Thèse soutenue

Le sommeil au XIXe siècle : normes et imaginaires du dormir (années 1770-1914)

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Auteur / Autrice : Sophie Panziera
Direction : Dominique KalifaLaurence Guignard
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire
Date : Soutenance le 07/01/2023
Etablissement(s) : Paris 1
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale d'Histoire de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (Paris ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'histoire du XIXe siècle (Paris ; 195.?-....)
Jury : Président / Présidente : Anne Carol
Examinateurs / Examinatrices : Laurence Guignard, Jacqueline Carroy, Alain Cabantous
Rapporteurs / Rapporteuses : Hervé Guillemain, Stéphanie Sauget

Résumé

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La thèse propose d’analyser les représentations qui conditionnent les rapports au sommeil et aux expériences du « dormir » au XIXe siècle. Elle montre qu’à partir de la fin du XVIIIe siècle, les médecins s'emparent du sommeil comme un objet d'étude à part entière, questionnant la nature et la fonction de cet état physiologique au moment où le sommeil provoqué réinterroge les frontières veille/sommeil. Les innovations techniques permettent dans le même temps de faciliter la vie nocturne, jusqu’à pouvoir la rendre quotidienne. À partir de 1789, la Révolution française érige l’énergie en valeur essentielle du citoyen, se réappropriant et exaltant une culture de la veille politique. S’installe alors un nouveau rapport au temps social, politique et naturel. Le XIXe siècle définit le besoin de sommeil non plus comme un impondérable calqué sur les rythmes cycliques répondant aux lois de la nature, mais dépendant des rythmes propres au corps, relevant de la physiologie individuelle, que les sciences médicales sont chargées de comprendre et déterminer. Puis la norme d’un sommeil de huit heures est réappropriée et revendiquée par une partie du corps social comme un impératif de santé civilisationnel, avant d’être entériné par la législation. L’analyse des discours tenus sur le sommeil entre les années 1770 et 1910 révèle ainsi une dichotomie entre d’un côté les injonctions à la veille citoyenne, politique, artistique, laborieuse, comme un idéal à atteindre pour accéder à la reconnaissance sociale, et de l’autre, la formulation progressive des prescriptions médicales et sociales au bien dormir, les secondes prenant progressivement le pas sur les premières à partir du second XIXe siècle, sans que ces dernières ne s’effacent complètement. En ce sens, le tournant du XXe peut ainsi être lu comme un moment de revendication et de conquête d’un temps de sommeil suffisant pour toutes et tous, dans la formulation sociale d’un « droit au sommeil ». S’appuyant sur les discours médicaux, elle aboutit paradoxalement à une nouvelle naturalisation du besoin de dormir.