Dialectiques agricoles. Cultiver l'autonomie relationnelle : enquête philosophique de terrain sur les pratiques de la permaculture en France
Auteur / Autrice : | Anahid Roux-Rosier |
Direction : | Jean-Philippe Pierron |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Philosophie mention philosophie contemporaine |
Date : | Soutenance le 28/04/2023 |
Etablissement(s) : | Lyon 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de philosophie (Lyon ; Grenoble ; 2007-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut de recherches philosophiques de Lyon |
Jury : | Président / Présidente : Catherine Larrère |
Examinateurs / Examinatrices : Catherine Larrère, Mar Pérezts, Layla Raïd, Gazi Islam, Virginie Maris | |
Rapporteur / Rapporteuse : Mar Pérezts, Layla Raïd |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
En tant qu’ensemble de pratiques culturelles et symboliques, l’agriculture questionne la façon dont les idéaux de prospérité morale et politique d’un côté, et les postures domesticatoires de l’autre, se lient et façonnent l’exercice individuel et collectif de l’autonomie. La permaculture, communément associée au mouvement agroécologique et considérée comme un répertoire d’imaginaires éco-sociaux utopiques, constitue un cas d’observation idéal de la manière dont cette union prend forme et s’exerce. En tant qu’organisation agricole, la permaculture se situe en effet au carrefour des structures sociales et techniques d’appropriation de la nature et, en tant que mouvement social, elle se présente explicitement comme un mouvement alternatif dont la pratique vise à soutenir l’autonomie individuelle et collective. Le principal but de cette étude consiste à examiner, en prenant en compte les témoignages et observation recueillis sur le terrain, la manière dont la permaculture, comme posture domesticatoire et variation d’imaginaires éco-sociaux, configure l’exercice de l’autonomie personnelle et collective. La première partie de ce travail expose le pluralisme historique et anthropologique des postures domesticatoires en les mettant en perspective de la crise écologique contemporaine à laquelle l’agriculture est confrontée. La deuxième partie s’attache, à partir de ce contexte pluraliste, à rendre compte de l’émergence de la permaculture, à la fois comme posture domesticatoire et comme ensemble d’imaginaires éco-sociaux dédiés à l’organisation de relations multi-spécifiques. La troisième partie clarifie l’approche méthodologique de ce travail en caractérisant les enjeux qu’implique l’assimilation de la permaculture à une communauté philosophique et de la philosophie permacole à un mode de vie, ainsi que, plus largement, en envisageant les retombées méthodologiques qu’une philosophie de terrain suppose. Enfin, la dernière partie retrace la manière dont la permaculture articule effectivement posture domesticatoire et engagement moral en développant une approche relationnelle de l’autonomie. A travers cette enquête, nous montrons que la permaculture est un mode de vie philosophique visant à mener une vie écologiquement bonne où la bonté s’exprime en termes moraux (une vie juste) et matériels (une vie heureuse). A cet égard, nous montrons que la difficulté de mener cette « vie bonne » tient principalement au fait que la quête d’autonomie de la permaculture repose sur une reconfiguration de l’engagement personnel à la nature qui se heurte à un mode de vie et à un imaginaire éco-social dominant restreignant sa matérialisation. L’autonomie relationnelle telle que la permaculture l’envisage prend alors l’allure d’une stratégie de contournement de ces restrictions visant à permettre l’exercice de l’autonomie individuelle et collective ainsi que la mise en place de communautés de vie écologiquement « bonnes ». En mettant en lumière la manière dont toute posture domesticatoire prend appui sur une posture morale, ce travail contribue aux discussions relatives à la question du « bon » usage de la nature, ainsi qu’aux débats relatifs à la manière dont les imaginaires environnementaux nourrissent des modes de vie particuliers. En s’ancrant dans la notion d’autonomie à travers une étude de terrain, ce travail contribue également aux discussions relatives à la notion émergente de philosophie de terrain, renouvelant par là-même le regard porté sur la notion de « pratique philosophique », ainsi que sur l’engagement dans un mode de vie philosophique et la recherche de vie bonne. Enfin, ce travail contribue aux discussions relatives à la notion d’autonomie relationnelle, en montrant la manière dont cette forme d’autonomie émerge et se maintient.