Thèse soutenue

La formation de l'avicennisme iranien et l'oeuvre de Nasîr al-dîn al-Tûsî : étude du commentaire de al-Ishârât wa l-tanbîhât

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Auteur / Autrice : Maxime Delpierre
Direction : Christian Jambet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Etudes arabes et civilisation du monde musulman
Date : Soutenance le 07/06/2022
Etablissement(s) : Université Paris sciences et lettres
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École pratique des hautes études (Paris)
Partenaire(s) de recherche : Établissement de préparation de la thèse : École pratique des hautes études (Paris ; 1868-....)
Laboratoire : LEM Laboratoire d’études sur les Monothéismes (Paris ; 1998-....)
Jury : Président / Présidente : Mohammad Ali Amir-Moezzi
Examinateurs / Examinatrices : Christian Jambet, Meryem Sebti, Olga Lucia Lizzini
Rapporteurs / Rapporteuses : Meryem Sebti, Olga Lucia Lizzini

Résumé

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Le Ḥall mushkilāt al-Ishārāt de Naṣīr al-Dīn al-Ṭūsī peut être considéré comme une œuvre fondamentale sous au moins trois rapports. D'abord, comme commentaire d'une œuvre singulière d'Ibn Sīnā, le Kitāb al-Ishārāt wa l-tanbīhāt, œuvre ésotérique qui est le produit d'une nouvelle orientation de la pensée de son auteur, au point qu'on a pu parler d'une philosophie « gnostique », voire « mystique », et qui marque un tournant pour la philosophie en islam en configurant une nouvelle « image de la pensée » comme ʿirfān. Ensuite, comme œuvre elle-même singulière au sein de la tradition interprétative de l'œuvre d'Avicenne, qui s'est constituée par la pratique du commentaire des Ishārāt, pour former une nouvelle figure de l'avicennisme qu'on a pu appeler « avicennisme iranien » en raison de son assimilation par certains courants philosophiques, théologiques et mystiques : les shīʿismes ismaélien et duodécimain, la philosophie « illuminative » et le soufisme akbarien. L'apport du commentaire de Ṭūsī à cette tradition peut être apprécié à la lumière de son double rapport à l'œuvre avicennienne d'une part et au grand commentaire de Fakhr al-dīn al-Rāzī d'autre part. En effet, l'héritage d'Avicenne est disputé et, à cet égard, la controverse avec Rāzī, auteur d'une synthèse théologico-philosophique originale que l'on peut considérer comme un « ashʿarisme avicennisant », est décisive. Le commentaire de Ṭūsī paraît fondamental enfin par sa place singulière au sein du corpus de ce philosophe shī‘ite qui a non seulement toujours défendu Avicenne contre ses adversaires, comme en témoigne son autre ouvrage polémique, Maṣāriʿ al-muṣāriʿ, mais conçu le projet d'une théologie rationnelle shīʿite sur des bases philosophiques, trouvant sa dernière expression dans le premier grand traité canonique de théologie dogmatique duodécimaine, Tajrīd al-iʿtiqād. Ce traité, par une fortune pareille à celle des Ishārāt, est destiné à devenir la vulgate de ce courant religieux. Derrière ses allégeances politiques et religieuses apparemment erratiques, notre auteur cherche à fonder un système organique dans lequel philosophie et religion sont dans une étroite dépendance réciproque, dans lequel avicennisme et shīʿisme se rencontrent pour se féconder l'un l'autre.