Langue et modernité : la question turque
Auteur / Autrice : | Chloé Petit |
Direction : | Samim Akgönül |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Philosophie - Étude des systèmes |
Date : | Soutenance le 20/06/2023 |
Etablissement(s) : | Lyon 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de philosophie (Lyon) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut de recherches philosophiques de Lyon |
Jury : | Président / Présidente : Salih Akin |
Examinateurs / Examinatrices : Salih Akin, Zeynep Direk, Peggy Kamuf, Emmanuel Szurek | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Zeynep Direk, Peggy Kamuf |
Mots clés
Résumé
Notre thèse propose une relecture de l’histoire des politiques linguistiques en Turquie dans la première moitié du XXe siècle à partir de la philosophie de Jacques Derrida. Les réformes linguistiques de 1928 et 1930 engagées par le pouvoir furent présentées par Mustafa Kemal comme les étapes nécessaires à la modernisation de la Turquie et le socle sur lequel édifier la nation turque. Notre intuition de départ est qu’il y a dans ces réformes et plus particulièrement dans le changement d’alphabet bien plus qu’une simple translittération, bien plus qu’une simple réflexion sur l’arbitraire du signe. Au-delà de la version de l’historiographie officielle et avec l’appui de l’historiographie critique contemporaine, nous proposons d’avancer vers la question du rapport de la souveraineté et du souverain à la langue en partant de l’écriture comme différance au sens de Derrida. Cela nous a permis d’avancer sur ces questions en poussant plus avant une réflexion sur le rapport de l’Etat à l’écriture, sur le choix de la phonétisation de l’alphabet présentée comme nécessaire, sur la mise en avant de la figure de Mustafa Kemal Atatürk présentée comme indissociable de ces réformes. Enfin, ce que nous avons reconnu à partir du corpus derridien, c’est un acte fondateur. Nous posons que l’acte de lire et d’écrire dans la langue nationalisée est au fondement du sentiment d’appartenance national et que ceux-ci composent, ensemble, l’acte même par lequel les Turcs s’inscrivirent dans l’histoire moderne compris comme politisation. Cependant, l’imposition par l’Etat d’une langue afin de constituer une nation pointe la question de la violence du politique et de la violence de la langue elle-même. Passer par la philosophie de Derrida nous permet de penser le fait que cette appropriation de la langue par le pouvoir n’aboutit jamais en totalité. L’homogénéité de la nation et de la langue reste un fantasme. Derrida invite à penser le fait qu’il faille garder la possibilité de l’autre, une ouverture à la venue – possible, imaginaire, attendue, crainte – de l’autre.