« De l’autre côté de la frontière » : souveraineté, gestion des frontières et évolution de la géopolitique du Niger face à l'externalisation des politiques migratoires de l’Europe dans la région saharo-sahélienne
Auteur / Autrice : | Rhoumour Ahmet Tchilouta |
Direction : | Anne-Laure Amilhat-Szary, Harouna Mounkaila |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Géographie |
Date : | Soutenance le 18/12/2023 |
Etablissement(s) : | Université Grenoble Alpes en cotutelle avec Université Abdou Moumouni |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale sciences de l'homme, du politique et du territoire (Grenoble ; 2001-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Pacte, laboratoire de sciences sociales (Grenoble, Isère, France) |
Jury : | Président / Présidente : Camille Lefebvre |
Examinateurs / Examinatrices : Florence Boyer, Julien Brachet, Mahaman Sanoussi Tidjani Alou, Franck Petiteville | |
Rapporteur / Rapporteuse : Olivier J. Walther, Frédéric Giraut |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Mots clés libres
Résumé
Cette thèse propose d’explorer le changement de paradigme qui s’est opéré dans la gestion des migrations au Niger depuis 2015, passant d’une approche de laisser-faire à une approche criminalisant les prestations de services aux migrants. Plus précisément, cette thèse cherche à comprendre le rôle joué par l’Europe, notamment à travers la diffusion de ses normes, de ses fonds et de ses personnes, dans ces évolutions.Plusieurs facteurs sont à l’origine de cette évolution notable : la déstabilisation des systèmes migratoires transsahariens après la chute du régime de Kadhafi en 2011, la détérioration de la situation sécuritaire dans la région et, surtout, la gestion par l’Europe de la « crise des réfugiés » de 2015. Alors que l’afflux de réfugiés menaçait de disloquer l’espace Schengen (Laine, 2017), le seul consensus qui a paru possible aux dirigeants européens était d’externaliser leurs responsabilités en matière de contrôle des migrations et des frontières vers des pays en dehors de l’Union, comme le Niger. Labellisé pays de transit (Frowd, 2019), un rôle qui n’est pas nouveau (Brachet, 2007), il est alors apparu aux yeux de l’Europe comme un pays charnière dans l’externalisation de ses dispositifs de contrôle migratoire et de gestion des frontières (Boyer & Mounkaila, 2018).Cette position centrale dans la stratégie d’externalisation des contrôles aux frontières de l’Union européenne se confirme lors du sommet de La Valette. Les décisions politiques et financières qui y ont été prises, en particulier le Fonds fiduciaire d’urgence de l’UE pour l’Afrique (FFUA), ont désigné le Niger comme son principal bénéficiaire, en le dotant d’environ 300 millions d’euros. Simultanément, alors que le Niger émergeait comme projection des intentions européennes et devenait un lieu d’investissement pour son industrie migratoire, une ruée inédite d’acteurs internationaux, notamment européens, s’est déclenchée vers le pays. En conséquence, le Niger s’est soudainement retrouvé quadrillé par un large éventail d’acteurs internationaux déployant une approche de la gestion des migrations basée sur les routes, où toute mobilité est présumée être à destination de l’Europe, et doit donc être stoppée en tant que telle. Il a ainsi vu ses frontières transformées, tant dans leur forme que dans leur fonction, créant de nouveaux espaces géographiques et politiques pour la gestion des frontières (Frowd P. M., 2021).Cette thèse analyse ces transformations et leurs implications, en déplaçant le point de vue et la méthodologie de l’autre côté de la frontière, afin de proposer un récit alternatif de l’internalisation de cette externalisation et de ses implications pour le Niger. Pour ce faire, elle s’appuie sur une approche méthodologique combinant des approches qualitatives (observations, entretiens, etc.) et quantitatives (Social Network Analysis-SNA), ainsi que des méthodes d’analyse géospatiale et géostatistique.