Le capitalisme autonarratif : production, réception et valorisation du récit de soi sur Twitch
Auteur / Autrice : | Nathan Ferret |
Direction : | Arnaud Esquerre |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sociologie |
Date : | Soutenance le 07/07/2023 |
Etablissement(s) : | Paris, EHESS |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales |
Jury : | Président / Présidente : Jeanne Lazarus |
Examinateurs / Examinatrices : Jeanne Lazarus, Élisabeth Belmas, Sylvain Parasie, Valérie Beaudouin, Johann Michel | |
Rapporteur / Rapporteuse : Élisabeth Belmas, Sylvain Parasie |
Mots clés
Résumé
En plein essor depuis une décennie, les plateformes de (live-)streaming forment un foyer de pratiques sociales exemplaires des mutations du lien social, des constructions médiatiques de soi, des modes de consommation culturelle et des nouveaux modèles économiques qu’engage le capitalisme digital contemporain. En analysant la pratique des streamers et leur carrière à la plateformisation de soi sur Twitch, les usages quotidiens de leurs viewers, la structuration sociodémographique du réseau de ces usagers, la construction des communautés virtuelles rassemblées sous la figure des vidéastes et l’économie non-marchande auxquels l’activité donne lieu, cette thèse dresse un panorama de la scène française de la plateforme et étudie son fonctionnement socio-économique original. Au travers d’une double approche qualitative (ethnographie virtuelle, ethnographie physique, entretiens) et quantitative (analyse de deux bases de données constituées pour la recherche), elle montre comment les streamers diffusent, sous la forme de streams, des récits d’eux-mêmes numériques, multimodaux, interactifs, spéculaires et partagés, configurant le sens des manières d’agir et de réagir en ligne en sens autonarratif et supportant un lien social personnifié par cette activité auto-expressive. L’encastrement des transferts numériques d’argent dans ces récits de soi configure alors le don un acte narratif, permettant une exploitation monétaire des identités narratives et d’une accumulation par don sur la plateforme. Le jeu vidéo s’y intègre comme facteur de production de soi, ouvert à l’analyse de la reconduction des différences socialement situées de s’exposer et de se raconter par le jeu sur internet en différences économiques. Au croisement de la sociologie des pratiques culturelles et des sociabilités en ligne, de la sociologie économique et de la sociologie du récit de soi, la thèse dégage ainsi le double mouvement duquel le streaming tire sa particularité et son intérêt épistémologique : celui de l’économicisation des pratiques autonarratives et de la narrativisation des pratiques économiques, identifiant un capitalisme autonarratif.