Vers une compréhension de l’hétérogénéité clinique des personnes en phase d’euthymie d’un trouble bipolaire : interrelation entre la personne en processus de rétablissement et son contexte familial
Auteur / Autrice : | Caroline Munuera |
Direction : | Katia M'Bailara |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Psychologie |
Date : | Soutenance le 12/07/2023 |
Etablissement(s) : | Bordeaux |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sociétés, politique, santé publique (Talence, Gironde ; 2011-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire de psychologie (Bordeaux) |
Jury : | Président / Présidente : Antoinette Prouteau |
Examinateurs / Examinatrices : Raoul Belzeaux | |
Rapporteur / Rapporteuse : Luisa Weiner Huber Mendes, Nicolas Favez |
Mots clés
Résumé
Les troubles bipolaires sont des troubles mentaux chroniques définis par l'alternance d’épisodes de (hypo-)manies et d’épisodes dépressifs, entrecoupés de périodes d’euthymie supposées être indemnes de troubles thymiques. Les troubles bipolaires constituent un enjeu de santé publique majeur : ils sont comptés parmi les troubles mentaux sévères en raison de leur sévérité symptomatique, leur létalité, leur chronicité ou encore leur impact sur le fonctionnement des personnes en vie quotidienne. De plus, même durant la phase d’euthymie, les personnes ne sont pas toutes en rémission symptomatique (absence de symptômes maniaques ou dépressifs) et en rémission fonctionnelle (absence d’altération dans le fonctionnement en vie quotidienne) : pour certaines personnes, l’euthymie peut être une phase de rémission, pour d’autres elle ne l’est pas. Il existe ainsi une forte variabilité interindividuelle chez les personnes durant l’euthymie. Pourtant malgré les enjeux de santé majeurs relatifs à la présence de symptômes et à l’altération fonctionnelle, cette hétérogénéité clinique n'est pas comprise scientifiquement et est encore trop peu prise en compte en pratique courante. L’objectif général de ce travail de thèse est alors de mieux décrire et comprendre l’hétérogénéité des vécus afin de soutenir des accompagnements personnalisés durant la phase d’euthymie. Pour ce fait, nous proposons de changer de paradigme pour une meilleure conceptualisation des personnes en phase d’euthymie d’un trouble bipolaire, au travers d’une approche systémique centrée sur les personnes en contexte familial. Cette thèse sur publications est constituée de 10 productions scientifiques dont sept articles et trois posters. Au travers de ces productions, nous avons répondu à l’objectif général en considérant (1) la personne en phase d’euthymie comme un système complexe dont les dimensions sont en interaction : les dimensions considérées sont la rémission globale (symptomatique et fonctionnelle) et le rétablissement personnel, (2) l’interaction entre la personne et son contexte familial : la façon dont la personne s’est construite en contexte (schémas précoces inadaptés) et la façon dont le contexte dans lequel elle est comprise interagit (fonctionnement familial), (3) les perceptions des autres membres de la famille, en particulier le conjoint. Grâce à différentes méthodes (revues systématiques de la littérature, méthodes descriptives, corrélationnelles, en profils et quasi-expérimentale, étude de validation psychométrique), nous avons montré que l’interaction entre les personnes et leur contexte permet de mieux comprendre l’hétérogénéité clinique en phase d’euthymie. En effet, nos résultats indiquent que les schémas précoces inadaptés permettent de discriminer différents profils de rémission globale. De plus, la rémission n’étant pas synonyme de rétablissement, il existe différents profils de relation entre ces concepts, traduisant différents profils de vécus en phase d’euthymie. Les résultats suggèrent alors que le fonctionnement familial est en miroir de ces différents vécus. Enfin, nos résultats soutiennent l’importance de s’attarder sur d’autres membres de la famille puisqu’ils montrent que les conjoints ont aussi des perceptions défavorables du trouble et de leur fonctionnement familial, ainsi qu’un ajustement émotionnel atypique à leur partenaire ayant le trouble. Enfin, ce travail de thèse discute des enjeux relatifs à la prise en compte de deux indicateurs incontournables en pratique clinique et en recherche en contexte de trouble bipolaire : le rétablissement personnel et le contexte familial. Nos travaux fournissent des éléments empiriques sur lesquels les cliniciens peuvent s’appuyer dans une démarche de pratique basée sur la preuve pour transformer leur accompagnement vers une meilleure prise en compte de la personne en processus de rétablissement et de sa famille. Une ouverture sur le concept de rétablissement familial est finalement proposée.