Thèse soutenue

Religion et hérésies dans la pensée d'Antonio Gramsci

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Auteur / Autrice : Marie Lucas
Direction : Romain Descendre
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Philosophie, épistémologie. Etudes italiennes
Date : Soutenance le 22/09/2023
Etablissement(s) : Lyon, École normale supérieure
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de philosophie (Lyon ; Grenoble ; 2007-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Triangle : Action, Discours, Pensée politique et économique (Lyon ; 2005-....)
Jury : Président / Présidente : Jean-Claude Zancarini
Examinateurs / Examinatrices : Romain Descendre, Jean-Claude Zancarini, Fabio Frosini, Laura Pettinaroli, Pierre Girard, Francesca Izzo, Philippe Büttgen
Rapporteurs / Rapporteuses : Fabio Frosini, Laura Pettinaroli

Mots clés

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Résumé

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Cette thèse aborde la réflexion de Gramsci sur la religion et les hérésies, à partir d’une étude historico-critique de ses sources et des débats où elle s’inscrit, depuis son arrivée à Turin (1911) jusqu’à ses dernières notes de prison (1935). Elle suit la confrontation du socialisme gramscien avec l’histoire des religions, dans le cadre d’une élaboration collective et militante au sein des revues et du parti, jusqu’à l’arrestation (1926). Le rejet de l’athéisme militant distingue par la suite la direction gramscienne du Parti communiste d’Italie. La collaboration du Parti avec des catholiques antifascistes dans les années 1920, en particulier avec Guido Miglioli, ouvre des débats sur la dissidence politique comme hérésie et incite à considérer à nouveaux frais l’histoire des rapports entre communistes et catholiques en Italie. En prison, Gramsci rend compte, au lendemain du Concordat de 1929, d’une « capitulation de l’État moderne » devant l’Église, dont les jésuites seraient les artisans, suivant la doctrine du « pouvoir indirect » de Bellarmin. La confrontation de Gramsci avec les encycliques de Pie XI et les développements de la « pensée sociale » catholique stimule l’élaboration des catégories théorico-politiques des Cahiers de prison. En effet, les concepts gramsciens d’État et d’hégémonie font contre-point aux catégories politiques du magistère catholique du début des années 1930. Devant ce qu’il interprète comme une nouvelle Contre-Réforme favorisée par les accords du Latran, Gramsci développe une conception positive de la religion, sur le modèle de la Réforme protestante, en discussion avec Croce et Weber, et avec la politique économique en Union soviétique. La lecture gramscienne de Marx nourrit alors une conception originale de la croyance collective comme force de transformation historique et du marxisme comme religion immanente et anti-dogmatique. Ayant établi le modèle jacobin français de laïcité comme une hérésie libérale du christianisme, Gramsci cherche à inscrire sa philosophie de la praxis dans une histoire italienne des hérésies, depuis les ferments médiévaux jusqu’à la crise moderniste, aspirant cependant à devenir une « religion supérieure ». L’analogie critique entre christianisme et marxisme permet ainsi d’explorer la tension dialectique entre totalité accomplie et fraction contestataire.