Démocratie et droit à l'œuvre urbaine : perspectives de philosophie politique pour un urbanisme profane
Auteur / Autrice : | Tanaïs Rolland |
Direction : | Jean-Philippe Pierron, Sandra Fiori |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Philosophie mention éthique, politique et droit |
Date : | Soutenance le 15/06/2022 |
Etablissement(s) : | Lyon |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de philosophie (Lyon ; Grenoble ; 2007-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut de recherches philosophiques de Lyon |
Établissement opérateur de soutenance : Université Jean Moulin (Lyon ; 1973-....) | |
Jury : | Président / Présidente : Pascal Nicolas-Le Strat |
Examinateurs / Examinatrices : Pascal Nicolas-Le Strat, Chris Younès, Joëlle Zask, Charles Girard | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Chris Younès, Joëlle Zask |
Mots clés
Résumé
La participation démocratique à l’urbanisme cherche à décloisonner non seulement des savoirs experts et des savoirs profanes, mais également penser et faire, ou encore concevoir et construire. Ce décloisonnement répond au projet philosophique et politique énoncé en 1968 par Henri Lefebvre d’un droit à l’œuvre contenu dans son célèbre droit à la ville. Ce dernier a permis de donner un nom et un slogan à de nombreuses luttes urbaines pour davantage de démocratie participative dans les projets urbains. Depuis, l’urbanisme institutionnel a petit à petit intégré certaines exigences de concertation. Mais surtout, tout un imaginaire du faire soi-même a infusé dans les pratiques et la communication de ces projets, venu des chantiers participatifs et des manières alternatives et collectives d’habiter. La démocratie par le faire qui semble ainsi s’exprimer dans le milieu professionnel de la concertation des projets urbains vient d’une conception plutôt radicale et pragmatique de la participation, en écho à la radicalité politique du projet de Lefebvre lui-même. Tout cela entre en contradiction avec les circuits encore rigides et descendants des décisions d’urbanisme. Cette thèse cherche à expliciter l’évolution des concepts et des notions de la démocratie participative et du droit à l’œuvre en urbanisme à l’épreuve de cette contradiction.Cette recherche s’appuie ainsi sur le travail d’Henri Lefebvre, sur les théories de la philosophie pragmatique de la démocratie, mais également sur plusieurs expériences de la participation à la ville. La première est une expérience professionnelle de la concertation des projets urbains dans une agence d’urbanisme lyonnaise, via un contrat Cifre pour mener ce travail de thèse. La deuxième est celle de chantiers participatifs en squats et de collectifs en autogestion pour bâtir des Communs urbains. Dans le contexte d’une ville qui est aussi un espace d’exclusion, écartant de fait de la participation citoyenne à l’urbanisme, ces occupations de bâtiments et les Communs deviennent des appropriations performatives qui mettent à la fois à l’abri et politisent la possibilité et l’impossibilité d’habiter. Ces divers matériaux ont permis la formulation des questions suivantes : peut-on parler d’urbanisme profane ? Sur quoi se fonderait-t-il : sur les actions d’autoconstructions et de bricolage des personnes non-professionnelles, sur les usages quotidiens et ordinaires de la ville qui parviennent parfois à ouvrir des pratiques nouvelles et subversives vis-à-vis des comportements induits par la ville, ou encore sur un démantèlement du métier d’urbaniste qui circonscrit les légitimités à faire, à intervenir, à avoir un propos sur les formes urbaines ? Pour tenter de répondre à ces questions, une première hypothèse, active à la fois dans les différentes thèses de philosophie rencontrées et dans les pratiques de la transformation urbaine, est étudiée : celle selon laquelle la participation profane à l’urbanisme peut être confondue avec l’usage de la ville. L’usage, qui est parfois utilisé en urbanisme pour parler d’une action réciproque entre les habitant·es et leur espace dans leur expérience quotidienne de celui-ci, serait une participation ordinaire et commune à la ville. Notre seconde hypothèse, analysée dans le mouvement suivant, est que la participation est une appropriation spatiale, mobilisée comme outil et comme finalité de la participation à l’urbanisme. L’étude de l’usage puis de l’appropriation aboutira alors sur une proposition pour qualifier ce que serait un travail profane de la ville pour participer à donner corps au droit à l’œuvre esquissé par Lefebvre.