Dissipation dans le système Terre-Lune
Auteur / Autrice : | Mohammad Farhat |
Direction : | Jacques Laskar, Gwenaël Boué |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Astronomie et astrophysique |
Date : | Soutenance le 05/01/2023 |
Etablissement(s) : | Sorbonne université |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Astronomie et astrophysique d'Île-de-France (Meudon, Hauts-de-Seine ; 1992-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut de mécanique céleste et de calcul des éphémérides (Paris ; 2000-....) |
Jury : | Président / Présidente : François Forget |
Examinateurs / Examinatrices : Jihad Touma, Marianne Greff, Frits Hilgen | |
Rapporteur / Rapporteuse : Alessandro Forte, Robert Tyler |
Mots clés
Résumé
L'évolution dynamique à long terme du système Terre-Lune est revisitée à travers trois mécanismes géophysiques distincts qui impliquent des redistributions de masse planétaire solide et fluide affectant l'histoire du système. Tout d'abord, nous estimons l'effet des cycles glaciaires du Cénozoïque sur la figure de la Terre. Dans le cadre de la théorie de l'ajustement isostatique, et en utilisant une compilation récente des proxys du volume global de glace, nous résolvons l'équation du niveau de la mer, et nous présentons une série temporelle de l'évolution de l'ellipticité dynamique pendant les périodes glaciaires du Cénozoïque. Nous identifions les principales sensibilités de cette évolution aux variations potentielles de la charge de glace, et aux incertitudes de la modélisation rhéologique et des profils de viscosité interne. Nous ajustons notre modèle paramétrique aux observations récentes du taux de variation du J2 et aux mesures de la dérive des pôles. Nous fournissons ainsi des estimations de la perturbation relative de l'ellipticité dynamique durant l'âge glaciaire du Cénozoïque. Ensuite, nous revisitons l'histoire de l'évolution de la distance Terre-Lune. Les données géologiques disponibles fournissent des instantanés de l'histoire de l'orbite lunaire, le plus ancien enregistré à ce jour datant de ~ 3.2 Ga. Cependant, une reconstruction théorique complète de l'orbite lunaire, qui retrace son évolution depuis l'état actuel jusqu'à sa formation il y a ~ 4.5 Ga, restait à établir. En effet, les modèles précédents de cette reconstruction sont souvent empiriques ou numériquement coûteux, et sont tous incompatibles avec l'âge de la Lune. Nous entreprenons une caractérisation systématique de la dissipation de marée à la fois dans les océans et dans l'intérieur solide de la Terre. Nous fournissons ainsi, pour la première fois, une histoire de l'orbite lunaire en accord avec la mesure actuelle de sa récession et avec l'âge estimé de la Lune. Notre travail s'inscrit dans une lignée de travaux antérieurs sur le traitement analytique des marées fluides, couplées en outre aux déformations des marées solides. Nous obtenons une histoire de l'orbite lunaire qui est contrôlée par des excitations résonantes dans les paléo-océans de la Terre. Ces résonances ont provoqué des variations importantes et relativement rapides du demi-grand axe lunaire, de la durée du jour et de l'obliquité de la Terre. Ces variations astronomiques ont pu entraîner d'importantes variations paléoclimatiques dues au chauffage de marée et aux modifications de l'insolation à la surface de la Terre. Notre solution démontre aussi la robustesse de la méthode cyclostratigraphique pour extraire les données astronomiques des séquences sédimentaires. Enfin, nous étudions l'effet des marées thermiques atmosphériques sur l'évolution du mouvement de rotation planétaire. Nous réexaminons, pour la Terre, l'hypothèse d'une stagnation de la durée du jour pendant le Précambrien, qui résulterait de la rencontre d'une résonance d'un mode de Lamb dans l'atmosphère. Nous construisons un modèle ab initio de marées thermiques décrivant le cas d'une atmosphère à stratification neutre. Le modèle prend en compte les processus dissipatifs à travers le refroidissement radiatif de l'atmosphère et la réponse thermique retardée du sol. Nous extrayons de ce modèle une solution exacte du couple de marée thermique dépendant de la fréquence de marée. Notre solution rend compte des principales caractéristiques spectrales obtenues numériquement dans des études antérieures utilisant des modèles de circulation générale 3D. En particulier, la réponse retardée du sol s'avère être responsable d'une asymétrie dans la résonance du mode de Lamb, remettant ainsi sérieusement en doute l'hypothèse d'une stagnation de la durée du jour. Enfin, bien que l'étude ait été motivée par l'histoire des marées sur Terre, les solutions développées peuvent être directement appliquées à l'étude des exoplanètes.