Les solutions fondées sur la nature pour l'adaptation au changement climatique dans les Alpes : évaluer leur mise en oeuvre actuelle pour faciliter leur déploiement futur

Nature-based Solutions in the Alps to adapt to climate change : from current implementation to future scaling

• Auteur / Autrice : Titouan Dubo-Degeilh
• Direction : Sandra Lavorel, Ignacio Palomo
• Type : Thèse de doctorat
• Discipline(s) : Biodiversité écologie environnement
• Date : Soutenance le 19/12/2023
• Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes
• Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale chimie et science du vivant
• Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire d'écologie alpine (Grenoble)
• Jury : Président / Présidente : François Pompanon
• Jury : Examinateurs / Examinatrices : Nathalie Frascaria Lacoste, Améline Vallet
• Jury : Rapporteurs / Rapporteuses : Davide Geneletti, Uta Schirpke

Mots clés

Mots clés contrôlés

Alpes (France)

Changements climatiques -- Adaptation

Mots clés libres

Solutions fondées sur la Nature

Contributions de la Nature aux Sociétés

Changement Climatique

Alpes

Socio-Écosytèmes

Adaptation transformative

Nature-Based Solutions

Ncp

Climate Change

European Alps

Social-Ecological systems

Transformative Adaptation

Résumé

Le changement climatique se traduit dans les montagnes par l'augmentation en intensité et en fréquence des aléas climatiques extrêmes, affectant la biodiversité et les Contributions de la Nature aux Populations (CNP). Les Solutions fondées sur la Nature (SfN) ont la capacité d'aider les populations locales à s'adapter aux impacts du changement climatique tout en préservant la biodiversité. Cependant, l'état actuel de leur mise en œuvre reste peu compris, ainsi que les principaux freins à leur adoption et leur rôle dans l'aménagement des territoires.Pour combler ces lacunes, j'ai tout d'abord recensé et cartographié une centaine de SfN dans les Alpes visant à s'adapter au changement climatique. Cette base de données illustre la diversité de pratiques existantes pour faire face à un aléa donné et les nombreux CNP qu'elles apportent. J'ai évalué la correspondance spatiale des SfN avec l'intensité des aléas climatiques présente et à venir, ainsi qu'avec la capacité des écosystèmes à délivrer des CNP, ceux déjà acquis par les sociétés humaines, ainsi que ceux dont elles nécessitent. Les résultats montrent une faible corrélation, indiquant que les conditions climatiques et les CNP ne se sont pas les principaux moteurs à la mise en œuvre des SfN dans les Alpes.Pour identifier les principaux freins et leviers à leur mise en place, j'ai réalisé des entretiens semi-directifs en lien avec vingt SfN recensées. Cela m'a permis de définir leur contexte de décision grâce au cadre conceptuel « valeurs-règles-connaissances » et leur niveau de caractéristiques transformatives. L'analyse a révélé trois groupes de contexte de décision, qui sont les transformations locales en quête d'autosuffisance ; les pratiques incrémentales « green deal » basées sur l'évolution de la réglementation et des subventions disponibles ; ainsi que les initiatives impliquant la concertation d'une large diversité d'acteur·rice·s, chercheur·euse·s inclus·e·s. Pris individuellement, ces groupes montrent un potentiel d'adaptation transformative limité, mais considérer leurs interactions permettraient de définir une stratégie régionale d'adaptation intégrée.Pour déterminer le potentiel de déploiement des SfN dans les Alpes, j'ai identifié les zones à prioriser pour l'adaptation des territoires aux sécheresses par les SfN. L'analyse spatiale cible à la fois les zones déficitaires en eau, nécessitant une gestion intégrée de cette ressource, et celles excédentaires en eau, qu'il est primordial de préserver. Ces zones se concentrent dans les zones de plaines du sud et du nord-est. Un nombre limité de zones prioritaires pour l'adaptation coïncident avec celles qui ont un large potentiel pour la conservation de la biodiversité et la séquestration de carbone. Les zones prioritaires ne sont qu'en partie situées dans les aires protégées, nécessitant la prise en compte les situations locales pour la mise en place des SfN.Cette thèse confirme la capacité du concept de SfN à engager les populations locales dans une démarche d'adaptation aux crises climatique et de la biodiversité. Certaines de ces SfN ont la capacité de décloisonner les secteurs en silos pour l'adaptation. Intégrer les SfN plus largement dans ces réflexions permettrait une transformation de la vision de l'aménagement des territoires, où la préservation de la biodiversité est en conflit avec le développement local et la prévention des risques, vers une approche symbiotique. Cependant, de nombreux défis persistent pour déployer les SfN, comme le temps nécessaire pour qu'elles deviennent efficaces, l'existence d'autres enjeux, la prise en compte des incertitudes des conditions futures, ainsi que le manque de sources de financement. Échanger les pratiques existantes, de réussites mais aussi d'échecs, reconnaître le rôle des SfN pour l'aménagement des territoires, et définir de nouvelles méthodes de recherche transdisciplinaires permettrait de favoriser leur adoption.

Climate change impacts mountains by increasing the intensity and frequency of natural disasters, altering Nature's Contributions to People (NCP) and threatening biodiversity. Nature-based Solutions (NbS) are increasingly recognized to support local communities in adapting to climatic hazards and conserving biodiversity. These initiatives hold the potential to accelerate the transformative adaptation of social-ecological systems, addressing the interconnected crises of climate and biodiversity. However, there is a limited understanding of the current stage of NbS implementation, the main existing barriers to their adoption, and their linkages with spatial planning.To address this knowledge gap, I first identified a portfolio of NbS for climate change adaptation in the European Alps and mapped their location. The database showcases a wide range of NbS interventions aimed at addressing a given hazard, with the potential for various NCP co-benefits. Then, I evaluated whether the NbS are located where they are the most needed according to the intensity of the climate hazards they aim to address and to the existing amount of supply, flow and demand of the NCP they aim to provide. The spatial analysis indicates few spatial correlations, suggesting that climate hazards and NCP may not be the primary drivers of NbS implementation.To identify the main levers and barriers of already implemented NbS and guide enabling policies for scaling NbS, I conducted twnety semi-structured interviews with NbS managers. I investigated their decision-making contexts through the values-rules-knowledge framework and by assessing the transformative characteristics of the initiatives. I identified three types of initiatives, namely local self-sufficient transformations; green deal practices based on incremental changes; and co-production initiatives involving various sectors at multiple scales. Individually, these groups show a limited potential for transformative adaptation. However, when considering their interplay, a co-produced regional strategy may hold the potential to foster transformative adaptation.To support the scaling of NbS at the Alpine level, I identified where NbS should be prioritized in the Alps for adaptation to drought. This spatial modelling considered areas where there is a deficit or a surplus of groundwater, respectively aiming at enhancing or safeguarding this essential resource for adaptation. The spatial distribution indicates that priority areas concentrate in the southern and the northeastern lowlands and hillsides. A limited number of areas meet simultaneously priorities for biodiversity conservation, carbon sequestration and climate change adaptation. Priority areas are only partially located within protected areas, emphasizing the need to consider the local conditions when implementing NbS.The findings from these three analyses acknowledge the potential of the NbS concept to engage local communities in adaptation initiatives that jointly address both climate and biodiversity crises. Some of the identified initiatives fostered the adoption of NbS by breaking down silos of governance and sharing experiences. However, some challenges persist for scaling NbS, including the delay before getting benefits, the other interacting local issues, the necessity to deal with uncertainty, and financial barriers. Disseminating NbS, both successful and unsuccessful, recognising their role in multifunctional landscape management, and designing new research protocols can foster their adoption.