Vintimille : de la ville frontalière aux frontières de la ville : Migrations, mobilités et résistances à la frontière franco-italienne
Auteur / Autrice : | Nina Bacchini |
Direction : | Jorge P. Santiago, Luca Queirolo Palmas |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sociologie, demographie |
Date : | Soutenance le 13/12/2023 |
Etablissement(s) : | Lyon 2 en cotutelle avec Università degli studi (Gênes, Italie) |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences sociales (Lyon ; 2007-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre de recherches et d'études anthropologiques (Bron, Rhône) |
Jury : | Président / Présidente : Véronique Hébrard |
Examinateurs / Examinatrices : Bianca Botea, Paola Gandolfi, Alice Aterianus-Owanga | |
Rapporteur / Rapporteuse : Véronique Hébrard, Matteo Aria |
Mots clés
Résumé
La recherche vise à interroger comment le rapport dialectique entre le dispositif-frontière et les mutations des routes migratoires contribue à produire les frontières sociales, spatiales et temporelles de la ville. Il s’agit de proposer une ethnographie d’une ville frontalière qui, au cours du temps, est devenue une route migratoire majeure dans la cadre des mouvements secondaires vers la France et le Nord de l’Europe, depuis l’Italie. Le terrain d’étude est donc la frontière franco-italienne et la ville de Vintimille, en tant que, à la fois, observatoire privilégié des pratiques des subjectivités migrantes, qu'ici précipitent à une échelle locale, et laboratoire des politiques de la gouvernance des frontières. Cet observatoire restitue la complexité des nouvelles configurations des frontières contemporaines, qui se déclinent sous le signe de la mobilité de ses dispositifs. Cette thèse entend donc marquer un tournant épistémologique, théorique et méthodologique au croisement des border studies et de l’anthropologie de la ville. La ville de Vintimille permet d’interroger le processus de frontiérisation (bordering), à savoir la capacité de reproduction des mécanismes de contrôle et d’exclusion bien au-delà de la ligne frontière qui sépare l’Italie et la France ; ce processus crée un rapport de continuité entre la frontière matérielle- dont la fonction serait de freiner, sélectionner, filtrer, différencier les corps en mouvement- et les frontières urbaines qui se reproduisent en ville, avec les mêmes logiques. Pour cette raison, je propose d’analyser le processus qui conduit de la ville de frontière aux frontières de la ville. Le contre-champ à cet empêchement est la réaction des subjectivités en mouvement, pour lesquelles ces frontières continuent de se multiplier : que ce soit sur la ligne-frontière ou tout au long de ses tentacules urbains, il s’agit de continuer le voyage, de se réapproprier de son mouvement ainsi que de son temps de vie. Cette dialectique amène la chercheuse à se positionner sur une partie précise de la battleground (champ de bataille) qui constitue le terrain observé, en militant depuis 2017 au sein de Progetto 20k, un collectif qui fait de la liberté du mouvement son terrain d'action politique. Deux axes principaux sont envisagés : l’un portant sur l’analyse du contexte et de ses recompositions, tant historiques que quotidiennes, à travers une analyse diachronique du terrain de recherche. S’agissant d’un territoire de frontière et d’un lieu historique du passage migratoire, j'analyse les réadaptations de cette borderland dans un parcours analytique connectant ce terrain local à un espace (géopolitique) européen et global. Le cadre micro sera ainsi interconnecté avec une échelle macro. Deux moments historiques majeurs sont proposés en tant que repères temporels pour la réalisation et l'écriture de cette étude : l’année 2015, première année-charnière de l’histoire contemporaine de cette frontière et la crise sanitaire de covid-19. Deux moments de « crise » qui ont amené des transformations importantes à la fois à un niveau local et international. Les conclusions de cette étude soulignent en effet que les moments de crise (politique, sanitaire, économique, « sécuritaire ») impliquent des moments stratégiques capables de conduire à la redéfinition des paradigmes et des dispositifs d’inclusion et d’exclusion. L’autre axe interroge les processus de subjectivation des personnes en mouvement, et des pratiques de réappropriation des espaces traversés et des temporalités habitées.Les interlocuteurs de cette ethnographie ne sont pas seulement les personnes en mouvement mais tout acteur participant à la dynamique de la frontière, dont les solidaires des collectifs et des associations du territoire, ainsi que les riverains de la ville frontalière et des vallées environnantes. Cette ethnographie est le résultat d’un long travail de terrain, qui a duré de 2016 à 2022.