Utilisation des habitats estuariens par l'esturgeon européen (Acipenser sturio) dans un contexte de restauration des populations : étude des facteurs abiotiques, biotiques et apport des modèles hydrodynamiques
Auteur / Autrice : | Marie Lamour |
Direction : | Eric Rochard |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Écologie évolutive, fonctionnelle et des communautés |
Date : | Soutenance le 19/12/2023 |
Etablissement(s) : | Bordeaux |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences et Environnements (Talence, Gironde ; 1999-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Ecosystèmes aquatiques et changements globaux (Bordeaux) |
Jury : | Président / Présidente : Xavier de Montaudouin |
Examinateurs / Examinatrices : Céline Artero | |
Rapporteur / Rapporteuse : Jean-Marc Roussel, Nathalie Machon, Adrian Jordaan |
Mots clés
Résumé
L’esturgeon européen (Acipenser sturio) est une espèce migratrice anadrome abondante dans les fleuves d’Europe avant le 20ème siècle. Suite au fort déclin de ses populations, l’espèce est classée en danger critique d’extinction, et fait aujourd’hui l’objet de deux programmes de restauration, en France et en Allemagne. Suite à des actions de repeuplement, il existe actuellement deux populations soutenues : une dans la Gironde (France) et la seconde dans l’Elbe (Allemagne). Entre 2007 et 2015 plus d’1,7 millions d’individus ont été relâchés dans le bassin Gironde-Garonne-Dordogne et 20 000 individus ont été relâchés dans le bassin de l’Elbe. En Gironde, la population est suivie régulièrement notamment grâce à des campagnes de pêche scientifique dans l’estuaire. L’estuaire constitue un habitat essentiel au cours de la vie de A. sturio, c’est un couloir de migration pour les juvéniles et les géniteurs, et c’est également un habitat de croissance dans lequel il peut résider plusieurs années en tant que juvénile avant de migrer en mer. Au cours de sa croissance en mer, étant donné son caractère côtier, il peut également continuer à faire des incursions en milieux estuariens, que ce soit pour y trouver un refuge (conditions environnementales favorables) ou des proies. Cependant, les facteurs environnementaux impliqués dans la sélection des habitats au sein du milieu estuarien ne sont pas encore bien identifiés. Cette étude a pour but d’identifier l’influence des facteurs abiotiques et biotiques sur la répartition spatio-temporelle de A. sturio dans l’estuaire de la Gironde. En se basant sur l’écologie de l’espèce, les individus ont été divisés en deux groupes selon une taille/âge seuil (68cm de longueur à la fourche, qui correspond à 3 ans environ). Au-delà de ce seuil, la majorité des individus peuvent effectuer des allers-retours avec le milieu marin ; avant ce seuil, la majorité des individus vivent dans l’estuaire. Une analyse spatiale combinant des données biologiques issues des campagnes d’échantillonnage à des données environnementales simulées par un modèle hydrodynamique (MARS3D) a permis de mettre en évidence une différence de sélection d’habitats entre ces deux groupes à l’échelle saisonnière, dans l’estuaire de la Gironde. Les variables environnementales testées, i.e. la température, la salinité, la hauteur de colonne d’eau, la concentration en matière en suspension et la vitesse de courant, expliquent à plus de 76% la répartition saisonnière de A. sturio. Ces résultats ont permis de localiser les habitats potentiellement favorables dans les estuaires de la Gironde (au-delà de la zone d’échantillonnage), de la Loire, de la Seine et de l’Elbe grâce à des modèles hydrodynamiques similaires à celui utilisé en Gironde. Des habitats potentiellement favorables ont été identifiés dans les quatre estuaires, en quantité et distribution variables selon les saisons. Les estuaires de la Seine et de la Loire peuvent être favorables en terme de conditions abiotiques en été, principalement près de l'embouchure des estuaires. Dans l’estuaire de l’Elbe, des habitats potentiellement favorables ont été identifiés pour les individus VI < 68cm principalement au printemps et en hiver, alors qu’en automne et en été les surfaces étaient très restreintes. Des habitats potentiellement favorables ont été également identifiés pour les individus ≥ 68cm à toutes les saisons, mais principalement en été. Enfin, pour explorer l’influence des facteurs biotiques, un étude plus spécifique sur la consommation des proies par A. sturio en Gironde a été réalisée. Les résultats mettent en évidence que la sélection d’habitat serait également influencée par la présence de proies principalement en automne.