Thèse soutenue

Dissipation, cascade et singularités en turbulence

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Auteur / Autrice : Hugues Faller
Direction : Bérengère DubrulleCaroline Nore
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Physique
Date : Soutenance le 17/01/2022
Etablissement(s) : université Paris-Saclay
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Physique en Île-de-France (Paris ; 2014-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Service de physique de l'état condensé (Gif-sur-Yvette, Essonne) - Laboratoire interdisciplinaire des sciences du numérique (Orsay, Essonne ; 2021-....)
référent : Faculté des sciences d'Orsay
graduate school : Université Paris-Saclay. Graduate School Physique (2020-....)
Jury : Président / Présidente : Sébastien Galtier
Examinateurs / Examinatrices : Luca Biferale, Yannick Ponty, Alain Pumir
Rapporteurs / Rapporteuses : Luca Biferale, Yannick Ponty

Résumé

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Les écoulements turbulents sont régis par les équations de Navier-Stokes qui décrivent le mouvement des fluides des échelles macroscopiques aux échelles microscopiques, où des phénomènes de dissipation transforment l’énergie cinétique en énergie thermique. Deux particularités rendent difficile, voire impossible l’utilisation directe de ces équations pour simuler numériquement le comportement des fluides turbulents qui nous entourent : 1) les écoulements s’étendent sur des gammes d’échelles gigantesques, impliquant un nombre de degrés de liberté trop grand pour être géré par nos super-calculateurs actuels ; 2) ils conduisent au développement de structures localisées caractérisées par de très forts gradients, qu’on ne sait pas bien gérer numériquement, et qui pourraient être la signature de singularités ou de quasi singularités se développant dans la limite des grands nombres de Reynolds. Dans cette thèse, nous proposons d’utiliser ce second phénomène pour contrer les problèmes liés au premier, i.e. d'améliorer la modélisation des écoulements turbulents en tenant compte de leur irrégularité. Ainsi, nous proposons des modèles de correction des équations de Navier-Stokes aux échelles macroscopiques ou mésoscopiques. Ces modèles sont guidés par les observations et confrontés à des données expérimentales ou des simulations numériques. Nous présentons tout d'abord les équations de Navier-Stokes et le fonctionnement des simulations numériques pour les écoulements turbulents réels, de l'algorithme à la conduite de calcul haute performance. Ensuite, nous nous intéressons à deux quantités macroscopiques des écoulements turbulents : la topologie des grandes recirculations et le flux d’énergie. Pour ces quantités, nous proposons deux modélisations: une première pour le comportement loin des parois des fluides, à l'aide d'une méthode de simulation des grandes structures, et une seconde de prise en compte des parois et d'étude de l'impact de la rugosité sur l'entraînement du fluide. Après cette étude macroscopique, nous regardons d'un point de vue statistique les propriétés macroscopiques, mésoscopiques et microscopiques de la turbulence à l’aide des fonctions de structure et des flux locaux d'énergie inter-échelle. Notre analyse statistique met en lumière la faible régularité des écoulements observés qui ne semblent pas respecter la modélisation classique de Kolmogorov qui prévoit une échelle de régularisation fixe. Pour prendre en compte ce phénomène, nous proposons donc une nouvelle normalisation universelle des écoulements en utilisant les propriétés du modèle multifractal. Cette normalisation est interprétée dans un cadre thermodynamique, et liée à l’extensivité d’une énergie libre. Nous nous intéressons ensuite à la compréhension de la dissipation locale et de la variabilité observée de l’échelle de dissipation. Nous observons que cette dernière est corrélée avec l’existence de valeurs extrêmes de transfert d'énergie aux plus petites échelles, phénomène que nous interprétons comme une signature de l'existence de singularités ou quasi-singularités. Forts de cette vision, nous proposons un modèle de description des fluides incluant des singularités baptisées pinçons qui interagissent entre elles et avec l'écoulement régulier qui les entoure. Toutes ces modélisations, des plus grandes échelles de l'écoulement jusqu'aux singularités reflètent l'impact des singularités (défauts ponctuels) à différentes échelles. Si l'existence des pinçons n'est pas attestée, leur prise en compte permet d’expliquer ou de modéliser plusieurs phénomènes: la détermination de la topologie des grandes recirculations de l'écoulement, l'apparition de puits d'énergie indépendants de la viscosité et maintenus par le caractère hors équilibre et l’universalité des statistiques filtrées locales.