L'expérience esthétique de Bloodborne : du sublime à la compréhension de l'espace
Auteur / Autrice : | Pierre Dernoncourt |
Direction : | Danièle Cohn |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Philosophie |
Date : | Soutenance le 12/12/2023 |
Etablissement(s) : | Paris 1 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Philosophie (Paris ; 1998-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne (Paris ; 2015-....) |
Jury : | Président / Présidente : David Lapoujade |
Examinateurs / Examinatrices : Danièle Cohn, David Lapoujade, Jacques-Olivier Bégot, Isabelle Kalinowski, Mathieu Triclot |
Mots clés
Résumé
Le jeu vidéo est un medium aujourd’hui bien installé dans le champ de l’esthétique. Néanmoins, ces analyses esthétiques ont eu jusqu’ici tendance à occulter les concepts hérités des XVIIIe et XIXe pour caractériser les ressorts de l’expérience dont ce nouveau medium est l’occasion. C’est notamment le cas du sublime, tel qu’il a été défini par Burke, d’une importance cardinale : sans lui, on ne peut pas comprendre « la terreur délicieuse » (delightful horror) que le joueur rencontre lorsqu’il est confronté aux univers horrifiques que les jeux proposent souvent. Enfin, le concept d’Einfühlung, tel qu’il a été porté par les théoriciens de la Kunstwissenschaft en architecture, est incontournable pour comprendre la dimension spatiale de l’expérience esthétique vidéoludique, c'est-à-dire l’espace du jeu en tant qu’il est vécu, hétérogène, polarisé par des affects et pensé en relation avec le corps qui s’y déplace. Dans le jeu vidéo, ce corps est comme dédoublé : il y a le corps du joueur et celui de son avatar, lequel est défini par un certain nombre de capacités et d’incapacités motrices, qui configurent largement le rapport affectif du joueur à l'espace vidéoludique. Notre premier objectif est de démontrer la nécessité de réinvestir ces concepts, dont la valeur heuristique est encore trop ignorée dans le domaine des Game Studies. L’expérience esthétique du jeu de FromSoftware consiste en une oscillation sans cesse renouvelée entre le sublime et la compréhension de l'espace, entre le plaisir pris dans l’épreuve de la terreur et le plaisir pris dans la connaissance des lieux du jeu, c’est-à-dire dans l’internalisation de leur structure et dans l’éclaircissement de l’histoire cryptique qu’ils recèlent. On ouvre des raccourcis secrets, on se familiarise peu à peu avec l'espace d'un niveau jusqu’à l’avoir totalement incorporé et jusqu’à avoir compris sa signification dans l’économie globale de l’histoire, avant de se retrouver de nouveau confronté à l’effroi lorsque l'on passe au niveau suivant.