Thèse soutenue

Les adaptations textuelles et scéniques de Shakespeare en Inde coloniale (1852-1932) : enjeux et processus
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Auteur / Autrice : Chandniée Chandranandinee Tushar Iyengar
Direction : Florence March
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Études du monde anglophone
Date : Soutenance le 30/09/2022
Etablissement(s) : Montpellier 3
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale 58, Langues, Littératures, Cultures, Civilisations (Montpellier ; 2015-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut de recherche sur la Renaissance, l'âge classique et les Lumières (Montpellier)
Jury : Président / Présidente : Pascale Drouet
Examinateurs / Examinatrices : Jean-Christophe Mayer, Florence Cabaret
Rapporteurs / Rapporteuses : Andrew Hiscock

Résumé

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La présente thèse de doctorat étudie les premières adaptations indiennes du théâtre de Shakespeare dont la création remonte à l'époque coloniale. La période choisie pour la thèse va de 1852 à 1932, années qui marquent la parution des adaptations importantes du théâtre de Shakespeare en langues indiennes. Les trois principaux domaines d'étude abordés par la thèse sont : le contexte colonial anglophone de l’Inde coloniale, le cadre conceptuel des notions théoriques telles que l'adaptation, la « tradaptation » (Michel Garneau) et la réécriture, et, l'analyse critique de trois importantes adaptations indiennes des deux intrigues shakespeariennes les plus adaptées en Inde coloniale, Hamlet et The Merchant of Venice. L'histoire anglophone de l'Inde coloniale coïncide avec la première réception du théâtre de Shakespeare par les Indiens depuis la création des Playhouses britanniques à la fin du XVIIIe siècle. L’adoption de la Charte de 1835 par le gouvernement britannique consolida son objectif colonial d'angliciser l’ensemble du système éducatif de l’Inde. Ainsi, le système éducatif britannique entra en vigueur en Inde coloniale dix-huit ans après l’établissement du Hindu College, la première institution indienne anglophone fondée en 1817 à l’initiative de Raja Rammohun Roy et sous le parrainage de la famille royale de Calcutta. À la suite de la Grande Guerre d'Indépendance de 1857 entre la Compagnie britannique des Indes orientales et les États princiers indiens, l'Inde devint partie intégrante de l'Empire britannique. Ce passage du pouvoir de la Compagnie à la monarchie britannique inaugura une période d'après-guerre plus stable et politiquement moins précaire qui nourrit ce que la thèse nomme la vague shakespearienne, un courant dans les activités théâtrales indiennes inspiré de Shakespeare, qui se distinguait de la vague nationaliste du théâtre anticolonial. Les traductions des textes classiques sanskrits réalisées à l'époque coloniale par les premiers indianistes britanniques et européens, réinformèrent les productions théâtrales indiennes dont faisait partie un nombre important d’adaptations indiennes de Shakespeare et de Kâlidâsa grand dramaturge sanskrit de l’antiquité classique indienne. Shakespeare était souvent adapté par les mêmes auteurs indiens qui adaptèrent également Kâlidâsa du sanskrit en différentes langues régionales de l’Inde. Les deux épicentres d'où rayonnaient la plupart des adaptations textuelles et scéniques du théâtre de Shakespeare étaient Calcutta, l'ancienne capitale de la Compagnie, et Bombay sa capitale commerciale, manifestant deux différentes formes d'adaptations des pièces de Shakespeare : les « tradaptations » littéraires de la Renaissance du Bengale et les adaptations scéniques populaires du théâtre pârsi. Cette double contextualisation de la réception indienne de Shakespeare se caractérisait d’une influence très marquée des formes théâtrales classiques et folkloriques indiennes. Le théâtre indien moderne naquit vers la fin du XIXe siècle au plus fort des activités d'adaptation de Shakespeare, à la suite de l'assimilation des traits importants du théâtre shakespearien par les théâtres indiens régionaux, dont notamment la tragédie, forme traditionnellement inconnue des auteurs indiens. Cependant, les nouveaux théâtres indiens vernaculaires s’éloignèrent rapidement des activités d'adaptation et continuèrent à fleurir indépendamment dans les différentes régions du pays. Raktâśi [La demoiselle aux yeux sanglants], pièce en langue kannada adaptée de Hamlet de Shakespeare en 1932, annonça le début de la rupture du théâtre indien moderne avec l’influence shakespearienne sans pour autant pouvoir l’abandonner entièrement. De même, l'arrivée du cinéma parlant en 1931 accéléra la métamorphose du théâtre parsi en cinéma indien conduisant à l’épanouissement des adaptations cinématographiques indiennes du théâtre de Shakespeare.