Thèse soutenue

Environnement, horloges biologiques et biominéralisation de la coquille de la moule Mytilus galloprovinciallis

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Auteur / Autrice : Victoria Louis
Direction : Franck LartaudLaurence Besseau
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences de la Mer
Date : Soutenance le 14/12/2022
Etablissement(s) : Sorbonne université
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de l'environnement d'Île-de-France (Paris ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire d'écogéochimie des environnements benthiques (Banyuls-sur-Mer, Pyrénées-Orientales ; 2012-....)
Jury : Président / Présidente : Loïc Segalen
Examinateurs / Examinatrices : Audrey Mat, Matthieu Carré, Marc de Rafélis Saint Sauveur
Rapporteur / Rapporteuse : Frédéric Marin, Eric Verrecchia

Résumé

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La coquille des bivalves se forme par le processus de biominéralisation qui n’est pas constant au cours du temps. Ainsi se forment des patrons de croissance dans la coquille, consistant en une alternance d’incréments et de stries de croissance. Leur formation est connue pour être liée aux conditions environnementales et/ou physiologiques. C’est pourquoi les coquilles de bivalves sont utilisées comme archives biologiques, permettant de reconstruire des (paléo)environnements et des (paléo)climats. Toutefois, les acteurs du contrôle temporel de la formation d’incréments dans la coquille sont encore mal identifiés : certains travaux ont mis en évidence un contrôle direct par les facteurs environnementaux, et d’autres suggèrent l’implication des horloges biologiques. Dans ce travail, les deux hypothèses ont été explorées en utilisant une approche pluridisciplinaire, croisant la sclérochronologie et la chronobiologie, avec la moule de Méditerranée, Mytilus galloprovincialis, comme modèle biologique. Les patrons de croissance des coquilles de moules ont été caractérisés dans deux lagunes méditerranéennes (Canet-Saint-Nazaire et Salses-Leucate) et en mer, dans la baie de Banyuls-sur-mer, pendant un an. En parallèle, les données environnementales ont été mesurées in situ ou obtenues à partir de bases de données, afin de cerner celles susceptibles d’impacter l’incrémentation des coquilles. Les patrons de croissance observés sont variables dans le temps (sur 1 an) et dans l’espace (selon le site étudié). A côté d’une incrémentation journalière (1/jour) ou tidale (2/jour), un régime particulier (lié au régime mixte semi diurne de marée de la région) a été caractérisé dans les coquilles d’individus des trois sites à diverses périodes de l’année. Ces observations suggèrent un contrôle de la biominéralisation par des horloges biologiques, imprimant une incrémentation circadienne ou tidale, tandis que la variabilité observée dans la formation d’incréments serait liée à la disponibilité de la nourriture, révélant deux modes distincts du contrôle de la biominéralisation. Afin de décrire l’horloge biologique de M. galloprovincialis, une analyse de l’expression de gènes relatifs à l’horloge biologique a été menée, d’une part sur des échantillons prélevés en mer sur 36 h, et d’autre part sur des moules élevées en aquariums dans des conditions de photopériode et de nourrissage contrôlées durant 28h. Nos résultats montrent une horloge plastique chez M. galloprovincialis mais son caractère endogène n’a pas pu être établi. En aquarium, en conditions constantes de photopériode ou de nourrissage, les patrons de croissance observés suggèrent le contrôle d’une horloge biologique. Cependant, aucune corrélation n’a pu être établie entre les profils d’expression des gènes liés à l’horloge et ceux des gènes relatifs à la biominéralisation. Ainsi, ni les fluctuations environnementales, ni l’action des horloges ne peuvent expliquer la formation des patrons de croissance observés de manière exclusive. Un contrôle conjoint est suggéré, médié par l’activité des valves de M. galloprovincialis dont la fermeture prolongée pourrait être à l’origine de stries de croissance en induisant une diminution du pH dans la cavité extrapalléale. Afin de tester cette l’hypothèse, le comportement des valves a été enregistré chez des individus élevés en conditions contrôlées (photopériode et/ou nourrissage), puis les patrons de croissance des coquilles analysés. Aucune des deux variables environnementales n’a d’impact sur le rythme de biominéralisation, et aucune corrélation n’est établie entre le nombre d’incréments formés et l’activité des valves. Ainsi, le processus par lequel l’horloge biologique pourrait contrôler la biominéralisation reste difficile à préciser. Ce travail constitue néanmoins une base solide pour des études futures sur la caractérisation de la relation entre les variations environnementales et le processus rythmique de formation de la coquille des bivalves.