Les mondes étudiants au défi de la polarisation des sociétés. Étude comparée de la différence ethnoculturelle des étudiants en mobilité internationale à l’Université de Bordeaux (France) et à l’Université Laval (Québec)
Auteur / Autrice : | Hachem Benissa |
Direction : | Fabien Sabatier, Jean-Philippe Perreault |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences et techniques des activités physiques et sportives et sciences des religions |
Date : | Soutenance le 14/12/2023 |
Etablissement(s) : | Bordeaux en cotutelle avec Université Laval (Québec, Canada) |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sociétés, politique, santé publique (Talence, Gironde ; 2011-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire cultures, éducation, sociétés (Bordeaux) |
Jury : | Président / Présidente : Charles Fleury |
Examinateurs / Examinatrices : Fabien Sabatier, Rania Hanafi | |
Rapporteur / Rapporteuse : Marie-Carmen Garcia, Nicolas Bancel |
Résumé
Le vaste mouvement de massification des universités et d'internationalisation du recrutement de leurs publics fait, de nos jours, des mondes étudiants des communautés marquées par le pluralisme ethnoculturel. Cette recomposition interne s'établit, en outre, dans un contexte marqué par une polarisation des sociétés fondée sur l'identité culturelle. Cette situation interpelle au premier chef les universités qui présentent une longue tradition de négligence en matière de gestion ouverte de la différence ethnoculturelle. Cette thèse entend, par l'usage d'une méthodologie mixte, analyser l’expérience de la différence ethnoculturelle vécue par les étudiants étrangers en mobilité individuelle, réalisant leur cursus universitaire à l’Université de Bordeaux (France) et à l’Université Laval (Québec) (2020-2023). Elle ambitionne également d’analyser les politiques universitaires de gestion de la diversité dans une double perspective, émique et étique. À l’aide d’une approche constructiviste, nous cherchons à étudier les processus d'exo-catégorisation conduisant au sentiment de discrimination chez le minoritaire (frontière en soi) et d'endo-catégorisation susceptibles de motiver un engagement dans des réseaux communautaires (frontière pour soi). Notre étude fait recours principalement au concept de frontière qui permet d’appréhender l’expérience des étudiants étrangers en situation de minoration, articulée aux problématiques d’enracinement et de reconnaissance dans les domaines corporel, linguistique et religieux. Les données de cette recherche sont constituées de 2 824 réponses à un questionnaire qui a été diffusé auprès des populations étudiantes dans les deux universités et de 82 entretiens réalisés avec des étudiants (59) et des responsables universitaires (23), ainsi que des données secondaires recueillies à l’aide d’un relevé de traces, d’une observation directe et indirecte et d’une analyse des documents institutionnels (plans d’action, rapports, sites numériques, etc.). Les résultats de notre recherche révèlent le taux du sentiment de discrimination fondé sur des marqueurs d’origine ethnique des étudiants et démontrent les mécanismes et les effets liés au traitement inégalitaire dans le milieu universitaire en particulier et dans la société en général. Paradoxalement, l’expérience de minoration peut conduire un nombre important d’étudiants à s’engager dans des réseaux communautaires. On assiste dès lors à l’émergence d’une solidarité collective, accentuée en l’absence d’une politique universitaire structurée d’accueil, d’accompagnement et d’inclusion, notamment pour le cas français. Les réseaux communautaires imposent une réflexion profonde sur l’usage de la culture d’origine et de la croyance religieuse comme leviers de socialisation, d’enracinement et de promotion des particularismes dans la société d’accueil. Ces réseaux deviennent ainsi un lieu d’affirmation identitaire et participent à l’établissement, au renfoncement ou à l’affaiblissement des frontières ethnoculturelles dans les mondes étudiants.