Nutrition, mode de vie et prévention du vieillissement cérébral : caractérisation de combinaisons, mécanismes et groupes à risque au moyen de l’épidémiologie moléculaire
Auteur / Autrice : | Jeanne Neuffer |
Direction : | Cécilia Samieri |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Santé publique Option Epidémiologie |
Date : | Soutenance le 06/11/2023 |
Etablissement(s) : | Bordeaux |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sociétés, politique, santé publique (Talence, Gironde ; 2011-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Bordeaux population Health |
Jury : | Président / Présidente : Cédric Galéra |
Examinateurs / Examinatrices : Karen Leffondré, Claudine Berr | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Marie-Claude Vohl, Nicola Coley |
Mots clés
Résumé
La démence est la première pathologie associée au vieillissement cognitif. Il s’agit d’un syndrome d’étiologie complexe résultant de facteurs génétiques et environnementaux. Les facteurs de mode de vie, notamment la nutrition, ont montré des associations robustes avec le vieillissement cognitif dans les études d’observation, d’autant plus lorsqu’ils étaient considérés en combinaison (profils alimentaires ou de nutriments, profils de mode de vie plus généralement). Pour autant, les études d’intervention testant une supplémentation en nutriments, une modification du comportement alimentaire, ou intégrant plus généralement d’autres domaines du mode de vie, ont jusqu’à présent été décevantes. Une des raisons potentielles à l’échec relatif de ces études est une incapacité à considérer des cibles en combinaison (dans le domaine de la nutrition notamment) ou une mauvaise spécification des combinaisons optimales (en prévention dite « multi-domaine »). De plus, souvent, les populations les plus susceptibles de bénéficier de l’intervention n’ont pas été caractérisées et le concept de prévention « universelle » reste la référence. L’objectif général de cette thèse était de mettre à profit de riches données d’épidémiologie observationnelle, notamment moléculaires, pour affiner la caractérisation de stratégies préventives des pathologies du vieillissement cérébral par la nutrition et le mode de vie. Les données proviennent de l’étude des 3 Cités (3C), une grande cohorte multicentrique en population générale âgée. Un premier axe de recherche avait pour objectif d’identifier des combinaisons nutritionnelles optimales pour la prévention. Nous avons d’abord ciblé les 3 familles de nutriments les plus prometteuses pour la prévention sur la base des connaissances antérieures (acides gras polyinsaturés oméga-3, caroténoïdes totaux et vitamine D) et élaboré un indice de statut biologique multi-micro-nutritionnel intégrant les niveaux circulants de leurs biomarqueurs, associé au risque de démence. Cet indice pourrait permettre, en pratique, d’identifier et de prendre en charge en prévention les individus avec une déficience nutritionnelle qui sont à risque de développer une démence. Nous avons ensuite ciblé une un profil alimentaire préventif de la démence développée par la communauté scientifique, le profil MIND, et recherché une signature dans le métabolome alimentaire de l’adhésion à ce profil. Dans un deuxième axe de recherche, nous avons exploré de nouvelles cibles préventives en décryptant les mécanismes reliant la nutrition au vieillissement cérébral, avec un intérêt particulier pour l’axe intestin-cerveau. Parmi 72 métabolites dérivés du microbiote intestinal, seul l’acide propionique était significativement associé au déclin cognitif, avec réplication dans un échantillon indépendant. Il s’agit d’un acide gras à chaine courte produit par le microbiote à partir des fibres alimentaires mais qui est également utilisé comme conservateur alimentaire, et sa relation délétère au vieillissement cognitif nécessite de plus amples explorations. Enfin, dans un dernier axe, nous avons interrogé l’existence de potentiels groupes à vulnérabilité spécifique qui pourraient étayer l’implémentation d’une prévention de précision dans le vieillissement cognitif. Nous avons choisi ici d’élargir aux facteurs de mode de vie dans leur ensemble en ciblant un score combinant 12 facteurs modifiables validé dans la littérature, le LIBRA (Lifestyle for Brain health risk score), et montré que le LIBRA était associé au risque de démence et au déclin cognitif, quel que soit le niveau de susceptibilité génétique des individus (reflétée par l’allèle APOE4 et un score de risque génétique). Ce dernier travail suggère que la prévention par une modification du mode de vie pourrait être efficace chez tous, y compris chez les individus dont le profil génétique prédispose à développer une démence, ce qui constitue certainement un message encourageant pour ces personnes.