Thèse soutenue

Entre déférence et activisme : la CEDH, Cour des Etats ou Cour des Droits ? Explorer les outils d'interprétation de la CEDH

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Auteur / Autrice : Francesca Pirola
Direction : Anne-Sophie Millet-DevalleStefania Ninatti
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Droit
Date : Soutenance le 15/06/2023
Etablissement(s) : Université Côte d'Azur en cotutelle avec Università degli studi di Milano - Bicocca
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Droit et sciences politiques, économiques et de gestion (Nice, Alpes-Maritimes ; 2008-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire de droit international et européen (Nice) - LADIE
Jury : Président / Présidente : Antonello Tancredi
Examinateurs / Examinatrices : Anne-Sophie Millet-Devalle, Stefania Ninatti, Antonello Tancredi, Maria Elena Gennusa, Jules Lepoutre, Alessia Ottavia Cozzi
Rapporteurs / Rapporteuses : Maria Elena Gennusa, Jules Lepoutre

Résumé

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Une lecture exhaustive de la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l'Homme révèle l'existence d'un certain nombre de particularités concernant cette Cour dans le domaine du droit international. L'objectif de cette recherche est donc de comprendre en quoi consistent ces particularités. Plus précisément, le travail cherche à répondre aux questions relatives à leur nature et, d'autre part, à leurs implications systémiques. Sur le plan méthodologique, le thème de l'interprétation sera le paradigme qui permettra d'aborder les questions susmentionnées. Dans le contexte spécifique du droit conventionnel, en effet, l'étude des règles herméneutiques développées et affinées par l'organe judiciaire du système de sauvegarde régional établi par la Convention Européenne est d'un grand intérêt : son extraordinaire activité herméneutique a non seulement eu un impact politique considérable sur la vie de millions de personnes dans quarante-six pays différents, mais elle a également contribué à la mise en place d'un système avancé et efficace de protection des droits de l'homme et a eu des répercussions transformatrices sur les systèmes juridiques nationaux, à tel point qu'aujourd'hui elle ne représente plus quelque chose de structurellement étranger au travail effectué par les interprètes nationaux, et dont la pertinence n'est pas strictement confinée au niveau international. Dans ce contexte, le présent travail vise à mettre en lumière les problèmes spécifiques que l'interprétation de la Convention est appelée à résoudre et qui, par conséquent, distinguent cette opération de l'exercice herméneutique portant sur un traité international classique. L'encadrement exact de la Convention est donc central pour comprendre toute la complexité de l'activité interprétative que la Cour européenne des droits de l'homme est appelée à exercer. En effet, le résultat de cette activité dépend précisément de l'effort de définition de ces "particularités" qui déterminent la spécificité du texte de la Convention dans le domaine du droit international et qui expliquent le large degré de discrétion judiciaire dont dispose l'interprète. Une fois ces notions acquises, le travail se poursuit par l'examen de la méthodologie herméneutique spécifique développée par la Cour et caractérisée par une tendance à osciller entre deux pôles opposés, à savoir la déférence et l'activisme ; l'objectif, en particulier, est d'encadrer certains des principaux outils herméneutiques utilisés par la Cour de Strasbourg dans une politique opérationnelle unitaire, cohérente et rationnelle qui puisse leur donner un sens et une justification solide. L'examen de l'"écosystème juridique et social" dans lequel la Cour opère vise donc à montrer quels sont les facteurs qui conduisent à une plus grande déférence à l'égard des États ou, au contraire, à une approche évolutive qui élargit la portée des droits de l'homme. Enfin, le travail cherche à évaluer la réponse nationale à la méthodologie innovante de la Cour mentionnée ci-dessus, en se référant en particulier à ce que l'on appelle le processus d'Interlaken ; il s'agit d'une série de conférences ministérielles convoquées depuis 2010 pour accroître l'efficacité de la Cour européenne et assurer son fonctionnement à l'avenir, et dans le contexte duquel l'autorité interprétative de Strasbourg a été remise en question par une série de déclarations politiques qui ont exprimé des critiques sévères et des propositions de changements structurels. L'analyse des aspects les plus critiques et des zones d'ombre de ce processus de réforme est d'ailleurs un préalable nécessaire pour comprendre l'incroyable travail de la Cour pour sortir victorieuse d'un climat hostile et défavorable. En effet, une évaluation approfondie de certaines prises de position récentes et de certains avis consultatifs émis en application du Protocole 16 montre la tendance générale de la Cour à interpréter sa fonction - et donc sa nature - de manière créative.