Thèse soutenue

Les territoires agricoles haïtiens entre dérégulation des marchés, crise politique et résistance paysanne. Les cas de la Vallée de l'Artibonite et de la Plaine du Nord

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Auteur / Autrice : Dieupuissant Florida
Direction : Frédéric AlexandreMarie Redon
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Géographie et aménagement
Date : Soutenance le 08/12/2023
Etablissement(s) : Paris 13
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Érasme (Villetaneuse, Seine-Saint-Denis)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherche Pléiade (Villetaneuse, Seine-Saint-Denis)
Jury : Président / Présidente : Bezunesh Tamru
Examinateurs / Examinatrices : Marie Redon, Corinne Luxembourg, Nasser Rebai, Jean-Marie Théodat
Rapporteur / Rapporteuse : Michel Desse, Sophie Devienne

Résumé

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Les données institutionnelles et les publications scientifiques font état du déclin de l’agriculture haïtienne. Sa place dans le PIB haïtien passe de 45 % en 1970 (MARNDR, 2010) à environ 20% en 2018 (MEF, 2018). Ce déclin se manifeste aussi à travers la dépendance des Haïtiens envers l’importation pour satisfaire leurs besoins alimentaires. Paradoxalement, en dépit des indices manifestes de déclin, le secteur agricole emploie environ 40% de la population et près de 50% de la population haïtienne est encore rurale. C’est ce qui permet de comprendre qu’il existe des noyaux de résistance dans un paysage marqué par le déclin de l’agriculture. Dans ce travail de thèse, nous avons montré que la Vallée de l’Artibonite et la Plaine du Nord constituent des espaces où l’agriculture paysanne résiste en dépit des contraintes. Dans l’Artibonite, cette résistance est visible dans le paysage offert par la monoculture du riz qui s’étale à perte de vue dans une grande partie de la Vallée. Dans cette partie mieux arrosée et drainée, l’agriculture est développée toute l’année avec une alternance riz-riz, riz-haricot, haricot-maïs, riz-maraichage etc. La banane, l’arachide et le « lalo » sont aussi cultivés. Certaines superficies sont inondées et enlaîchées, d’autres complètement sèches, non cultivées à cause du manque d’eau. Cette partie de la Vallée et du pays où l’agriculture, est régulière et fait vivre des milliers de paysans, s’impose encore grâce à une synergie impliquant de nombreux acteurs dont les paysans et les « réelles » organisations paysannes. Les paysans doivent aussi cette résistance à la présence, dans cette Vallée, le plus grand système irrigué du pays. En dépit des irrégularités dans ses interventions, le rôle de l’Etat central ne peut être banalisé dans la compréhension et l’analyse de cette résistance dans la Vallée de l’Artibonite. L’Etat, via ODVA est le seul capable d’intervenir dans les canaux primaires pour le drainage et aussi sur les pistes agricoles en très mauvais état. Les interventions de certaines ONG et organismes internationaux sont aussi significatives, car ils constituent des principaux bailleurs de fonds facilitant les travaux entrepris par les paysans et parfois l’Etat central, via le Ministère de l’Agriculture, des Ressources Naturelles et du Développement Rural (MARNDR). Dans la Plaine du Nord, cette résistance de l’agriculture paysanne se manifeste surtout à travers l’élevage, mais aussi la production végétale. Avec l’accompagnement des ONG et des organismes internationaux, les paysans et les organisations paysannes augmentent le cheptel bovin et valorisent le lait. L’élevage de pondeuses et de poulets de chair connait à son tour une dynamique sans précèdent et implique des acteurs aux moyens économiques diversifiés (du paysan moyen aux investisseurs agricoles modestes). La production rizicole se développe dans certains endroits et surtout dans la Plaine de Maribahoux. Cette production se développe toute l’année dans une partie de la Plaine du Nord grâce à des micro-barrages construits par les organisations internationales et le MARNDR. La pêche, la culture de la banane, la canne à sucre, le manioc, etc. se développent aussi dans cette plaine. Le manioc est valorisé grâce à la production de la cassave, très consommée en Haïti, et qui fait partie des éléments identitaires de cette région grâce au savoir-faire développé. La canne est valorisée par la production de clairin, alcool très prisé en Haïti et surtout dans le milieu paysan.