Le Bien Vivre entre théorie politique et politique publique : analyse à partir du cas de la Révolution Citoyenne en Equateur
Auteur / Autrice : | Matthieu Le Quang |
Direction : | Fabrice Flipo |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Philosophie politique |
Date : | Soutenance le 28/11/2022 |
Etablissement(s) : | Université Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences des sociétés (Paris ; 2019-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire de changement social et politique (Paris ; 2014-...) |
Jury : | Président / Présidente : Emmanuelle Sinardet |
Examinateurs / Examinatrices : Emmanuelle Sinardet, Franck Gaudichaud, David Garibay, Diana Sarrade Cobos, Marie Cuillerai, Michael Löwy | |
Rapporteur / Rapporteuse : Franck Gaudichaud, David Garibay |
Mots clés
Résumé
A la fin du XXème siècle et au début du nouveau millénaire, l'Amérique latine a connu une série de changements d'orientation politique avec l'arrivée de gouvernements post-néolibéraux. L'Equateur fait partie de ces pays avec l'élection de Rafael Correa dont le mandat a duré de 2007 à 2017. Avec l'approbation de la nouvelle Constitution en 2008, un nouveau concept a surgi dans les débats politiques et académiques : le Bien Vivre. En tant que signifiant vide, il a fait l'objet de diverses interprétations dont les débats théoriques ne sont pas isolés des conflits et des controverses que l'on peut trouver au sein des gauches équatoriennes durant la transition post-constitutionnelle et ont des répercussions politiques concrètes sur la direction politique du post-néolibéralisme de la Révolution Citoyenne. L'objectif de ce travail est de montrer quels sont les obstacles et les limites tant internes qu'externes pour la mise en œuvre d'une transition post-néolibérale vers une société du Bien Vivre dans un capitalisme périphérique. Pour cela, nous positionnons les débats du Bien Vivre au sein de la prolifique écologie politique latino-américaine faite de rencontres et de débats entre intellectuels et acteurs sociaux s'intégrant ainsi dans la longue tradition de la pensée critique latino-américaine. Une de nos hypothèses de travail est que le Bien Vivre est un concept encore en construction par sa définition assez large : une vie en harmonie avec soi-même, entre êtres humains et entre ceux-ci et la nature. A partir de cette hypothèse, nous avons identifié trois courants : le courant « culturaliste et indigéniste », l'« écologiste et post-développementaliste » et l'« éco-marxiste et étatiste ». Les interprétations et les débats autour de ce concept peuvent s'expliquer par le fait que la diversité des auteurs et acteurs socio-politiques, qui composent ces trois courants, viennent d'horizons et ont des intérêts différents. La trajectoire sociale et politique de ces auteurs influe sur leur pensée politique d'où les débats que l'on peut rencontrer autour des thèmes comme l'abandon ou non de la notion de développement, le rôle des ressources naturelles dans la transition vers un post-extractivisme ou encore dans la résolution des conflits socio-environnementaux. Ces débats théoriques seront mis à l'épreuve de l'étude du cas de la Révolution Citoyenne en Equateur. La richesse de ce processus politique vient du fait que l'on se trouve face à un gouvernement en dispute dû à son hétérogénéité politique. Les rapports de pouvoir au sein du gouvernement mais aussi la complexité des relations entre le gouvernement et les différents acteurs socio-politiques sont fondamentaux pour comprendre les difficultés de la transition post-néolibérale vers une société du Bien Vivre, tout comme les facteurs géopolitiques et la place de l'Equateur dans la division internationale du travail. L'expérience équatorienne se confronte à une tension, présente dans la Constitution, entre développement économique, extension des droits sociaux et protection de la nature, tout en considérant le respect des droits culturels des peuples et nationalités indigènes, dans un pays dont d'économie dépend de l'exploitation et de l'exportation de ses matières premières. La construction d'un horizon de sens était nécessaire pour dissocier le développement de la simple recherche de la croissance économique et l'associer avec la défense de la nature et des droits culturels et territoriales des peuples indigènes. Quel est le sens à donner à la transition post-néolibérale pour résoudre les tensions entre justice environnementale et justice sociale?