Thèse soutenue

L'Argentine par Carlos Saura. El Sur, Tango et Zonda, folklore argentino : trois films et autant de regards sur la culture argentine
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Auteur / Autrice : Stephanie Hontang
Direction : Dardo ScavinoChristelle Colin
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Hispanophone
Date : Soutenance le 02/12/2022
Etablissement(s) : Pau
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale sciences sociales et humanités (Pau, Pyrénées Atlantiques)
Jury : Président / Présidente : Frédéric Gimello-Mesplomb
Examinateurs / Examinatrices : Marianne Bloch-Robin, Jean-Jacques Cheval, Pietsie Feenstra, Hélène Laplace-Claverie
Rapporteurs / Rapporteuses : Frédéric Gimello-Mesplomb, Fabrice Parisot

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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Cette étude propose une analyse du regard que pose le cinéaste espagnol Carlos Saura sur les cultures argentines dans la filmographie qu’il consacre à ce pays. Celle-ci se compose de trois œuvres, toutes issues de coproductions hispano-argentines. Il s’agit de l’adaptation d’un conte de Jorge Luis Borges, El Sur (1992) et de deux films musicaux: Tango (1998) et Zonda, folklore argentino (2015). La question qui s’agitait initialement en sous-couche de cette analyse à la fois sémiotique, esthétique et civilisationnelle était la suivante : la caméra de Carlos Saura reproduit-elle, déplace-t-elle ou dépasse-t-elle les lieux communs que fabrique l’imaginaire collectif, notamment celui de “l’étranger occidental”, sur l’Argentine ? Que voit-on ou qu’entend-on lorsque l’on regarde ou écoute un tango ? Par effet de glissements, de comparaisons ou de collusions entre les plans, les séquences et les disciplines des arts du cinéma, de la danse et de la musique, le regard ou le cadre de la caméra de Carlos Saura n’est jamais figé. Au contraire, il s’ouvre vers un hors-champ sonore et visuel infini. Il nous invite à regarder au-delà des hégémonies culturelles et esthétiques. Il révèle les liens entre les cultures et les arts. La recherche tonale et chorégraphique qu’entreprend le cinéaste au prisme de l’image cinématographique permet de mettre en valeur d’autres expressions culturelles éloignées de stéréotypes. Les substrats du tango tels que celui afro-argentin se révèlent par exemple. De fait, le rythme syncopé joué au bandonéon n’est pas le seul marqueur sonore du tango. Par ailleurs, les musiques et les danses “traditionnelles” du Nord-Ouest argentin se déploient au sein de mises en scène contemporaines. Ainsi, la violence d’un imaginaire national divisant l’Argentine entre civilisation et barbarie, entre modernité et tradition, et rendant de fait invisible une partie du pays, est mise à mal. Cette idée de la nation argentine, née dans l’esprit de Domingo Faustino Sarmiento, un homme politique argentin ayant marqué la deuxième moitié du 19ème siècle, progresse alors que l’Etat argentin n’a pas un siècle d’existence. Le développement du cinéma, quasi concomitant, favorise la projection de cet imaginaire sur le pays : le 7ème art sera l’un des vecteurs de ces discours nationaux sur l’identité. Certains desdits stéréotypes, essaimés dans le cinéma musical argentin des années 1930, vont s’épanouir dans les années 1960 au sein de films de genre issus du système de coproduction hispano-argentine. En adoptant un regard protéiforme sur les cultures argentines, Carlos Saura montre l’impossible unicité de l’Art, de la culture et de l'être. Le hors-champ visuel et sonore qu’il construit au fil de ses trois films s’oppose à toute prétention totalitaire et à la tentation d’imposer une image essentialiste d’une Argentine qui se résumerait à un tango triste et à sa capitale, Buenos Aires. Sans renoncer à certains lieux communs, Carlos Saura fait du cinéma un art du raccord qui relie les individus entre eux à la différence d’un cinéma codifié qui maintient des structures narratives et idéologiques.