Thèse soutenue

''Je ne sçai pas quelle altération sentoient les autres'' : écrire l'émotion esthétique à la Renaissance

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Auteur / Autrice : Nathalie Godnair
Direction : Stéphan Geonget
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Lettres Modernes
Date : Soutenance le 27/11/2023
Etablissement(s) : Tours
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Humanités et Langues (Centre-Val de Loire ; 2018-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'études supérieures de la Renaissance (Tours ; 1956-....)
Jury : Président / Présidente : Myriam Marrache-Gouraud
Examinateurs / Examinatrices : Paul-Victor Desarbres
Rapporteur / Rapporteuse : Violaine Giacomotto-Charra, Bruno Méniel

Résumé

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L'expérience esthétique est « de toutes les expériences communément vécues à la fois la plus banale et la plus singulière » écrit le philosophe Jean-Marie Schaeffer au seuil de L'expérience esthétique. Faisant de l'expérience esthétique mais aussi de l'émotion qu'elle fait naître l'expression même de l'individualité, cette définition contemporaine n'est pas vraiment opérante pour désigner ce que les hommes de la Renaissance entendent par le terme « esmotion », à une période où la notion même d'individualité émerge à peine. À partir d'un vaste corpus allant du début du XVIe siècle aux années 1620, composé de passages d'auteurs divers, relevant de genres différents et représentant des émotions à la fois musicales, architecturales, sculpturales et picturales, la présente thèse s'attache à mieux cerner le sens de ce terme et les enjeux à la fois théologiques, philosophiques, scientifiques et sociologiques qu'il soulève, à travers l'étude des traits récurrents ce que l'on peut considérer comme une écriture de l'émotion. On assiste ainsi au fil du siècle à la progressive intériorisation de l'émotion esthétique, qui semble quitter peu à peu l'espace visible de tous qu'est le corps dans son extériorité pour emprunter des voies plus intérieures ou même se replier dans le « petit cabinet d'affections » qu'est le cœur. À travers la représentation des figures de réception et des communautés émotionnelles auxquelles elles appartiennent, on assiste également à la progressive individualisation d'une émotion initialement considérée comme universelle, qui devient peu à peu l'apanage d'une conscience singulière. D'abord régies par des modèles rhétoriques tels que l'ekphrasis qui s'attachent avant tout à des œuvres d'arts façonnées de toutes pièces par le texte littéraire et témoignent d'une approche plus intellectuelle que sensible de l'art, les diverses descriptions que font les auteurs de la Renaissance des formes artistiques qui suscitent leur émotion se font de plus en plus référentielles, tandis que s'amorce une subjectivisation du beau et des critères esthétiques qui en permettent l'appréciation.