Régulation indépendante du marché de l'énergie

French Independant Body Regulatory and Single European Market Energie

• Auteur / Autrice : Philippe de Ladoucette
• Direction : Claudie Boiteau
• Type : Thèse de doctorat
• Discipline(s) : Droit
• Date : Soutenance le 16/09/2022
• Etablissement(s) : Université Paris sciences et lettres
• Ecole(s) doctorale(s) : Ecole doctorale SDOSE (Paris)
• Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherche droit Dauphine (Paris) - Centre de recherche Droit Dauphine / Cr2D
• Partenaire(s) de recherche : établissement opérateur d'inscription : Université Paris Dauphine-PSL (1968-....)
• Jury : Président / Présidente : Philippe Terneyre
• Jury : Examinateurs / Examinatrices : Claudie Boiteau, Philippe Terneyre, Aurore Laget-Annamayer, Gabriel Eckert, Antoine Louvaris, Patrice Geoffron
• Jury : Rapporteur / Rapporteuse : Aurore Laget-Annamayer, Gabriel Eckert

Mots clés

Mots clés contrôlés

Politique énergétique

Union européenne. Agence de coopération des régulateurs de l’énergie

Concurrence -- Droit européen

Mots clés libres

Régulation

Indépendance

Energie

Pouvoir décisoire

Acte administratif unilatéral

Droit souple

Commission européenne

ACER

CEER

Directives

Tarifs réglementés de vente

Tarif d’utilisation des réseaux publics de transport et de distribution

Commission de régulation de l’énergie

Independance

Regulation

CRE

European Directive

CEER

ACER

Soft law

Internal Energy Market

Regional initiatives

Résumé

Cette recherche est fondée sur l’hypothèse que les textes relatifs aux garanties organiques et fonctionnelles, s’ils sont nécessaires, se révèlent insuffisants à eux seuls pour assurer l’indépendance d’une autorité de régulation économique d’un secteur monopolistique. Traiter d'indépendance de la régulation de l'énergie, qui se traduit en fait par l'indépendance du régulateur, comporte une dimension particulière en raison du rôle de l'Etat français dans la politique de l'énergie. La CRE, créée par la loi du 11 février 2000, a poussé très loin la logique de l’indépendance en se référant aux directives européennes, quitte à se trouver en contradiction à une volonté politique plus ou moins explicite. A cet égard, les différentes atteintes aux principes mêmes de cette indépendance, pratiquées par l’exécutif ou le Parlement avec les diverses modifications de la composition du collège de la CRE, témoignent de la fragilité des seules garanties statutaires. L’indépendance s’établit au moyen d’une expertise économique. Il s’agit donc, en premier lieu, d’établir en quoi et comment la CRE construit cette expertise économique au travers des outils régulatoires à sa disposition en édictant des actes administratifs unilatéraux. Il s’agit, en second lieu, d’étudier selon quelles modalités la CRE parvient à s’inscrire dans une réalité et un équilibre institutionnel national et européen. Un essai de taxonomie apporte un éclairage utile sur la variété des actes de la CRE, même s’il est malaisé d’en définir une typologie précise car les actes qu’elle édicte évoluent au fil du temps. C’est le cas des tarifs d’utilisation des tarifs de réseaux pour lesquels la CRE dispose d’un pouvoir de proposition en ce qui concerne les trois premiers d’entre eux, alors que le 3ème paquet européen de l’énergie de 2009, une fois transposé dans le Code de l’énergie, octroie à la CRE un pouvoir décisoire. Dans le cas des tarifs réglementés de vente en électricité et en gaz naturel, on constate que son pouvoir consultatif évolue en pouvoir de proposition depuis la loi NOME de 2010 pour l’électricité, ou de vérification pour le gaz naturel. Parmi les actes édictés par la CRE, les délibérations portant communication se révèlent des outils régulatoires importants par l’usage du droit souple qui permet à la CRE d’aborder de nombreux sujets, soit par une interprétation de la loi, soit par des recommandations soit, enfin, en adoptant des positions, mêlant l’appréciatif à l’impératif, structurant le marché, mais qui induisent une activité contentieuse conséquente. Par ces exemples, la CRE démontre une expertise économique au service de l’ouverture du marché. L’ensemble de ces sujets fait l’objet d’une importante activité contentieuse qui, le plus souvent, conforte les approches de la CRE aux dépends d’une gestion politique de l’exécutif. Cependant, cette indépendance revendiquée et assumée appelle, en termes de légitimité, un contrôle démocratique. L’analyse des processus existants témoigne, à cet égard, d’importantes déficiences du contrôle parlementaire, symptôme d’un problème récurrent de l’évaluation des politiques publiques. Au niveau européen, le chemin parcouru, de la première directive de 1996 à celle de 2019, met en évidence les évolutions de la Commission sur la régulation de l’énergie. La CRE, fort impliquée dans l’action des régulateurs européens, défend une approche graduelle de la construction du marché intérieur, notamment au travers des initiatives régionales. Elle souhaite la création d’une agence de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER), tout en défendant son indépendance par rapport à la Commission européenne. Après quelques exercices, ce sujet devient un sujet de préoccupation pour le conseil des régulateurs qui estime que la Commission développe une trop forte emprise sur l’ACER. Cette question soulève celle de la faisabilité d’une authentique régulation supranationale, dont le 4ème paquet trace, en partie seulement, la voie.

Independent Regulation of Energy MarketOur starting hypothesis is that whereas a statutory framework is necessary, such a framework is not, by itself, sufficient to guarantee the independence of a regulatory body in a monopolistic area. Dealing with the independence of energy regulation means also dealing with the independence of the energy regulator, and this raises specific issues in France, given the importance of the governement in the energy policy field. Created by the February 11 2000 Law, CRE has pushed far the logic of independence by referring to European Directives, even if it meant contradicting a more or less explicit Government will. Actually, the different attempts against CRE’s independence, coming from the Government as well as from the Parliament through changes in the composition of its board, show how fragile statutory guarantees are. Independence is to be achieved through economic expertise. This leads us first to look at how CRE has built its economic expertise through an array of unilateral administrative acts. Then, we study how CRE is managing to insert itself within a national and European institutional balance. Taxonomy helps us understanding how diverse CRE decisions are, even if it is difficult to provide a precise typology, as the type of decisions CRE takes shifts over time. Such is the case when we consider tariffs for the utilization of transmission networks. Whereas CRE was only allowed to make rate propositions for the first three tariffs, the 3rd 2009 Energy Package, once translated into France’s Energy Code, has given CRE decision powers. Until the 2010 so-called NOME Law, CRE was merely consulted, before the Governement set regulated sales tariffs both for electricity and gas. However, under the new Law, CRE’s responsibility has increased, as the French regulator makes now propositions for electricity rates. The use of soft law has allowed CRE to tackle different issues, be it by interpreting a law, through mere recommandations, or through a creative mix of advices and strong suggestions. By doing so, CRE has succceed in structuring the energy market, as its economic expertise has helped its opening. Even so, this has also opened the door to many legal litigations. The resolve of those legal disputes has, most of the time, conforted CRE’s positions at the expense of the Government. Nevertheless, CRE’s claim for its independence calls for a democratic control, as a counterpart, in order to guarantee the legitimity of the regulatory body. A thorough review of existing processes shows important deficiencies in parliamentary control, which is symptomatic of a more general problem in the field of evaluation of public policies. At the EU level, the Commission’s position in the energy regulation field has evolved between the 1996 first Directive and the 2019 one. CRE defends a gradual approach towards an Internal Energy Market, mostly thanks to regional initiatives, and has supported the creation of the Agency for the Cooperation of Energy Regulators (ACER), inasmuch this new body is independant from the Commission. This issue is a bone of contention between the European energy regulators and the Commission, which tends to overstep and mark its grip on ACER. This raises the question of the feasability of a true supranational regulation, which the 4th Energy Package aims at achieving, at least partly.