Thèse soutenue

Rôle de la morphologie neuronale dans la régulation des flux moléculaires de l’ECS du cortex cérébral : un mécanisme potentiel de la neuroprotection dépendante d’IGF

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Auteur / Autrice : Claire Camus
Direction : Martin HolzenbergerSabah Aïd
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Biologie intégrée
Date : Soutenance le 19/12/2023
Etablissement(s) : Sorbonne université
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Physiologie, Physiopathologie et Thérapeutique (Paris ; 2000-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherche Saint-Antoine (Paris ; 2009-....)
Jury : Président / Présidente : Marie-Claude Potier
Examinateurs / Examinatrices : Mario Pende, Bertrand Tavitian, Jean-Léon Thomas
Rapporteurs / Rapporteuses : Fanchon Bourasset, Jean-François Ghersi-Egea

Résumé

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L’espace extracellulaire entre les cellules du tissu nerveux (ECS) est le siège de flux moléculaires constants et essentiels à la physiologie cérébrale. Ces flux sont toutefois fortement dépendants de la grande complexité des surfaces cellulaires qui délimitent l’ECS et de l’enchevêtrement de ses constituants matriciels. Initialement considéré comme relativement immuable, l’ECS est en réalité très dynamique. Son volume accessible aux solutés représente 15 à 20 % du volume cérébral et sa structure réticulaire, qui entrave leurs flux moléculaires — contrainte appelée tortuosité — varient fortement à court et long termes en fonction de l’âge, du rythme circadien et de l’environnement. Cette plasticité de l’ECS joue un rôle majeur dans la clairance cérébrale et son altération semble être impliquée dans le vieillissement cérébral ainsi que dans le développement et la progression de protéinopathies. La pathogenèse de ces maladies, comme la maladie d’Alzheimer (MA) par exemple, repose sur l’agrégation de peptides toxiques qui s’accumulent dans le parenchyme cérébral et causent la mort neuronale. On ne sait pas encore si ce phénomène est une cause ou une conséquence de la baisse de la clairance cérébrale observée dans ces pathologies. Il est en revanche certain que la diminution de ces flux d’épuration contribue à entretenir la pathologie dans les deux cas. J’ai pensé qu’une manière de lutter contre la protéotoxicité pourrait être de préserver de façon durable des flux moléculaires efficaces dans l’ECS, en régulant ce qui peut concourir à entraver la progression des molécules, c’est-à-dire en diminuant sa tortuosité. Une approche consisterait à intervenir sur la forme des parois de l’ECS, notamment sur la morphologie des prolongements et des corps cellulaires, en agissant sur des régulateurs de la taille cellulaire. Un candidat intéressant est le récepteur de type 1 des facteurs de croissance insulinosemblables, IGF1R, impliqué dans le contrôle de la taille cellulaire, et dont le knockout (KO) neuronal confère aux neurones une résistance accrue aux stress hypoxiques et protéotoxiques d’une part, et une morphologie plus compacte d’autre part. En parallèle, notre équipe a montré que des souris modèles de la MA étaient protégées contre le déclin cognitif, la mort neuronale et l’accumulation d’espèces amyloïdes dans le parenchyme cérébral quand la signalisation IGF1R neuronale était supprimée. Gontier et al. ont notamment identifié la clairance cérébrale comme un acteur de cette neuroprotection. Ces données m’ont amenée à formuler l’hypothèse que la compaction de la morphologie neuronale due au KO d’IGF1R permet de réduire la tortuosité de l’ECS de sorte à faciliter les flux moléculaires et la clairance à long terme dans le parenchyme cérébral. J’étudie dans ma thèse la réponse fonctionnelle de l’ECS à une réduction volumique pérenne d’un de ses constituants majoritaires, la population neuronale. J’ai injecté par stéréotaxie des macromolécules paramagnétiques ou marquées par fluorescence directement dans le cortex de souris KO conditionnel inductible pour l’IGF1R neuronal (inIGF1RKO), et analysé in et ex vivo, par IRM et microscopie optique, leurs mouvements dans l’ECS. J’ai montré qu’une morphologie neuronale plus mince favorisait les flux moléculaires dans l’ECS en facilitant la diffusion des solutés et en réduisant sa tortuosité. J’ai prouvé que cet effet facilitateur était présent dès l’âge adulte et se maintenait tout au long de la vie et du vieillissement de la souris. Enfin, j’ai établi que ces changements neuromorphologiques contribuaient à renforcer la relation neurovasculaire par un rapprochement relatif des neurones et des vaisseaux. Dans l’ensemble, mon travail contribue à une meilleure compréhension des phénomènes de neuroprotection dépendants d’IGF-1 et identifie la morphologie neuronale comme un régulateur des flux moléculaires à travers l’ECS et comme une cible potentielle dans la prévention contre la protéotoxicité.