Exploration textométrique du discours de l'Organisation des Nations Unies sur la violence envers les femmes et de son évolution entre 1996 et 2019 : une étude sur corpus de deux genres discursifs d'organisation internationale en anglais et en français
Auteur / Autrice : | Célia Atzeni |
Direction : | Christopher John Gledhill, Florence Binard |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Linguistique anglaise |
Date : | Soutenance le 04/11/2022 |
Etablissement(s) : | Université Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences du langage (Paris ; 2019-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre de linguistique interlangues, lexicologie, linguistique anglaise et de corpus - atelier de la parole (Paris ; 2005-....) |
Jury : | Président / Présidente : Nicolas Froeliger |
Examinateurs / Examinatrices : Nicolas Froeliger, Rachele Raus, Pascaline Dury, Rita Temmerman, Adam Wilson | |
Rapporteur / Rapporteuse : Rachele Raus, Pascaline Dury |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Dans cette thèse, nous proposons une analyse exploratoire en diachronie du discours de l’Organisation des Nations Unies sur la violence envers les femmes depuis la Conférence de Pékin, ou Quatrième Conférence mondiale sur les femmes, jusqu’en 2019. Notre objectif est d’étudier la façon dont la violence envers les femmes, les actes de violence envers les femmes et les auteurs de ces violences sont désignés et représentés par l’ONU dans son discours, l’évolution de ces désignations et représentations entre les années 1990 et la fin des années 2010, et les similitudes et différences notables entre les textes adressés aux expert·e·s et représentant·e·s politiques via les rapports rédigés par les composantes des différents organes de l’ONU et ceux qui sont adressés au grand public, rédigés par des attaché·e ·s de presse, mais également entre les textes anglais et ceux rédigés et traduits en français. Pour ce faire, nous avons constitué un corpus bilingue de 5,5 millions de mots, rassemblant les rapports et les communiqués de presse de l’ONU traitant du thème de la violence envers les femmes publiés après la Conférence de Pékin et jusqu’à la fin de l’année 2019. Ce corpus a été exploité à l’aide d’outils lexicométrique et textométrique permettant d’observer les mots et les séquences de mots les plus fréquents, les mots et séquences de mots pouvant être sur-employés et sous-employés à certaines périodes, ainsi que l’apparition et la disparition de certains mots et termes. Les données extraites du corpus ont été confrontées à des documents historiques et textes avec lesquels le discours de l’ONU entre en résonance comme la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, ou encore le discours de la militante féministe américaine Diana Russell sur le féminicide (femicide en anglais),ainsi qu’au contexte de production historique, social, intellectuel et géopolitique des textes constituant le corpus d’étude. Nous avons ainsi pu observer que les rapports et communiqués de presse de l’ONU publiés entre 1996 et 2009, sont, en anglais comme en français, très différents de ceux publiés entre 2010 et 2019 d’un point de vue langagier. Plusieurs termes comme violence against women and girls, child marriage, ou encore online violence against women ou « meurtre sexiste » ont fait leur apparition dans les années 2010 et suggèrent qu’une reconceptualisation de la notion de violence envers les femmes se manifeste dans le discours de l’ONU. La disparition du terme crime of passion et de son équivalent français « crime passionnel » se produit quant à elle en 2012 et est suivie du remplacement de ce terme par le terme d’origine militante féministe femicide, qui voit son sens lissé dans le discours onusien. D’autres formes de lissage discursif, visant à tenir un discours plus consensuel sur la violence envers les femmes,sont mises au jour dans cette thèse, comme l’effacement de la modalité déontique pour s’adresser aux États et gouvernements du monde à partir de 2010, ou encore la mise en arrière-plan des auteurs d’actes de violence et une tendance à éviter d’identifier ces auteurs par leur genre masculin lorsqu’il s’agit de parler d’actes de violence envers les femmes. La représentation de la violence envers les femmes à l’aide des métaphores de la maladie et de la guerre, fréquentes dans le discours politique, est également abordée et contribue également au lissage du discours onusien, tout en répondant à une visée persuasive.