Thèse soutenue

Les Sentinelles de l’Etable. Robotisation de la traite et nouvelle division du travail dans l'élevage laitier français

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Auteur / Autrice : Théo Martin
Direction : Lucette LaurensPierre Gasselin
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Geographie et aménagement de l'espace
Date : Soutenance le 27/10/2023
Etablissement(s) : Montpellier 3
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale 60, Territoires, Temps, Sociétés et Développement
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : INNOVATION - Innovation et développement dans l'agriculture et l'agro-alimentaire, Montpellier SupAgro - Innovation et Développement dans l'Agriculture et l'Alimentation
Jury : Président / Présidente : Michaël Pouzenc
Examinateurs / Examinatrices : Marianne Cerf, Marie-Anne Dujarier
Rapporteurs / Rapporteuses : Laurence Roudart, Philippe Madeline

Résumé

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En agriculture, les robots participent d’une promesse de durabilité et d’accroissement de la productivité du travail. Ils sont mis aussi en avant pour leur capacité à résoudre les problèmes de main-d’oeuvre du secteur, à réduire la pénibilité du travail agricole voire à se substituer aux agriculteurs. Ces promesses et les craintes associées s’ancrent dans un imaginaire de substitution du travail humain qui, depuis la naissance des robots dans la science-fiction du XXe siècle, continue de façonner nos représentations collectives. Si le déploiement des robots agricoles est limité, la robotisation de la traite des vaches laitières constitue la seule innovation robotique à avoir connu un essor soutenu dans le temps. Les premiers robots de traite arrivent dans les exploitations laitières françaises au cours des années 1990 et représentent aujourd’hui près d’une nouvelle installation de traite sur deux. Alors que les gestes de la traite disparaissent, le travail se réorganise autour d’une activité de surveillance et d’intervention nécessaire au maintien d’une traite continue. Car le passage de la traite dite conventionnelle à la traite robotisée transforme la traite en un processus continu dont l’idéal trouve racine dans le principe de fluidité industrielle. Il en découle une nouvelle division du travail organisée autour d’une astreinte de fluidité. En proposant un cadre d’analyse de la division du travail agricole, cette thèse identifie et analyse les changements dans cette division du travail en traite robotisée. La division du travail mise en place au cours de la modernisation agricole du XXe siècle révèle des déclinaisons territoriales qu’une analyse historique et comparative met en lumière au sein de deux petites régions agricoles françaises : le bassin ouest rennais en Ille-et-Vilaine et la zone d’appellation d’origine protégée du Reblochon en Haute-Savoie. Cette thèse montre comment la robotisation de la traite participe d’une reconfiguration de la division du travail dans quatre dimensions. i. Au sein de l’exploitation agricole, la nouvelle organisation du travail facilite l’intégration du travail salarial et son contrôle. Elle consiste également en un élargissement de l’amplitude horaire du travail de l’éleveur et en une plus grande porosité entre travail et hors travail. ii L’astreinte de fluidité mobilise la coopération locale entre éleveurs et participe à comprendre la dynamique géographique de déploiement du robot de traite. La robotisation de la traite peut cependant rendre conflictuels certains accommodements collectifs : dans la zone Reblochon, son déploiement révèle et conflictualise une division territoriale du travail de qualité. iii. Le travail d’astreinte devient aussi celui des techniciens au sein de bassins de maintenance dans un vaste réseau de concessionnaires et franchises du machinisme de la traite. iv. Enfin, la nouvelle organisation du travail qui accompagne la traite robotisée révèle l’aspiration des éleveurs à intégrer des rythmes sociaux dont ils étaient jusqu’alors exclus.