Evolution de la virulence et du spectre d’hôtes chez la bactérie pathogène émergente Legionella pneumophila
Auteur / Autrice : | Guillaume Carrillo |
Direction : | Vincent Daubin, Élisabeth Kay |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Microbiologie |
Date : | Soutenance le 29/09/2023 |
Etablissement(s) : | Lyon 1 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Evolution Ecosystèmes Microbiologie Modélisation (Lyon ; 1999-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire de Biométrie et Biologie Evolutive |
Jury : | Président / Présidente : Karen Moreau |
Examinateurs / Examinatrices : Vincent Daubin, Élisabeth Kay, Karen Moreau, Séverine Allegra, Lionel Guy, Ascel Régis Samba Louaka | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Séverine Allegra, Lionel Guy, Ascel Régis Samba Louaka |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Les bactéries du genre Legionella sont responsables chez l'homme d'une maladie appelée légionellose. Cette forme aiguë de pneumonie peut être mortelle dans 7 à 30% des cas, selon le statut immunologique du patient. Parmi plus de soixante espèces décrites à ce jour, le sérogroupe 1 de Legionella pneumophila est impliqué à lui seul dans 90% des cas de légionellose dans le monde. Cette surreprésentation clinique n'est pas liée à une prévalence accrue dans l'environnement. De plus, des études de génomique comparative n'ont pas permis d'identifier des gènes ou des fonctions spécifiquement présents dans les cinq sous-types les plus fréquemment associés à la maladie. Dans l'environnement, L. pneumophila colonise les écosystèmes aquatiques où elle est présente soit dans des biofilms mixtes, soit associée à des protozoaires hôtes (principalement des amibes) que la bactérie pénètre et utilise à son avantage pour se répliquer largement et finalement les tuer. Chez l'homme, la bactérie infecte les macrophages alvéolaires de la même manière que les amibes. L'élément clé de la virulence est le système de sécrétion Dot/Icm de type IV qui est utilisé pour manipuler l'hôte, en transloquant plus de 300 protéines bactériennes appelées effecteurs dans la cellule infectée. Plusieurs de ces effecteurs auraient été acquis par la bactérie par transfert horizontal de gènes au cours de sa coévolution avec ses hôtes protozoaires. Le vaste répertoire d'effecteurs ainsi que leur redondance fonctionnelle et la grande variabilité au sein des espèces sont autant de critères qui rendent extrêmement difficile la recherche d'un ensemble de gènes et de fonctionnalités expliquant la prévalence excessive de L. pneumophila dans les cas cliniques. Pour ce travail de thèse, nous avons utilisé deux expériences d'évolution expérimentale pour permettre à une souche clinique de L. pneumophila de réduire considérablement sa capacité infectieuse envers les amibes et de l'acquérir à nouveau dans un second temps. Le séquençage génomique réalisé en parallèle sur des spécimens à différents stades d'évolution nous a permis d'identifier le rôle d'un plasmide naturel (pLPP) dans la modification de la virulence de L. pneumophila. En effet, ce plasmide a la capacité de s'insérer dans le génome et de s'en exciser à l'aide d'une séquence d'insertion présente à la fois sur le plasmide et dans le génome. Ces événements d'insertion/excision sont directement liés à la diminution et à la ré-acquisition de la virulence, respectivement. Nous avons également réalisé des expériences d'infection sur différents types de cellules hôtes pour montrer que le schéma de diminution et de ré-acquisition de la virulence envers les amibes s'applique à d'autres hôtes, y compris les cellules humaines. Nous avons également commencé à caractériser un effecteur appelé SidH, dont les deux gènes transcrits sont situés de part et d'autre de la séquence d'insertion dans le génome de la bactérie. Dans la deuxième partie de ce travail, nous avons testé l'hypothèse selon laquelle des événements de transfert horizontal de gènes seraient le principal moteur de l'émergence de L. pneumophila comme principale espèce pathogène du genre Legionella. Pour ce faire, nous avons mis en place une expérience visant à tester la capacité naturelle de transformation de L. norrlandica, la plus proche parente de L. pneumophila dans l'arbre évolutif, mais qui n’a jamais été retrouvée en clinique. Bien que L. norrlandica possède tous les gènes nécessaires à la transformation naturelle, nous n'avons pas réussi à la déclencher dans les conditions testées. Nous avons également montré que L. norrlandica peut se répliquer à l'intérieur des amibes, mais dans une moindre mesure que L. pneumophila. Dans l'ensemble, ces résultats montrent un nouveau mécanisme de régulation de la virulence chez L. pneumophila et ouvrent la voie à de futures recherches utilisant l'évolution expérimentale pour étudier l'émergence de bactéries pathogènes.