Thèse soutenue

La coercition économique de l'Union européenne sur le continent africain vecteur de l'affirmation d'un acteur international complexe

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Auteur / Autrice : Nora Ajabli
Direction : Constance Chevallier-GoversNicolas Levrat
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Droit européen
Date : Soutenance le 15/12/2023
Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes en cotutelle avec Université de Genève
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale sciences juridiques (Grenoble, Isère, France ; 2003-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'études sur la sécurité internationale et les coopérations européennes (Grenoble, Isère, France ; 1995-....)
Jury : Président / Présidente : Romain Tinière
Examinateurs / Examinatrices : Makane Moïse Mbengue
Rapporteurs / Rapporteuses : Hajer Gueldich, Zakaria Abouddahab

Résumé

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Du fait des rapports particuliers qui unissent l’Afrique à l’Union, l’histoire de la construction européenne se reflète dans l’histoire Euro-africaine, aussi, le continent s’est-il vu placer aux avant-postes des évolutions connues par ces instruments coercitifs de l’Union, qui le conduiront progressivement vers le développement de son hard power. L’implémentation de la coercition économique sur le continent africain a permis, jusqu’à présent, à l’Union de dépasser ses propres limites pour atteindre ses objectifs de politique étrangère et avancer vers le statut d’acteur international, donnant lieu à une sorte de réaction quasi-chimique, dont le résultat se résume à une combinaison entre la volonté constante de l’Union d’arrimer l’Afrique à l’Europe, et son souhait, tout aussi ancien, d’arrimer la puissance politique à sa puissance économique. Fondées sur une histoire commune dont la présente étude mettra en exergue l’influence sur l’’évolution des liens entre les deux rives de la Méditerranée, depuis le XIXème siècle à nos jours, la relation euro-africaine n’a cessé de conduire l’Union européenne vers des défis renouvelés, la confrontant sans cesse à ses propres limites.L’Union européenne est souvent dépeinte comme une puissance économique capable d’intervenir dans les relations interétatiques essentiellement par la diffusion du modèle économique et politique libéral, ou encore, comme une puissance normative, seulement capable d’intervenir pour la socialisation des relations internationales par sa production normative. Un tel constat suppose que l’atout central de l’Union sur la scène internationale est sa capacité d’attraction et de persuasion fondée sur un modèle de valeurs, dénuée de son corolaire le hard power, soit la capacité de coercition.Le terme de « coercition », ici limitée à sa forme économique, ne désigne pas ici des cas de représailles intervenant en cas de différends commerciaux, lorsque l’une des parties viole un élément commercial de la relation, mais il s’agit du recours à la coercition via des outils économiques, en vue de répondre à la violation d’éléments essentiellement politiques par la partie visée. Dans le cas de l’Union, ce type de coercition s’inscrit essentiellement dans deux instruments dont nous soulignons l’apport au processus de construction européen, il s'agit des mesures désignées, depuis 2009, par l’article 215 du TFUE comme « restrictives », et de la conditionnalité politique, systématiquement insérée dans les accords euro-africains depuis 1995.Dans une première partie, nous analyserons le rapprochement de la high politic et de la low politic européenne, menant à l’émergence de la coercition économique avant de se pencher sur sa légalité au regard du droit international. Dans une seconde partie, nous démontrerons à travers l’action européenne en Afrique, la façon dont la coercition économique s’est inscrite au centre des instruments de hard power et de soft power auxquels la clause de transversalité prévue par l’article 21 du TUE attribue communément le but de servir la réalisation des objectifs de politiques extérieures de l’Union, avant de questionner les facteurs à même d’affaiblir l’atteinte de ces objectifs par la coercition économique. La réponse à cette dernière interrogation se trouve à la lumière du droit européen et du droit africain, dans les éléments assurant la légitimité de la diffusion tels objectifs au-delà des frontières européennes, par la voie coercitive.Enfin, nous mettrons en lumière le Smart power européen, découlant des évolutions apportées par l’Union, depuis le début des années 2000, à ses outils de hard power et de soft power, nous indiquant, d’une part, le besoin de l’Union de répondre aux nouveaux défis soulevés par les modifications géopolitiques, et d’autre part, un abandon du « complexe européen de puissance », porteur de la volonté de s’affirmer comme un acteur international à part entière.