Thèse soutenue

Entre le bœuf et le jaguar : une histoire des relations anthropo-zoologiques dans les missions jésuites des Guarani (Paraguay, 1687-1737)

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Auteur / Autrice : Thomas Brignon
Direction : Sonia V. RoseCapucine Boidin-Caravias
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Études ibériques et latino-américaines
Date : Soutenance le 08/12/2023
Etablissement(s) : Toulouse 2
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Temps, Espaces, Sociétés, Cultures (Toulouse)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : France, Amériques, Espagne, Sociétés, Pouvoirs, Acteurs (Toulouse ; 1995-....)
Jury : Président / Présidente : Aliocha Maldavsky
Examinateurs / Examinatrices : Cândida Barros, César Itier, Juan Carlos Estenssoro Fuchs
Rapporteurs / Rapporteuses : Arnaud Exbalin, Philippe Erikson

Résumé

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Au Paraguay, dans ses 30 Réductions dites « des Guarani », la Compagnie de Jésus s’est employée à promouvoir l’introduction du bétail européen, de l’élevage et de la domestication, dans le but d’obtenir la conversion de dizaines de milliers d’Indiens à la vie sédentaire, urbaine et chrétienne. Horticulteurs semi-nomades, chasseurs, pêcheurs et cueilleurs, les Guarani avaient de leur côté recours à l’apprivoisement individuel de la faune sauvage et cultivaient un répertoire de pratiques et un système de représentations intimement liés aux forêts subtropicales. Relocalisés en plaine, où se multiplient des bœufs et des chevaux retournés à la liberté, ils créent sous l’égide des Pères une communauté hybride originale, fondée sur la chasse de ce bétail marron. Encore mal connue, cette véritable révolution anthropo-zoologique est unique tant en termes chronologiques (elle dure de 1609 à 1768) que démographiques (elle implique 140.000 Indiens au début du XVIIIe siècle ainsi que des centaines de milliers d’animaux sauvages, domestiques, apprivoisés ou ensauvagés). Afin d’en retracer les modalités, cette thèse prend le parti de valoriser les quelque 10.000 pages de documentation en langue guarani rédigées par les ignatiens et les Indiens eux-mêmes durant l’âge d’or des missions (1687-1737). En combinant une approche diachronique, quanti-qualitative et pluridisciplinaire, il s’agit d’établir dans quelle mesure le projet jésuite de pastoralisation des Guarani et de leurs animaux est parvenu à s’imposer aux dépens de la prédation, du chamanisme et de l’animisme indiens, mais aussi du gibier paraguayen lui-même. Systématiquement croisés avec les sources castillanes ou latines, mais aussi avec l’ethnographie contemporaine, les textes en guarani révèlent toute l’ambigüité de cette transition, où référents américains et européens finissent par se mêler dans un lexique, des catégories et des récits hybrides, mais également dans des rapports inédits à « l’animal en mission », acteur à part entière du processus d’évangélisation.