Thèse soutenue

De l'os brûlé en contexte archéologique à l'identification médico-légale : apports méthodologiques

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Auteur / Autrice : Anaïs Du Fayet de La Tour
Direction : Christine CoutureFrançois Paraf
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Anthropologie biologique
Date : Soutenance le 09/10/2023
Etablissement(s) : Bordeaux
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences et Environnements (Talence, Gironde ; 1999-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : De la Préhistoire à l'Actuel : Culture, Environnement et Anthropologie (Talence)
Jury : Président / Présidente : Norbert Telmon
Examinateurs / Examinatrices : Stéphane Rottier
Rapporteurs / Rapporteuses : Cristina Cattaneo, Laurent Martrille

Résumé

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Dans les sociétés anciennes ou modernes, le feu et la mort sont souvent associés. Le feu peut être lié à la cause ou au mécanisme du décès (contexte accidentel, suicidaire, criminel), il est aussi au centre de nombreuses pratiques funéraires ou rituels de purifications post-mortem. Son action destructrice est souvent mise en avant, cependant il existe un fait essentiel : le feu ne fait pas disparaître un corps ! Même dans les cas de carbonisations extrêmes, il persiste toujours des fragments osseux. Lorsqu’une autopsie classique n’est plus envisageable, toute l’attention doit se porter sur l’analyse de ces fragments persistants. Au cours du processus de combustion, l’os est le siège de multiples transformations, qui rendent son analyse complexe. Malgré une littérature riche à ce sujet, il n’existe pas en France de réel consensus méthodologique permettant d’aborder la question des corps carbonisés en contexte médico-légal. Nous constatons une certaine négligence à l’égard des restes brûlés et fragmentés. Les enquêteurs rarement formés à ce type de découverte, ne savent pas comment les aborder et les médecins légistes, parfois sont aussi démunis. Les levées de squelettes sont négligées et seuls les fragments de grandes dimensions, paraissant les plus « nobles » sont prélevés pour l’analyse. L’objectif principal de cette étude est de replacer le fragment osseux au centre de l’analyse. Nous souhaitons montrer l’absence de corrélation entre la taille d’un fragment et la quantité d’informations qu’il porte. Par conséquent, un prélèvement exhaustif sur le terrain est indispensable pour une analyse fiable. Nous avons choisi de travailler sur un échantillon d’origine archéologique. Ce choix était motivé par la disponibilité d’un large échantillon de données homogènes et fiables. Il permettait également de s’affranchir des contraintes éthiques et juridiques inhérentes à toute étude sur les restes humains. Après s’être assuré de la comparabilité du matériel, nous avons inclus les données correspondant à 263 structures funéraires ou assemblages osseux ayant livré des restes humains brûlés. Ces données provenaient de la fouille et de l’analyse de trois nécropoles d’époque romaine en Italie (Porta Nocera à Pompéi, Porta Mediana à Cumes et Santa Rosa au Vatican) ainsi que le tophet de Salammbô à Carthage (Tunisie). Nous avons pris en compte dans cette analyse 277509 fragments d’os brûlés pour une masse totale de 258022,9 g. La question de l’identification a été traitée dans sa globalité, depuis la détermination anatomique des fragments osseux, jusqu’à l’identification biologique de l’individu. Nous avons également intégré une dimension spatiale à l’analyse des données, afin d’évaluer la plus-value d’un enregistrement sur le terrain. Nous avons ainsi pu mettre en évidence une série de fragments d’intérêts, à analyser préférentiellement, pour répondre à diverses questions telles que le dénombrement des individus, ou la mise en évidence des principaux critères d’identification biologique. Les fragments porteurs de la plus grande quantité d’informations, contrairement à ce que l’on aurait pu attendre, ne sont pas les plus volumineux ou ceux ramassés par les enquêteurs de manière générale. Par ailleurs, nous avons démontré l’importance d’un enregistrement exhaustif des données dès le terrain. L’analyse spatiale et la recherche des liaisons anatomiques permettent une meilleure compréhension des faits et de leur chronologie. Cette dimension est capitale en médecine légale particulièrement en contexte criminel, dans l’analyse de scènes à cadavres multiples ou les tentatives de dissimulation par dissémination. Enfin, à partir de l’ensemble des résultats obtenus, nous avons généré deux fiches méthodologiques simplifiées, destinées aux enquêteurs et aux médecins légistes pour donner un cadre au prélèvement, à l’enregistrement des données sur le terrain et à l’analyse des os brûlés.