Thèse soutenue

Renforcement et aversion à la nicotine : interactions des circuits dopaminergique et interpédonculaire

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Auteur / Autrice : Joachim Jehl
Direction : Alexandre Mourot
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Neurosciences
Date : Soutenance le 28/10/2022
Etablissement(s) : Sorbonne université
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Cerveau, cognition, comportement (Paris ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire Plasticité du cerveau (Paris ; 2014-....)
Jury : Président / Présidente : Jocelyne Caboche
Examinateurs / Examinatrices : Guillaume Dugué, Catherine Le Moine
Rapporteurs / Rapporteuses : Vincent David, Sebastian Fernandez

Résumé

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Le tabagisme concerne un milliard de personnes à travers le monde et est à l’origine de plus de 8 millions de décès par an. La nicotine, principal composé actif du tabac, agit sur le système nerveux par l’intermédiaire des récepteurs nicotiniques de l'acétylcholine (nAChR). Il existe dans le cerveau 12 gènes (α2 à 10 et β2 à 4) codant les sous-unités des nAChR. Celles-ci s’assemblent en un répertoire très riche de récepteurs aux propriétés et fonctions variées. En se liant sur ces différents nAChR, la nicotine génère à la fois des effets récompensants, qui vont promouvoir la consommation de drogue, et des effets aversifs qui vont à l’inverse la limiter. Cette compétition entre propriétés antagonistes semble distribuée au sein de deux régions cérébrales séparées : l’aire tegmentale ventrale (VTA), contenant des neurones dopaminergiques moteurs dans le renforcement à la drogue, et le noyau interpédonculaire (IPN), une structure présentant une grande variété de nAChR et impliquée dans l’aversion. Bien que le rôle de la VTA dans l’addiction soit bien établi, l’action de la nicotine sur l’IPN et les éventuelles interactions entre ces deux acteurs restent à élucider. L'objectif de ce travail a ainsi été d'interroger le rôle de l’IPN, des nAChR qu’il exprime et de leur impact sur la VTA dans l’émergence des effets renforçants et aversifs de la nicotine. J’ai dans un premier temps étudié l’implication de ces circuits neuronaux dans le déclenchement d’un renforcement à la drogue, première étape menant l’individu à la dépendance. Pour cela, j’ai développé des outils permettant de contrôler in vivo l’activité de nAChR spécifiques. Ces nouvelles technologies m’ont permis de démontrer une hétérogénéité dans les réponses de l’IPN à la nicotine, qui est sous-tendue par des populations distinctes de nAChR. Mes résultats montrent en outre que l’IPN est engagé dès les faibles doses de nicotine et en atténue les effets neurophysiologiques sur la VTA et sur le renforcement à la drogue par l’intermédiaire des récepteurs β4. L’addiction induite par le renforcement est caractérisée par une perte de contrôle de la consommation, participant à une exposition répétée du système nerveux à la nicotine. La seconde partie de mon travail fut consacrée à étudier la manière dont l’IPN intervient dans ces comportements de consommation ainsi que les adaptations neurophysiologiques en résultant. Nous avons analysé les stratégies individuelles de consommation et isolé une population de souris développant une aversion à la drogue. Nos résultats montrent que l’efficacité de la transmission nicotinique dans l’IPN, dépendante des récepteurs β4, participe au déclenchement de cette aversion. Une exposition chronique à la nicotine, quant à elle, réduit à la fois la réponse à la nicotine dans l’IPN et le niveau d’aversion à la drogue, favorisant ainsi sa consommation. Ces travaux font émerger l’IPN et les récepteurs β4 qu’il exprime comme des acteurs majeurs dans l’addiction, jouant le rôle de frein à la consommation de nicotine et à la mise en place du renforcement. Ils mettent également en lumière la communication entre les circuits de la récompense et de l’aversion dans l’émergence d’une balance entre ces propriétés antagonistes de la nicotine.