Thèse soutenue

Tolérance aux antibiotiques et formation de biofilm chez le symbiote intestinal anaérobie, bacteroides thetaiotaomicron

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Auteur / Autrice : Anne-Aurélie Lopes
Direction : Jean-Marc Ghigo
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Microbiologie
Date : Soutenance le 26/10/2022
Etablissement(s) : Université Paris Cité
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Bio Sorbonne Paris Cité (Paris ; 2014-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Génétique des biofilms (Paris)
Structure de recherche : Institut Pasteur. Département de Microbiologie (2006-….)
Jury : Président / Présidente : Isabelle Martin-Verstraete
Examinateurs / Examinatrices : Marie-Cécile Ploy, Philippe Langella
Rapporteurs / Rapporteuses : Christiane Forestier, Muriel Masi

Mots clés

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Résumé

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Le microbiote intestinal humain impacte notre santé via son rôle dans les fonctions digestives, métaboliques, immunitaires et même neurologiques. Sa composition est dominée par les phyla Firmicutes et Bacteroidetes, dont l'un des membres les plus abondants est la bactérie commensale et strictement anaérobie Bacteroides thetaiotaomicron. Transmise de la mère à l'enfant, B. thetaiotaomicron favorise dès la période néonatale le développement de l'épithélium intestinal et du système immunitaire et joue ensuite un rôle clé dans la dégradation des polysaccharides complexes non métabolisables par l'hôte. En cas de déséquilibre du microbiote (dysbiose), provoqué par exemple par un traitement antibiotique, la baisse du contrôle assuré par les populations commensales en général, et par B. thetaiotaomicron en particulier, favorise l'implantation de pathogènes intestinaux tels que Clostridioides difficile, bactérie à l'origine de sévères diarrhées. Par ailleurs, la diminution de l'abondance des Bacteroides, dont B. thetaiotaomicron, est aussi corrélée à l'apparition de maladies intestinales inflammatoires chroniques et d'obésité. Alors que les communautés de bactéries intestinales adoptent un mode de vie proche du biofilm (communautés de bactéries agrégées entres elles), la formation de biofilm et la tolérance aux antibiotiques ont principalement été étudiées chez des bactéries pathogènes aérobies ou aérobies facultatives (Escherichia coli, Pseudomonas aeruginosa, Staphylococcus aureus, etc.) en raison des préoccupations cliniques majeures qu'elles engendrent. Pourtant le biofilm et l'antibio-tolérance induite par les biofilms des bactéries commensales pourraient être impliqués dans plusieurs aspects bénéfiques importants, depuis la colonisation chez les nouveau-nés, jusqu'à la résilience aux dysbioses antibiotiques et ainsi contribuer à la prévention des infections secondaires opportunistes ou de certaines maladies inflammatoires chroniques. Lors de ma thèse, je me suis intéressée à la formation de biofilm chez B. thetaiotaomicron, tout d'abord en contribuant à une étude portant sur le rôle des sels biliaires dans l'induction de la formation de biofilm chez B. thetaiotaomicron et l'importance de la dégradation de l'ADN par une nucléase extracellulaire (BT3563). Je me suis ensuite intéressée au rôle potentiel des pompes à efflux dans la formation de biofilm. Après avoir montré que le phénylalanine-arginine ß-naphthylamide (PAßN), un inhibiteur global des pompes à efflux de type RND, inhibe la formation de biofilm dépendant des sels biliaires, j'ai réalisé un crible de ces pompes à efflux et mis en évidence le rôle de la pompe BT3337-39, dont l'expression est induite par la présence de sels biliaires, ainsi que du régulateur transcriptionnel, appartenant à la famille AraC, BT1847. J'ai ensuite mis en évidence le lien entre cette pompe, ce régulateur, la concentration extracellulaire en magnésium et le profil en ADN de la matrice extracellulaire. J'ai aussi démontré in vitro que la formation de biofilm entraîne une tolérance aux antibiotiques à des concentrations très élevées dans la souche de laboratoire VPI5482 mais aussi chez certains isolats cliniques formant du biofilm. L'implication de cette antibio-tolérance induite par le biofilm dans la limitation des dysbioses aux antibiotiques et les infections secondaires à C. difficile est actuellement testée en minibioréacteurs (MBRA), un système de culture in vitro qui permet de tester l'effet de l'antibio-tolérance de nos souches en présence de communautés microbiennes fécales complexes, ainsi que in vivo dans un modèle murin. Au-delà de ses aspects fondamentaux, ce projet pourrait, à terme, mener à la conception d'indicateurs prédictifs de dysbiose ou de stratégies raisonnées de conception de souches probiotiques de B. thetaiotaomicron, susceptibles de réduire l'impact négatif d'évènements dysbiotiques.