mayotte, EMVC), dont la pointe sous-marine orientale a été le site de l'éruption 2018-2020 de Fani Maoré. La répartition de l'activité volcanique récente et la persistance de l'activité sismique profonde le long de la chaîne volcanique nécessitent de contraindre l'origine de l'activité passée en vue d'une éventuelle activité volcanique future sur terre, la zone étant depuis longtemps considérée comme éteinte. Nous montrons que les anneaux de tuf de Petite-Terre ont probablement été formés par plusieurs éruptions formant un complexe volcanique monogénétique. Les séquences éruptives sont composées de niveaux relativement minces de retombées de ponces grossières et lithiques contenant des blocs balistiques, et de dépôts riches en cendres fines, principalement mis en place par des courants pyroclastiques dilués.Les dépôts sont dominés par des clastes juvéniles (ponce, clastes denses et obsidienne) et comprennent des clastes non juvéniles provenant de cônes de scories mafiques plus anciens et de corail ainsi que des fragments du manteau. Nous concluons que le magma phonolitique est monté directement et rapidement du manteau et a subi une fragmentation magmatique (> 1 km de profondeur). Les pyroclastes fragmentés ont subi une seconde fragmentation, moins profonde lorsqu'ils ont interagi avec de l'eau liquide, produisant des cendres fines et construisant les morphologies d'anneaux de tuff. La localisation de Petite-Terre, à l'intersection des anciens volcans boucliers éteints de Grande-Terre et de la chaîne volcanique orientale de Mayotte (EMVC) actuellement active, soulève la question de son appartenance à l'un ou l'autre système. Les éléments majeurs et traces ainsi que la minéralogie particulière (fayalite-magnétite-feldspath alcalin) montrent que les phonolites de Petite-Terre n'appartiennent à aucune des séries magmatiques définies sur l'ile Grande-Terre mais plutôt à la série magmatique de l'EMVC. Les basanites de Petite-Terre sont similaires à celles trouvées dans le bouclier nord et nord-est de la Grande-Terre et représentent des équivalents aux magmas parentaux des phonolites de Petite-Terre et de l'EMVC, les deux séries ayant été produites par un degré de fusion partielle similaire de la même source, probablement un manteau métasomatisé.La présence de xénolithes d'harzburgite dans les phonolites indique que les phonolites ont évolué dans le manteau lithosphérique (thermobarométrie Cpx-Opx : 400 MPa/ 1015 °C). Des xénocristaux de biotite et d'amphibole riches en Fe, ainsi que des xénolithes syénitiques, montrent que ces phonolites chaudes (thermométrie felspath-alcalin - liquide : 950 °C) ont croisé le chemin d'une lentille syénitique plus ou moins solidifiée (thermobarométrie biotite-seule et amphibole-seule, 200 - 400 MPa, 780 °C). Ces phonolites ont également évolué dans des conditions très réductrices (∆NNO = - 2,3 log unité), ce qui expliquerait leur teneur élevée en fer (jusqu'à 6 % en poids).Ces résultats montrent que le volcanisme phonolitique explosif récent de l'île de Petite-Terre, et probablement de toute la chaîne volcanique sous-marine à l'est de Mayotte, n'est pas lié à l'ancienne activité du bouclier qui a construit l'île de Mayotte et qui est encore potentiellement active. Ce volcanisme récent s'inscrit dans un système très dynamique où l'essentiel de l'évolution magmatique se produit à des profondeurs mantelliques (> 17 km) et peut produire des éruptions sub-pliniennes. Il montre également que les magmas entrant en éruption dans la région peuvent interagir avec les lentilles de liquide magmatique stockées à des niveaux moins profonds, en les remobilisant potentiellement, avec des implications significatives pour le style et la dynamique des scénarios éruptifs possibles.