Thèse soutenue

Phytoplancton et couleur de l'eau : analyse multi-échelles de l'avantage adaptatif conféré par l'acclimatation chromatique chez les cyanobactéries marines

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Louison Dufour
Direction : Frédéric PartenskyLaurence Garczarek
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Microbiologie
Date : Soutenance le 08/09/2023
Etablissement(s) : Sorbonne université
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la nature et de l'Homme - Évolution et écologie (Paris ; 1995-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Adaptation et diversité en milieu marin (Roscoff, Finistère ; 2005-....)
Jury : Président / Présidente : Stéphane Egée
Examinateurs / Examinatrices : Cristiana Callieri
Rapporteurs / Rapporteuses : Nicole Frankenberg-Dinkel, David Scanlan

Résumé

FR  |  
EN

Les propriétés physico-chimiques des océans sont particulièrement affectées par le changement climatique. Une expansion rapide des zones chaudes et pauvres en nutriments a notamment été remarquée, modifiant la couleur de l’eau et, par conséquent, la compétition entre les diverses espèces du phytoplancton qui ont besoin de lumière pour produire de l’énergie. En tant que deuxième organisme le plus abondant des océans, Synechococcus constitue un excellent modèle pour évaluer les conséquences de l’altération des propriétés optiques de l’eau sur la distribution, la dynamique et la composition des communautés phytoplanctoniques marines. A ce jour, sept types pigmentaires (TPs) ont été identifiés chez Synechococcus sur la base de la composition et de la chromophorylation de leurs complexes collecteurs de lumière, appelés phycobilisomes. Alors que les TPs 3a et 3c ont une pigmentation fixe qui leur permet de collecter efficacement la lumière verte ou bleue, respectivement, le TP 3d est capable d’acclimatation chromatique de Type IV (CA4). En d’autres termes, ce sous-type peut modifier de manière réversible la pigmentation de ses phycobilismes afin de capturer les photons verts ou bleus, en fonction de la couleur de la lumière ambiante. Deux types génétiquement distincts d’acclimateurs chromatiques également abondants dans l’océan (TPs 3dA et 3dB) ont été mis en évidence. Ensemble, ils constituent le TP de Synechococcus le plus répandu à l’échelle globale, bien que les raisons de leur prévalence dans les populations naturelles ne soient pas claires. Les TPs 3dA et 3dB possèdent chacun un îlot génomique impliqué dans la CA4 (îlots CA4-A et CA4-B). Alors que les bases moléculaires de la CA4-A commencent à être bien comprises, celles de la CA4-B sont moins connues. Un des objectifs de ma thèse a donc été de caractériser des gènes de l’îlot CA4-B en utilisant la technologie CRISPR-Cas12. La caractérisation partielle de l’un des gènes (fciB) a suggéré que la régulation de la CA4 chez les TPs 3dB pourrait être inversée par rapport à celle rencontrée chez les TPs 3dA. En effet, FciB semble agir comme un activateur chez l’un, et comme un répresseur chez l’autre. Pour étudier les différences phénotypiques entre les deux types d’acclimateurs chromatiques, j’ai également examiné leur réponse dans diverses conditions de température, quantité et qualité de la lumière. De toute évidence, les TPs 3dA et 3dB diffèrent dans le rapport de lumière bleue et verte nécessaire pour déclencher la CA4. Le deuxième objectif a consisté à mieux caractériser l’avantage conféré par l’acclimatation chromatique par rapport à la pigmentation fixe. Pour cela, j’ai réalisé des mono-cultures et co-cultures de représentants des TPs 3a, 3c et 3dB dans différentes conditions de qualité et de quantité de lumière. J’ai démontré que les spécialistes de la lumière bleue (PT 3c) et verte (PT 3a) sont les meilleurs compétiteurs dans des conditions de faible lumière bleue et verte, respectivement. A plus forte intensité lumineuse, le spécialiste de la lumière verte a remporté la compétition en vert, et l’acclimateur chromatique en bleu. Dans un mélange des deux lumières, la coexistence des deux mêmes souches a été observée. Enfin, le dernier objectif a été d’affiner nos connaissances concernant la dynamique temporelle et spatiale des Synechococcus. Pour ce faire, j’ai participé à une série temporelle de deux ans au niveau de deux sites océanographiquement distincts : la station SOMLIT-Astan en Manche et la station BOUSSOLE en Méditerranée. L’analyse de l’abondance de picocyanobactéries, couplée à divers autres paramètres auxiliaires (disponibilité des nutriments, pigments, caractéristiques optiques de l'eau de mer), suggère fortement une succession saisonnière des TPs 3a, 3c et 3d au niveau des deux sites. Les prochaines analyses métagénomiques devraient permettre de mieux décrire l'abondance relative des différents TPs de Synechococcus, ainsi que leurs cycle saisonniers.