Thèse soutenue

Déficits centraux auditifs dans les formes génétiques de surdité : l'exemple des gènes Cdhr23 et Pcdh15

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Auteur / Autrice : Olivier Postal
Direction : Boris GourévitchNicolas Michalski
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Biologie cellulaire et développement
Date : Soutenance le 14/09/2022
Etablissement(s) : Sorbonne université
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Complexité du vivant (Paris ; 2009-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut Pasteur. Département de l'Institut de l’audition – centre de l’Institut Pasteur (2019-….)
Jury : Président / Présidente : Laurent Tiret
Examinateurs / Examinatrices : Tania Barkat Rinaldi, Volker Bormuth
Rapporteur / Rapporteuse : Régis Nouvian, Arnaud Noreña

Résumé

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Au cours des trois dernières décennies, l’étude des formes héréditaires de surdité par une approche génétique a permis de mieux comprendre la physiologie de la cochlée, l’organe sensoriel de l’audition. Cependant, cette approche ne permet pas d’étudier aussi efficacement les dysfonctionnements du système auditif central affectant pourtant de nombreux patients. Ces déficits auditifs centraux sont mal connus et, dans certains cas, passent même inaperçus. Ceci est probablement dû à l’atteinte cochléaire qui prive le cerveau de tout ou partie des informations acoustiques qu’il reçoit normalement. Afin d’identifier les formes génétiques de surdités pouvant associer à la fois des déficits auditifs périphériques et centraux, mon laboratoire de thèse étudie la susceptibilité des souris aux crises audiogènes. Ce sont des épilepsies réflexes en réponse à un son de forte intensité, une manifestation typique de déficits centraux. En effet, plusieurs lignées de souris mutantes pour des gènes de surdité présentent une susceptibilité aux crises audiogènes. C’est notamment le cas des souris porteuses de mutation dans les gènes Cdhr23 et Pcdh15, sourdes à l’état bi-allélique mais susceptibles aux crises audiogènes à l’état mono-allélique sans perte auditive. Il a été suggéré que ces deux gènes de surdité jouent un rôle dans le développement des interneurones inhibiteurs corticaux exprimant la parvalbumine (PV). L’objectif de ma thèse était d’une part de développer des outils permettant d’identifier facilement la présence de troubles auditifs centraux dans les modèles murins de surdité d’origine génétique, et d’autre part d’approfondir les rôles de Cdhr23 et Pcdh15 dans le système auditif central grâce à des modèles murins d’inactivation conditionnelle dans l’encéphale. J’ai tout d’abord mis au point chez la souris une méthode de mesure non invasive des potentiels évoqués auditifs corticaux, et mis en évidence que les souris perçoivent différemment des sons aversifs aux caractéristiques acoustiques particulières, qui, chez l’humain, activent un large réseau de neurones bien au-delà de ceux nécessaires à l’audition. Ces résultats permettront à l’avenir d’étudier plus finement les déficits auditifs centraux. Dans un deuxième temps, j’ai montré, grâce à des techniques d’électrophysiologie in vivo et des études psychoacoustiques chez la souris, que l’inactivation conditionnelle de Cdhr23 et Pcdh15 modifiait certaines caractéristiques spectrales et temporelles des réponses neuronales à des sons sans en modifier significativement leur perception. De plus, j’ai pu préciser le rôle de ces deux gènes dans le développement des interneurones à PV. Alors qu’une précédente étude suggérait que Cdhr23 et Pcdh15 étaient exprimés dans des neuroblastes à destination du cortex auditif, mes résultats montrent qu’ils seraient exprimés dans l’ensemble du cortex et majoritairement dans la microglie (pour Cdhr23) et dans des progéniteurs d’oligodendrocytes (pour Pcdh15), deux populations fortement liées au développement et au fonctionnement des interneurones à PV. Cdhr23 est aussi exprimé dans des neurones sous-corticaux de régions auditives, motrices et multisensorielles. Le rôle de Cdhr23 et Pcdh15 dans le développement des interneurones à PV serait donc indirect et plus complexe qu’envisagé. Il faudra par la suite prendre en compte cette nouvelle avancée pour analyser précisément les conséquences fonctionnelles de leur inactivation dans le cerveau. Ainsi, mes résultats montrent que ces deux gènes de surdité ont un rôle intrinsèque dans le système nerveux central sans être restreints aux circuits auditifs et participent probablement à de nombreux mécanismes cellulaires dont la diversité doit encore être explorée afin de mieux caractériser les déficits centraux qui pourraient exister chez des patients porteurs de mutations CDHR23 ou PCDH15.