Thèse soutenue

La maternité adolescente à Haïti

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Auteur / Autrice : David Jean Simon
Direction : Aleksandr Aleksandrovič Avdeev
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Démographie
Date : Soutenance le 27/09/2022
Etablissement(s) : Paris 1
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de Géographie de Paris. Espace, sociétés, aménagement (Paris ; 2000-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut de démographie (Paris ; 1957-....)
Jury : Président / Présidente : Virginie Barrusse
Examinateurs / Examinatrices : Aleksandr Aleksandrovič Avdeev, Jorge Rodríguez Vignoli, Irina Troitskaya, Marianne Blidon
Rapporteur / Rapporteuse : Bénédique Paul

Résumé

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La maternité adolescente est classée comme un problème de santé publique majeur par l’Organisation mondiale de la santé. À Haïti, comme bon nombre de pays en développement, - en dépit de l’instauration de nombreux programmes de planification familiale par les pouvoirs publics et les institutions internationales telles que le Fonds des Nations Unies pour la Population (FNUAP), le Fonds des Nations Unies pour l’Enfance (Unicef) et l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) -, les statistiques sur la maternité à l’adolescence demeurent très préoccupantes. Au regard du haut taux de fécondité adolescente (55 ‰), de ses conséquences (avortements, naissances prématurées, déscolarisation, problèmes sociaux et familiaux, stigmatisations, violences, entre autres) et de l’importante contribution des adolescent.e.s à la dynamique démographique du pays et de leur rôle en tant qu’acteurs du changement, cette thèse doctorale se donne pour objectifs d’examiner les facteurs associés à la maternité adolescente à Haïti et d’étudier le vécu de la grossesse adolescente par les femmes ayant connu une maternité à l’adolescence. Les données utilisées proviennent de deux sources complémentaires : les 5 enquêtes démographiques et de santé réalisées dans le pays entre 1994 et 2017, et une enquête qualitative que nous avons menée en 2020 à Haïti. Si la plupart des travaux portant sur la maternité adolescente se focalise que sur le groupe 15-19 ans, notre travail, quant à lui, a considéré l’ensemble des femmes âgées de 15 à 49 ans. Un tel choix a permis d’étudier l’aspect générationnel de ce phénomène à Haïti. Les résultats ont montré que les femmes haïtiennes en âge de procréer, plus particulièrement les adolescentes et les jeunes adultes, évoluent dans un environnement socioéconomique très vulnérable. Par ailleurs, les données indiquent que très peu de femmes âgées de 15 à 49 ans ont de bonne connaissance sur le cycle ovulatoire et sont exposées à des messages relatifs à la sexualité par le biais des médias. À souligner que cette faible proportion de femmes enquêtées ayant de bonne connaissance sur le cycle ovulatoire et exposées aux messages sur la sexualité est beaucoup plus importante chez les adolescentes que chez les femmes plus âgées. Les données mettent aussi au jour une non observance des normes traditionnelles en matière de sexualité à Haïti. Sous l’effet de la modernisation et de l’urbanisation, les normes de comportements sexuels sont en constante évolution. En effet, la proportion de femmes qui s’engagent dans des relations sexuelles à l’adolescence ne cesse d’augmenter. De plus, cette sexualité hors mariage est de plus en plus précoce et à haut risque, car la pratique contraceptive est très faible. En s’intéressant à l’âge à la première union et au nombre idéal d’enfants désirés, nous avons constaté que les femmes (quel que soit le groupe d’âge) souhaitent avoir moins d’enfants et entrent en union plus tardivement. L’adoption d’un tel comportement est grande partie influencée par le contexte socio-économique et la modernisation. Il a été observé que la proportion de mères adolescentes est restée stable entre 1994 et 2017, et que la maternité adolescente à Haïti est significativement liée à la précocité de la mise en union et des relations sexuelles, à un faible niveau d’instruction, à un souhait de fécondité élevé et à un facteur d’ordre générationnel (plus les femmes sont âgées, plus elles couraient de risques d’être mères adolescentes). Pour finir, les propos recueillis lors des entretiens réalisés ont montré que la maternité adolescente est de plus en plus perçue comme un acte socialement déviant, en raison de l’évolution économique dégradante à Haïti et des conditions sanitaires, et c’est ce qui explique en grande partie la violence subie par certaines adolescentes de la part de leurs parents/partenaires durant leur période de grossesse. [...]