Thèse soutenue

Aux frontières du social et du sanitaire : Approche ethnographique de la prise en charge de la santé des sans-abri en centres d'hébergement

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Auteur / Autrice : Chloé Bussi
Direction : Élise PalomaresElise Lemercier
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sociologie, demographie
Date : Soutenance le 17/11/2023
Etablissement(s) : Normandie
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Homme, sociétés, risques, territoire (Rouen)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire des dynamiques sociales (Rouen ; 2017-....)
établissement co-accrédité : Université de Rouen Normandie (1966-....)
Jury : Président / Présidente : Maryse Bresson
Examinateurs / Examinatrices : Michel Castra, Nadège Vezinat, Edouard Gardella
Rapporteur / Rapporteuse : Michel Castra, Nadège Vezinat

Résumé

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Cette recherche inductive, menée au sein de différents centres d’hébergement destinés à accueillir des personnes sans-abri, part du constat que les enjeux tenant à la santé occupent une place centrale dans ces espaces relevant traditionnellement du travail social. En réalisant la monographie d’une association du nord-ouest de la France disposant d’un des plus vieux asiles de nuit de France, la thèse vient interroger le renouvellement des frontières entre le social et le sanitaire. En l’espace d’un siècle, le sans-abri est passé d’un individu dont la société cherchait à se protéger à une personne qu’il convient de secourir. On sait toutefois peu de choses sur la façon dont les travailleurs sociaux, historiquement engagés dans la prise en charge de ces personnes, se sont emparés de la redéfinition de cette question sociale. Cette ethnographie, menée en position d’insider en tant qu’ancienne éducatrice spécialisée, analyse alors « par le bas » la redéfinition sanitaire – conceptualisée comme un processus de sanitarisation – de la prise en charge des sans-abri, en interrogeant à quelles conditions le registre de la santé en est-il venu à s’imposer de manière si évidente, et ce que cela implique pour les professionnels comme pour les hébergés.Nuançant l’idée d’un tournant dans la prise en charge de la santé des sans-abri, l’étude sociohistorique menée met d’abord en lumière combien la prise en compte des affections sanitaires des hébergés a structuré l’histoire de cette association, marquée cependant par une vigilance constante à résister à toute forme d’emprise médicale. La recherche interroge ensuite ce qu’il en est de la matérialité de cette considération du soin. Qui accomplit le travail de care auprès des sans-abri ? L’étude des trajectoires et pratiques professionnelles augure une réflexion sur l’importance d’adosser une perspective intersectionnelle à l’analyse du processus de sanitarisation, dans la mesure où le soin porté aux sans-abri s’inscrit dans une division genrée du travail de care. Puis, la thèse se consacre à l’ethnographie de situations concrètes d’accompagnement d’hébergés. En analysant les effets de cette prégnance sanitaire dans leur prise en charge, l’enquête propose une réflexion sur la correction et la production des inégalités sociales de santé auxquelles sont surexposées ces personnes. À partir du cas des centres d’hébergement et de ses acteurs peu visibles, mais néanmoins centraux dans le soin porté aux sans-abri, cette recherche s’inscrit à la croisée d’une sociologie de la santé et du travail social pour interroger plus largement les enjeux contemporains des recompositions de l’État social.