Thèse soutenue

Impact des pesticides sur le neurodéveloppement et la maladie d'Alzheimer

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Lucie Salvador-Prince
Direction : Véronique PerrierJoan Torrent
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Biologie Santé
Date : Soutenance le 03/05/2022
Etablissement(s) : Montpellier
Ecole(s) doctorale(s) : Sciences Chimiques et Biologiques pour la Santé
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut des neurosciences de Montpellier
Jury : Président / Présidente : Florence Perrin
Examinateurs / Examinatrices : Véronique Perrier, Joan Torrent, Florence Perrin, Juliette Godin, Benoît Schneider, Marc Dhenain
Rapporteurs / Rapporteuses : Juliette Godin, Benoît Schneider

Résumé

FR  |  
EN

L'emploi massif de pesticides dans le monde entraîne une pollution de tous les milieux et une contamination des denrées alimentaires par de multiples résidus. De nombreuses études épidémiologiques montrent des corrélations entre une forte exposition aux pesticides et des pathologies neurodéveloppementales comme l’autisme ou le trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité. Le neurodéveloppement correspond à une période de susceptibilité aux polluants environnementaux et selon l’hypothèse d’Arendt, des altérations au cours du neurodéveloppement, et en particulier la corticogénèse, pourraient avoir des répercussions sur le vieillissement du cerveau en favorisant le développement de maladie neurodégénératives. Cependant, il est difficile d’un point de vue épidémiologique de déterminer l’impact d’une exposition in utero aux faibles doses de pesticides et tout au long de la vie sur le cerveau humain. Il est donc important de mimer cette contamination silencieuse sur des modèles animaux. Après avoir montré qu’une exposition chronique à de faibles doses de fongicides (cyprodinil, mépanipyrim, pyriméthanil) induisait une aggravation des marqueurs de la maladie d’Alzheimer (MA) dans le modèle de souris transgénique J20, nous nous sommes demandés si une exposition in utero à ces mêmes composés pouvait induire des défauts neurodéveloppementaux et si ces défauts pouvaient conduire au cours du vieillissement à une dérégulation des marqueurs de la MA. Partant de cette hypothèse, nous avons mis en place un modèle de contamination mère-enfant, dans lequel des femelles sauvages ont été exposées durant la gestation, soit à un fongicide seul, soit au cocktail des trois fongicides (cyprodinil, mépanipyrim et pyriméthanil) à la dose de 0.1 μg/L/pesticide (dose réglementaire autorisée dans l’eau du robinet en Europe). Une première étude du cerveau des nouveau-nés, à 3 jours post-natal (P3), a montré que l’exposition gestationnelle aux fongicides a un impact sur la neurogenèse avec une augmentation des précurseurs neuraux et des neurones immatures, et une diminution des neurones matures, en lien avec la voie de signalisation PI3K/Akt et Wnt/β-caténine. Une extraction des cellules souches neurales adultes des souris traitées pendant 4 mois, a mis en évidence une augmentation de leurs propriétés de prolifération et de différenciation mais paradoxalement à une réduction de leur propriété migratoire. De plus, des modifications de l’expression de protéines post-synaptiques telle que PSD95 et les récepteurs NMDA ont été mises en évidence. Pour aller plus loin, nous avons analysé l’activité synaptique hippocampique des souris exposées in utero au cocktail de fongicides à P10, P18 et P30. Les résultats ont montré que chez les souris traitées au cocktail, on retrouve des modifications du ratio des récepteurs au glutamate NMDA/AMPA, un défaut de maturation des synapses avec un retard du switch des sous-unités GluN2a/GluN2 b au cours du développement, des signaux de type épileptique ou poly-synaptiques ainsi qu’un défaut de plasticité synaptique. Nous avons également étudié la corticogénèse chez des nouveau-nés à P10 exposés in utero au cocktail de fongicides, grâce à une technique d’électroporation in utero de traceurs fluorescents multi-couleurs « MAGIC markers » qui permet de suivre la descendance des précurseurs neuraux. Les résultats montrent que les souris traitées présentent des défauts au niveau de la morphologie et de l’organisation des neurones, ainsi que de la formation des couches corticales. Pour compléter, des études de comportement ont montré que les souris exposées in utero au cocktail de fongicides présentent une hypoactivité et des défauts de mémorisation. Enfin, des souris traitées dès la gestation et jusqu’à 6 et 9 mois de vie font l’objet d’analyses biochimiques et histologiques afin de déterminer si l’exposition aux fongicides peut avoir un impact au cours du vieillissement sur l’augmentation des marqueurs de la MA.