Étude isotopique de populations de Gaule du Nord durant le Second Âge du Fer : climat, alimentation, migrations
Auteur / Autrice : | Thibault Clauzel |
Direction : | Christophe Lecuyer, Pascale Richardin |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Paléoenvironnements et évolution |
Date : | Soutenance le 12/07/2022 |
Etablissement(s) : | Lyon |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Evolution Ecosystèmes Microbiologie Modélisation (Lyon ; 1999-....) |
Partenaire(s) de recherche : | établissement opérateur d'inscription : Université Claude Bernard (Lyon ; 1971-....) |
Laboratoire : Laboratoire de géologie de Lyon : Terre, planètes et environnement (Lyon ; 2011-....) | |
Jury : | Président / Présidente : Bruno Maureille |
Examinateurs / Examinatrices : Christophe Lecuyer, Pascale Richardin, Christine Hatté, Christophe Snoeck, Vincent Balter, Véronique Gardien, Estelle Herrscher | |
Rapporteur / Rapporteuse : Christine Hatté, Christophe Snoeck |
Mots clés
Résumé
Les peuples de Gaule ont occupé l’ensemble du territoire de l’Europe de l’Ouest durant le Second Âge du Fer (500 BCE – 50 BCE). Descendants des Celtes, les Gaulois se regroupaient en tribus et interagissaient par le commerce et la guerre. Du fait d’une transmission des connaissances essentiellement orale, les témoignages directs de la culture gauloise sont absents, tandis que les écrits provenant d’observateurs extérieurs grecs et romains ont longtemps contribué à la perception des Gaulois comme des peuples rustres et barbares. Un regard nouveau est cependant porté sur cette civilisation depuis la découverte de nombreux sites archéologiques gaulois du Second Âge du Fer en Europe. Deux sites archéologiques du Nord de la France ont été étudiés : Thézy-Glimont et Ribemont-sur-Ancre. Chacun de ces sites porte des problématiques spécifiques concernant l’origine et le statut social des individus enterrés, qui n’ont pas pu être entièrement résolues par les études archéologiques et anthropologiques. Dans cette thèse, ces problématiques ont été abordées via l’analyse isotopiques des restes osseux et dentaires des individus humains et animaux retrouvés sur les sites. Six systèmes isotopiques différents (oxygène, carbone, azote, soufre, strontium, hydrogène) ont été analysés sur les matrices minérales et organiques de restes archéologiques provenant de 55 humains et 24 animaux, ainsi que sur un squelette d’humain moderne. Tout d’abord, l’homogénéité isotopique observée à l’échelle intra-squelettique des individus enterrés dans les fosses à offrandes de Thézy-Glimont atteste qu’ils étaient sédentaires, très probablement autochtones, et qu’ils ont suivi un régime alimentaire stable au cours de leur vie. L’étude de l’homogénéité isotopique d’un squelette d’humain moderne permet de discuter des informations pouvant être acquises concernant son mode de vie, ainsi que de l’enregistrement de la diagenèse dans le matériel osseux. L’étude de la composition isotopique en oxygène des groupements phosphates de l’hydroxyapatite des restes osseux et dentaires de l’ensemble des individus de Thézy-Glimont montre que ceux-ci ont expérimenté l’Optimum Climatique Romain, avec des températures moyennes de l’air similaires aux températures actuelles. Leur régime alimentaire, étudié par l’analyse de la composition isotopique en carbone, azote et soufre du collagène, était omnivore à base de plantes en C3 et pauvre en viande, attestant probablement d’un bas niveau social. Des signatures isotopiques en soufre élevées témoigneraient d’une humidité exacerbée durant la vie des individus. Ensuite, l’ensemble des résultats isotopiques préalablement acquis démontre que la composition isotopique en hydrogène mesurée sur les tissus osseux et dentaires et la composition isotopique en oxygène mesurée sur le collagène sont de bons proxys climatiques, d’origine géographique, et de régime alimentaire dans le registre archéologique. Enfin, une étude isotopique multi-proxy est menée sur les restes osseux des guerriers du site de Ribemont-sur-Ancre. Les compositions isotopiques en oxygène des groupements phosphates de l’hydroxyapatite et les rapports radiogéniques du strontium mesurés sur les restes osseux montrent que les individus étaient allochtones et provenaient probablement d’Armorique. De plus, l’étude de la composition isotopique en carbone et azote du collagène permet de distinguer deux groupes, séparés spatialement au sein du site, et interprétés comme ayant un accès différent à la protéine animale en lien avec une différence de statut social : d’un côté les guerriers morts au combat, ayant un accès privilégié à la viande animale, et de l’autre les non-guerriers (compagnons, esclaves), qui y avaient un accès limité et qui auraient été sacrifiés dans un second temps. La datation par le radiocarbone des restes osseux du site montre également la persistance de son occupation pendant des décennies après l’affrontement, très certainement comme un lieu de commémoration.