Thèse soutenue

Pouvoir de marché et frictions dans les chaînes de valeur

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Auteur / Autrice : Etienne Guigue
Direction : Francis Kramarz
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences économiques
Date : Soutenance le 05/07/2023
Etablissement(s) : Institut polytechnique de Paris
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'Institut polytechnique de Paris
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de Recherche en Economie et Statistique (Palaiseau ; 1993)
établissement opérateur d'inscription : École nationale de la statistique et de l'administration économique (Palaiseau ; 1960-....)
Jury : Président / Présidente : Isabelle Méjean
Examinateurs / Examinatrices : Francis Kramarz, Isabelle Méjean, Mathieu Parenti, Pierre Dubois
Rapporteurs / Rapporteuses : Mathieu Parenti, Pierre Dubois

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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Cette thèse vise à mieux comprendre le rôle du pouvoir de marché et de la concurrence imparfaite dans les relations entre fournisseurs et acheteurs opérant dans des chaînes de valeur mondiales et nationales entrelacées. Cette recherche s'appuie sur des outils empiriques et théoriques, appliqués à l'industrie laitière française et aux industriels importateurs français.Le Chapitre 1 propose une nouvelle méthodologie pour estimer séparément le pouvoir de marché à l'achat et à la vente, appliquée aux transformateurs de produits laitiers en France. Ces entreprises exercent du pouvoir de marché à l'achat lorsqu'elles achètent du lait cru et à la vente lorsqu'elles commercialisent des produits laitiers. L'analyse est basée sur des données individuelles d'entreprises, où les prix et les quantités de lait cru par origine côté achat et par produit côté vente sont observés de 2003 à 2018. Les marges totales sont estimées via une approche « fonction de production ». L'existence d'un produit de base (i) substituable en tant qu'intrant ou en tant que produit, et (ii) échangé sur les marchés mondiaux où les transformateurs laitiers français sont preneurs de prix, permet ensuite d'estimer séparément les marges de chaque entreprise à l'achat, par origine, et à la vente, par produit. Les résultants indiquent que les entreprises laitières achètent en moyenne le lait cru à un prix inférieur de 16% à sa contribution marginale à leurs bénéfices, et vendent les produits laitiers à un prix supérieur de 41% à leurs coûts marginaux. Une analyse de la transmission des chocs de coûts des agriculteurs et des transformateurs sur la chaîne d'approvisionnement révèle que ces chocs sont partiellement absorbés par les transformateurs. En ajustant leurs marges, les transformateurs lissent les variations de revenu des agriculteurs mais détournent en moyenne 65% de leurs subventions.Le Chapitre 2 analyse l'impact des quotas de production et de leur suppression progressive sur le marché du lait en France, montrant que les quotas ont généré deux types de distorsions. Premièrement, en fixant mécaniquement les parts de production des départements français à leurs niveaux pré-quotas (1984), les quotas ont stoppé une concentration spatiale naturelle pendant environ 25 ans, un processus qui a repris après le début du retrait progressif des quotas en 2008. Deuxièmement, le système de quotas a favorisé la croissance des petites exploitations mais limité l'expansion des plus grandes, freinant ainsi des inégalités jusqu'alors croissantes entre fermes, mais au prix d'une distorsion de l'écrémage concurrentiel des exploitations laitières. Enfin, le processus de rattrapage dans la sélection des exploitations post-quotas est intervenu plus ou moins tôt dans les départements, en fonction de la contrainte imposée par les quotas au niveau local. Ces observations sont rationalisées à l'aide d'un modèle de concurrence parfaite entre exploitations hétérogènes.Le Chapitre 3 quantifie le pouvoir de marché des entreprises à l'achat d'intrants et évalue ses effets agrégés. Le chapitre présente une stratégie empirique visant à estimer le pouvoir de marché à l'achat de produits intermédiaires importés ou achetés localement, sans imposer d'hypothèses sur d'autres marchés d'intrants, et utilisant des données standard de commerce international et de production. Ce chapitre montre que les entreprises manufacturières françaises exercent une marge moyenne à l'achat de 1,49 sur les intrants importés et de 1,59 sur les intrants achetés localement, révélant un pouvoir de marché à l'achat significatif sur les deux types d'intrants. Les conséquences en termes de bien-être sont ensuite explorées avec un modèle d'équilibre.