Thèse soutenue

Mobilité et réactivité des magmas carbonatés dans le manteau terrestre : apport de l’expérimentation sous pression-température et de la tomographie de rayons X in-situ

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Auteur / Autrice : Elena Giovenco
Direction : Jean-Philippe Perrillat
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Science de la Terre et de l’Univers
Date : Soutenance le 07/07/2023
Etablissement(s) : Lyon 1
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de Physique et d’Astrophysique (Lyon)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire de géologie de Lyon : Terre, planètes et environnement (Lyon ; 2011-....)
Jury : Président / Présidente : Tahar Hammouda
Examinateurs / Examinatrices : Jean-Philippe Perrillat, Catherine Noiriel, Andrea Di Muro, Carmen Sanchez-Valle
Rapporteurs / Rapporteuses : Tahar Hammouda

Résumé

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Les magmas carbonatés ont des propriétés clairement distinctes des très répandus liquides silicatés (faible viscosité et forte mouillabilité), issues de leur structure ionique non polymérisée. Ces liquides forment donc, dès des taux de fusion faibles, des réseaux interconnectés à l’origine de leur fort pouvoir métasomatique. Les expériences de pétrologie et observations géophysiques suggèrent que les zones de fusion partielle associées sont probablement très répandues dans le manteau terrestre, ce qui contraste avec la faible représentativité des laves carbonatées en surface. L’objectif de cette thèse est de contraindre la mobilité et la réactivité des magmas carbonatés dans le manteau supérieur terrestre, et plus spécifiquement à l’interface lithosphère/asthénosphère, par des expériences d’imprégnation d’un carbonate liquide (BaCO3, CaCO3, Na2CO3) au travers d’une matrice solide silicatée (mélange d’olivines et pyroxènes), dans les gammes P ∈ [1.5, 2.5] GPa et T ∈ [800, 1350] °C. Le suivi en temps réel de la migration du liquide par tomographie d’absorption des rayons X résolue en temps a permis d’éclairer les modalités de transport de ces magmas et de quantifier leur cinétique. Deux mécanismes ont été observés : i) l’imprégnation de l’ensemble de l’échantillon par capillarité ; et ii) la localisation du liquide dans des réseaux de fractures. Dans le premier cas, un front de mouillabilité, induit par l’écoulement du liquide au travers des pores les plus larges, progresse de manière rapide (~ 5 mm/h) sur l’intégralité de l’échantillon. Ensuite, comme la porosité n’est pas totalement imprégnée à l’arrière de ce front, le remplissage via les pores plus fins sature progressivement le réseau poreux en liquide carbonaté. Concernant, les échantillons fracturés, les dynamiques d’ouverture des fractures et d’écoulement associé sont suivies au cours du temps. Ces résultats sont complétés par des expériences d’imprégnation sous déformation, par application d’une contrainte de torsion aux échantillons, afin de quantifier l’impact de la déformation sur la distribution et la migration des magmas carbonatés. Ces observations confirment et précisent la forte mobilité des liquides carbonatés, par rapport aux magmas silicatés, mais mettent également en évidence leur extrême réactivité chimique, observable à l’échelle expérimentale en quelques minutes sur les images tomographiques. Afin d’étudier la réactivité chimique de ces magmas avec les minéraux du manteau encaissant ainsi que l’impact associé sur la composition des liquides résiduels, une série d’expériences d’imprégnation d’un liquide CaCO3, de durée s’échelonnant de 15 min à 4 h, ont été réalisées et les produits réactionnels caractérisés par imagerie électronique, spectroscopie de rayons X à dispersion d’énergie et de longueur d’onde, et spectroscopie Raman. Ces expériences ont mis en évidence : i) la génération d’auréoles réactionnelles constituées d’olivines et clinopyroxènes secondaires autour des orthopyroxènes primaires dès les premiers stades (15 minutes) suivant la fusion du carbonate ; ii) l’enrichissement en magnésium et silicium du liquide calcique original ; iii) l’exsolution d’un liquide riche en silice (> 20 wt.% SiO2) à partir de la phase liquide carbonatée ; et iv) la cristallisation d’olivines et clinopyroxènes secondaires au détriment du magma carbonaté, entièrement consommé en 4 heures. Ces observations sont cohérentes avec la réaction de wherlitisation observée dans les échantillons naturels et permettent de mieux évaluer l’évolution temporelle des assemblages minéralogiques et de la composition des magmas carbonatés induite par la dissolution des orthopyroxènes. Par conséquent, nos résultats apportent de nouvelles contraintes quantitatives sur la mobilité et réactivité des magmas carbonatés en vue de leur intégration in fine dans des modèles de transport réactif.