Polyphonies féminines : exister et résister à travers l’hybridité poétique et sa traduction. Amelia Rosselli, Toni Maraini, Dahlia Ravikovitch et Yona Wallach
Auteur / Autrice : | Marta Carraro |
Direction : | Carole Ksiazenicer-Matheron, Barbara Agnese |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Littérature générale et comparée |
Date : | Soutenance le 14/02/2022 |
Etablissement(s) : | Paris 3 en cotutelle avec Université de Montréal (1978-....) |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Littérature française et comparée (Paris) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre d'études et de recherches comparatistes (Paris) |
Jury : | Président / Présidente : Robert Schwartzwald |
Examinateurs / Examinatrices : Carole Ksiazenicer-Matheron, Barbara Agnese, Robert Schwartzwald, Cristina Caracchini, Isabelle Poulin, Michèle Tauber | |
Rapporteur / Rapporteuse : Cristina Caracchini, Isabelle Poulin |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Ce travail se propose d’étudier la poésie d’Amelia Rosselli (1930-1996), de Toni Maraini (1941), de Dahlia Ravikovitch (1936-2005) et d’Yona Wallach (1944-1985) sous l’angle de la contestation. L’objectif principal est d’analyser l’hybridité poétique et son potentiel politico-contestataire chez ces femmes qui, à travers leur écriture, se rebellent contre les diktats du système patriarcal. L’après-guerre en Italie (Rosselli et Maraini) et la fondation de l’État d’Israël (Ravikovitch et Wallach), deux époques marquées par une forte valorisation du virilisme militariste et héroïque, constituent les contextes d’énonciation de ces œuvres. Selon notre hypothèse, c’est aussi en raison de cette valorisation du virilisme que l’expression poétique de ces femmes se conçoit comme une bataille : chacune à sa manière, les auteures aspirent à une révolution sociétale, concernant en particulier le statut des femmes et de leur écriture. Quelles sont les modalités de configuration de cette bataille, et comment celle-ci se reflète-t-elle dans la poésie de nos auteures ? Comment leur écriture s’exprime-t-elle en tant qu’espace de négociation au sein de la langue des pères ? Cette réflexion prendra la notion d’hybridité comme point de départ, examinant l’idée d’une expression contestataire qui émanerait des interstices mêmes du discours dominant (Bhabha). L’étude sera développée en trois parties principales. D’abord, il s’agira de montrer en quoi l’absorption et l’altération du langage masculin peuvent être utilisées par les femmes comme un outil de révolte aboutissant à un langage renouvelé. Ensuite sera abordée une autre manière, plus subtile, de s’approprier la langue et le pouvoir masculins : l’appropriation et l’ingestion du corpus des hommes, entendu au double sens de matière littéraire (intertextualité) et de corps stricto sensu (cannibalisme). Enfin, nous verrons comment le sujet-femme se déplace à la conquête de l’espace et du temps – ceux-ci étant définis comme des dimensions du privilège masculin – qu’elle hybride aussi. Nous constaterons que la traduction est consubstantielle à cette opération d’hybridation : l’acte traduisant se réalise par une nouvelle cannibalisation du corpus, lequel est alors déplacé vers une autre dimension spatio-temporelle, elle aussi conséquemment hybridée. En étudiant des textes en langue originale (italien, français, hébreu) et dans leurs langues de traduction (anglais, français, italien), nous verrons comment celle-ci agit comme une caisse de résonnance pour poursuivre le geste originaire de bataille et le prolonger dans une autre dynamique à même d’en amplifier le caractère hybride et d’en attiser la flamme contestataire. À travers ces nouvelles pistes interprétatives qui mettent de l’avant la dimension subversive de la poésie de ces auteures, ce travail démontre comment, substituant aux catégories fixes imposées par la société patriarcale une vision plus fluide du monde, l’écriture hybride des femmes fait de la page un espace révolutionnaire depuis lequel un nouveau paradigme peut surgir.