Thèse soutenue

Epigénétique transgénérationnelle : l'environnement embryonnaire impacte-t-il les performances des générations ultérieures via l'épigénome chez la caille ?

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Auteur / Autrice : Chloé Cerutti
Direction : Frédérique Pitel
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Infectiologie, Physipoathologie, Toxicologie, Génétique et Nutrition
Date : Soutenance le 19/12/2023
Etablissement(s) : Toulouse, INPT
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences écologiques, vétérinaires, agronomiques et bioingénieries (Toulouse)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Génétique Physiologie et Systèmes d'Élevage (Castanet-Tolosan, Haute-Garonne ; 2014-....)
Jury : Président / Présidente : Gwennaële Fichant
Examinateurs / Examinatrices : Frédérique Pitel, Gwennaële Fichant, Maria Manzanares-Dauleux, Céline Cosseau, Guillaume Devailly
Rapporteurs / Rapporteuses : Anne Gabory, Dominique Rocha

Résumé

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Le changement climatique, les contraintes économiques et les préoccupations sociétales pour une agriculture durable vont fortement influencer les systèmes de production animale et nécessitent une caractérisation plus fine de la capacité d’adaptation du génome des animaux à des fluctuations environnementales tout au long de leur vie, dès le stade embryonnaire. L’impact environnemental au niveau du génome est notamment caractérisé par la variabilité de marques épigénétiques (notamment de la méthylation de l’ADN). Elles interviennent dans la régulation de l’expression des gènes et peuvent également être transmissibles à la descendance. L’analyse des marques épigénétiques est rendue possible grâce au développement de technologies de séquençage haut-débit innovantes et d’outils bioinformatiques adaptés. La question scientifique majeure de cette thèse est l’étude chez l’oiseau des effets de l’environnement (injection de molécules contaminantes) pendant le développement embryonnaire, et de leur transmission entre générations. Les travaux ont été réalisés chez la caille, excellente espèce modèle d’intérêt agronomique pour l’étude de ces phénomènes. Le premier objectif consiste à caractériser la réponse de l’organisme face aux variations de l’environnement embryonnaire par l’analyse de (i) données phénotypiques (ponte et croissance) et (ii) de méthylation de l’ADN (RRBS et WGBS) issues de cailles ayant reçu directement une injection dans l’oeuf de génistéine, bisphénol A (perturbateurs endocriniens) ou 5Aza (inhibiteur de l’ADN méthyltransférase). Un effet significatif des différentes molécules injectées sur la croissance des cailles a été mis en évidence, les individus injectés ayant un poids plus faible que les individus non injectés, sans impacter les caractères de ponte. L’analyse de méthylation a été réalisée au moyen d’un pipeline bioinformatique permettant d’effectuer une analyse différentielle du taux de méthylation entre plusieurs conditions expérimentales. Ces analyses ont permis d’identifier des régions différentiellement méthylées entre les conditions expérimentales, mettant en évidence un effet des molécules sur des gènes liés aux voies métaboliques (croissance), au comportement (développement du système nerveux central, transport des lipides et réponse au cholestérol) et à la reproduction (maturité sexuelle). La deuxième partie consiste à caractériser la réponse de l’épigénome aux effets de l’environnement trois générations après l’injection dans l’oeufs de la molécule génistéine (phytooestrogène présent notamment dans le soja). Deux ’épilignées’ de caille (Epi+ et Epi-) ont été produites en utilisant des oeufs fécondés provenant de la même population fondatrice. L’analyse des données de méthylation de l’ADN, issues de deux techniques de séquençage différentes (WGBS et ONT) réalisées sur des échantillons de la troisième génération de ce dispositif, a pu mettre en évidence que l’exposition à la génistéine, lors du développement embryonnaire, impacte la méthylation de l’ADN de la descendance trois générations après injection. L’analyse de méthylation différentielle entre les deux épilignées a permis d’identifier des régions différentiellement méthylées en lien avec des gènes impliqués dans des voies métaboliques, dans le développement du cerveau et dans la reproduction. Ces résultats sont en accord avec les effets observés sur les caractères de reproduction et de comportement. Même si les effets génétiques ont été minimisés, une cause génétique à certains différentiels de méthylation observés n’a pas pu être écartée. Cependant, parmi les régions identifiées, certaines semblent bien être liées à une transmission épigénétique transgénérationnelle des effets de l’environnement. L’information de ces marques épigénétiques pourrait être prise en compte dans les schémas de sélection par l’utilisation de modèles de “transmissibilité” incluant les informations génétiques et épigénétiques de chaque individu.