Imaginaires arborés, attentes contrariées et pratiques de la marge : géographie sociale et historique du Robinia pseudoacacia dans le Sud-Ouest de la France

Arboreal imaginaries, thwarted expectations and practices of the margin : social and historical geography of Robinia pseudoacacia in southwest France

• Auteur / Autrice : Zoé Ginter
• Direction : Laurent Couderchet
• Type : Thèse de doctorat
• Discipline(s) : Geographie
• Date : Soutenance le 05/01/2023
• Etablissement(s) : Bordeaux 3
• Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Montaigne-Humanités (Pessac, Gironde ; 2007-....)
• Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Passages (Pessac, Gironde ; Pau ; Talence, Gironde)
• Jury : Président / Présidente : Samuel Depraz
• Jury : Examinateurs / Examinatrices : Laurent Couderchet, Jean-Louis Yengué, Christine Bouisset, Amélie Robert, Christian A. Kull, Baptiste Hautdidier
• Jury : Rapporteur / Rapporteuse : Jean-Louis Yengué, Christine Bouisset

Mots clés

Mots clés contrôlés

Plantes ligneuses

Histoire environnementale

Géographie de l'environnement

France (sud-ouest)

Robinier

Mots clés libres

Robinier

Marge

Norme

Forêt

Arbre

Exotique

Géographie sociale et historique

Histoire environnementale

Black locust

Margin

Norm

Forest

Tree

Exotic

Social and historical geography

Environmental history

Résumé

Cette thèse interroge la pertinence du concept de marge (et des dynamiques afférentes) pour penser les objets non-humains, à travers l’exemple du Robinia pseudoacacia dans le Sud-Ouest de la France. La trajectoire de cet arbre s’y révèle singulière à divers égards : introduit de l’Amérique du Nord comme objet d’ornement au XVIIe siècle, « l’acacia » (dans son usage vernaculaire) a connu plusieurs moments d’exhortation et d’oubli relatif, tout en maintenant, dans le bordelais, une relation particulière avec le vignoble. Partout et nulle part à la fois, paysanne et forestière, sauvage et cultivée, valorisée et invisible, l’espèce suscite des questionnements hétéroclites. Pour y répondre, la recherche s’appuie sur les champs disciplinaires de la géographie sociale et culturelle de l’environnement et de l’histoire environnementale, mobilisant matériaux d’archives, cartographies et enquêtes qualitatives. La première partie de la thèse précise le concept de marge ainsi que ses multiples appropriations par les sciences sociales, afin de proposer des pistes de lecture pour analyser nos relations avec les objets non-humains, tout particulièrement le végétal ligneux. La deuxième partie propose une lecture croisée des trajectoires de l’espèce à différentes échelles à partir d’un corpus de sources historiques (XVIIe – XXe), démontrant à la fois la labilité de la marge dans le temps et dans l’espace et son caractère relationnel. La dernière partie analyse, quant à elle, ce qui fait la singularité de l’arbre, aussi bien dans sa matérialité que dans l’appropriation dont elle est l’objet. De ces récits croisés émerge le constat convergent que ce qui fait ici la marge nait d’une triple résistance : aux normes, aux processus de catégorisation et aux changements d’échelle. Si la marge offre des repères heuristiques pour qualifier des dynamiques sociales et écologiques sur lesquelles le cas « robinier » offre une prise, les trajectoires ainsi décrites permettent en retour de penser les natures de ce qui fait la marge et de ce que la marge fait. Nous montrons ainsi la nature des antagonismes des manières de se représenter et de s’approprier l’espèce et les espaces qu’elle occupe De ces effets de marges naissent des agencements socionaturels qui témoignent de la diversité des manières de faire ou de laisser faire avec l’arbre. Finalement, les récits construits autour de ces pratiques de la marge sont à même de fournir un éclairage original sur les économies politiques des espaces boisés, la façon dont ils sont imaginés et appropriés dans le temps.

This Phd thesis questions the relevancy of the concept of margin (and its related dynamics) to reflect on non-human objects, through the case study of Robinia pseudoacacia in southwestern France. This ligneous species proves to be singular in several respects. Introduced from North America as an ornamental object in the 17th century, the acacia (in its vernacular name) has gone through several moments of exhortation and relative oblivion, while maintaining, in the Bordeaux region, a peculiar relationship with the vineyard. Everywhere and nowhere at the same time, peasant and forest, wild and cultivated, valued and invisible, the species raises motley questions. To provide answers, the research draws on theoretical contributions of social and cultural geography of the environment and environmental history, relying on archives, cartographies and qualitative surveys. The first part clarifies the concept of margin as well as its multiple appropriations by social sciences, in order to suggest leads to analyse our relations with non-human, and in particular woody plants. The second part proposes a cross-reading of the species trajectories at different scales from a corpus of historical documents of various natures (XVIIth - XXth), to highlight both the lability of the margin in time and space and its relational character. The last part investigates what makes the singularity of the tree in its materiality and in the appropriation of which it is the object. From these intersecting narratives, we demonstrate that the margin is born out of resistance to norms, to processes of categorization and to changes of scale. But if the margin offers heuristic cues to qualify the social and ecological dynamics on which the black locust offers a grip, the trajectories of the latter allow us in turn to specify the nature of what makes the margin but also what the margin does. We thus display the contradictions and paradoxes of the ways of representing and appropriating the species and the spaces it occupies. From these effects of the margins, the produced socionatural arrangements reveal the diversity of ways of doing or letting do with the tree. Finally, this retelling of black locust trajectories across practice of the margin shed original light on the political economies of wooded spaces, the way they are envisioned and appropriated over time.