L'invention du cartulaire communal : rythmes, formes et finalités de la première cartularisation dans les communautés urbaines de Picardie (XIIIe-XIVe siècle)
Auteur / Autrice : | Marie-Émeline Sterlin-Cathébras |
Direction : | Olivier Mattéoni, Olivier Guyotjeannin |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Histoire |
Date : | Soutenance le 25/11/2023 |
Etablissement(s) : | Paris 1 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale d'Histoire de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (Paris ; 1992-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire de médiévistique occidentale de Paris (1998-....) |
Jury : | Président / Présidente : Élisabeth Lalou |
Examinateurs / Examinatrices : Olivier Mattéoni, Olivier Guyotjeannin, Kouky Fianu, Nicolas Leroy | |
Rapporteur / Rapporteuse : Pierre Chastang |
Mots clés
Résumé
Entre le milieu du XIIIe siècle et les premières décennies du XIVe siècle, Abbeville, Amiens, Beauvais, Saint-Quentin et Senlis, cinq villes de l’espace picard méridional, produisent un cartulaire. C’est une nouveauté car dans cet espace aucune communauté urbaine n’avait alors rédigé de tels recueils. Ils étaient cependant restes peu étudiés, en dépit de l’intérêt que ce type de manuscrit a suscité dans le sillage des renouvellements historiographiques liés à l’écrit et au document. Cette thèse les place au centre de l’analyse et pose la question des ressorts et des modalités de l’invention des cartulaires dans les communes picardes au tournant des XIIIe et XIVe siècle. Elle s’appuie sur un corpus double, dont le cœur est formé par les cartulaires produits par les communautés urbaines picardes durant la période médiévale. Un corpus complémentaire composé par les chartes, les comptabilités et les livres municipaux conservés dans les fonds communaux éclaire ces cartulaires par d’autres sources et les situe dans le système documentaire des communes qui les ont produits. La démarche replace l’invention du cartulaire communal dans une histoire plus longue de la cartularisation en Picardie, marquée par trois vagues principales de rédaction de cartulaires durant le Moyen Age. L’analyse codicologique des cartulaires des cinq villes, tout en permettant de circonscrire et de situer dans le temps leurs différentes phases de rédaction, éclaire la culture et les pratiques d’écriture des clercs de ville, et met en lumière des modalités de copie en tension entre compilation et enregistrement. En retraçant les différents régimes de scripturalités que connaissent les communes étudiées depuis leur fondation, il apparait que l’invention des cartulaires procède du déploiement d’un nouveau rapport à l’écrit à partir du milieu du XIIIe siècle, dont les cartulaires sont l’une des facettes les plus visibles avec l’accroissement du nombre de document. La comparaison avec le reste des systèmes documentaires communaux nuance la nouveauté que représente le cartulaire mais souligne également la place ambivalente qu’il y occupe, entre livre et écriture grise. L’invention de ces cartulaires communaux à lieu dans une période de tensions sociales et de recompositions politiques et institutionnelles fortes, marquées par la suspension des communes, dont les élites communales sortent fragilisées. Dans un contexte de révision du droit et d’une importance croissante de la preuve écrite, les élites communales rassemblent dans les cartulaires des copies des documents à même d’attester leurs droits, que ce soit dans une optique de défense ou d’inventaire. Entre commune et bonne ville, les cartulaires manifestent l’identité de villes, de communes, pouvoir à part entière en dialogue avec le roi.